Madagascar : Rajoelina et Macron annoncent la mise en place d’une commission mixte pour gérer les îles Éparses

Pour le deuxième jour de sa visite en France, Andry Rajoelina a été reçu à l’Élysée par Emmanuel Macron. Parmi les sujets de coopération bilatérale, les deux présidents ont abordé l’épineuse question des îles Éparses, dont Madagascar réclame la restitution depuis plusieurs années, et annoncé la formation d’une commission pour parvenir à une solution d’ici à 2020.

Emmanuel Macron (à d.) et Andry Rajoelina, à Paris, le 29 mai 2019 (image d’illustration). © Charles Platiau/AP/SIPA

Emmanuel Macron (à d.) et Andry Rajoelina, à Paris, le 29 mai 2019 (image d’illustration). © Charles Platiau/AP/SIPA

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Publié le 29 mai 2019 Lecture : 4 minutes.

La rencontre, prévue depuis l’entretien entre Emmanuel Macron et le président malgache Andry Rajoelina en marge du One Planet Summit du 14 mars à Nairobi, a duré près d’une heure. Les deux présidents ont échangé sur différents sujets, dont la lutte contre la délinquance, la coopération dans la lutte contre la pêche illicite et la piraterie, avec l’organisation prochaine d’un sommet international sur la sécurisation des espaces marins en Afrique de l’Est, ou encore l’environnement, avec une participation annoncée aux objectifs de reforestation de Madagascar.

Mais Andry Rajoelina et Emmanuel Macron étaient surtout attendus sur l’un des dossiers sensibles entre Antananarivo et Paris : celui des îles Éparses – Europa, Bassas da India et Juan de Nova -, qui comptent notamment des réserves de pétrole et de gaz dans l’offshore très profond et ont été conservées par la France après l’indépendance de Madagascar.

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Une commission mixte

Début mars, à l’occasion de la célébration du 51ème anniversaire de l’indépendance de l’Île Maurice, le président malgache a salué le « combat » de Maurice pour la restitution des îles Chagos, dossier dans lequel l’ONU a récemment sommé le Royaume-Uni d’agir. Rajoelina en avait profité pour réaffirmer « la volonté de Madagascar à mener le même combat pour la restitution des îles Éparses », sous contrôle de la France en dépit d’une résolution de l’assemblée générale des Nations unies du 12 décembre 1979, ordonnant leur restitution. Véronique Vouland-Aneini, l’ambassadrice de France à Madagascar, avait déclaré en 2015, en réponse aux revendications récurrentes des autorités malgaches, que « les îles Éparses appartiennent à la France ».

« L’appartenance des îles Éparses est une question d’identité nationale », a expliqué le 29 mai Andry Rajoelina à l’Élysée, soulignant qu’il avait demandé à son homologue français de « trouver une solution pour la gestion ou la restitution des îles Éparses ». Les deux chefs d’État ont annoncé la mise en place d’une « commission mixte », destinée à trouver « une solution commune » sur le sujet. « Nous allons lancer un travail conjoint entre nos deux pays pour aller vers une solution de développement commun dans la zone économique actuelle », a ajouté Emmanuel Macron. L’objectif est de parvenir à une solution d’ici le 60ème anniversaire de l’indépendance de Madagascar, le 26 juin 2020. Un événement pour lequel Andry Rajoelina a convié Emmanuel Macron en tant qu’invité d’honneur.

Francophonie et patronat au programme

Avec cette visite à l’Élysée et son passage à l’Assemblée nationale, Rajoelina poursuivait ainsi le volet politico-diplomatique de son déplacement à Paris. Mardi, pour le premier jour de son séjour, le président malgache a tenu un échange privé avec le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. La délégation de Rajoelina s’est ensuite rendue au siège de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) afin de rencontrer la secrétaire générale de l’institution, Louise Mushikiwabo. À l’occasion des législatives qui se tenaient à Madagascar le 27 mai, la Francophonie avait dépêché une mission d’information et de contacts.

Andry Rajoelina et Louise Mushikiwabo au siège de l'OIF, à Paris, le 28 mai 2019. © Présidence de Madagascar

Andry Rajoelina et Louise Mushikiwabo au siège de l'OIF, à Paris, le 28 mai 2019. © Présidence de Madagascar

Selon l’entourage de Louise Mushikiwabo, la rencontre a principalement porté sur des questions d’éducation. « [Le président Rajoelina] a sollicité un soutien renforcé de la Francophonie dans la formation des enseignants car ils souhaitent augmenter le nombre d’écoles et ont besoin de davantage de professeurs », explique-t-on à l’OIF. Emmanuel Macron a par ailleurs annoncé que 30 millions d’euros allaient être débloqués par l’Agence française de développement (AFD) pour soutenir la réforme du système éducatif malgache.

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La France étant également le premier partenaire commercial de Madagascar, Rajoelina avait aussi donné un fort accent économique à son déplacement avec une rencontre avec des hommes d’affaires français organisée par le Mouvement des entreprises de France (Medef).

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Retour en grâce

Ce déplacement a une saveur particulière pour celui qui, lors de sa première accession au pouvoir en 2009, avait essuyé les critiques à répétition de Paris et de la communauté internationale, qui voyait dans son accession au pouvoir « un coup d’État ». Mis au ban des institutions internationales de l’époque qui contestaient la légitimité de son mandat, il avait finalement été reçu deux ans et demi plus tard, en décembre 2011, par le président Nicolas Sarkozy, lors d’une visite dont il avait souhaité à l’époque qu’elle fasse foi de « reconnaissance officielle ».

Andry Rajoelina, élu lors des élections de décembre 2018, échappe cette fois-ci à la polémique pour ce second mandat remporté en dépit des contestations de son adversaire Marc Ravalomanana et des rumeurs d’ingérence russe au profit de certains candidats, relayées dans une enquête de la BBC, diffusée début avril. Pour ce retour à l’Élysée, Rajoelina a souhaité s’engager avec la France dans « une coopération exemplaire, différente de celle que nous avons eue par le passé ».

>>> À LIRE – Andry Rajoelina : « À Madagascar, nous avons tout pour réussir »

Rajoelina, qui a passé fin avril la barre symbolique des 100 jours à la tête du pays, semble déterminé à « agir à vitesse grand V », comme il l’a martelé pendant sa campagne axée sur la lutte contre l’insécurité, contre la corruption ou encore pour l’autosuffisance alimentaire. Celui qui est surnommé « TGV » n’échappe pour autant pas à certains revers politiques à l’intérieur du pays, comme l’avis défavorable rendu le 25 avril par la Haute Cour constitutionnelle (HCC) au sujet du référendum constitutionnelle qu’il souhaitait organiser afin de supprimer le Sénat. Sur la scène diplomatique, Rajoelina semble bel et bien avoir confirmé son retour en grâce. Le nouveau président de la Banque mondiale, David Malpass, a fait étape à Antananarivo en avril pour sa première tournée sur le continent, et le pape François doit également se rendre à Madagascar en septembre.

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