Côte d’Ivoire : trois mois après son élection, Amadou Soumahoro peine à convaincre à la tête de l’Assemblée

Jamais un président de l’Assemblée nationale ivoirienne n’avait autant été au centre de critiques, moins de 100 jours après son arrivée à la tête de l’institution. Amadou Soumahoro, élu le 7 mars dernier après la démission de Guillaume Soro, peine à se présenter comme un homme de consensus.

Amadou Soumahoro, lors de son élection à la  présidence de l’Assemblée nationale ivoirienne, le 7 mars 2019. © REUTERS/Thierry Gouegnon

Amadou Soumahoro, lors de son élection à la présidence de l’Assemblée nationale ivoirienne, le 7 mars 2019. © REUTERS/Thierry Gouegnon

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Publié le 29 mai 2019 Lecture : 3 minutes.

« Amadou Soumahoro est un problème », a protesté Maurice Kakou Guikahué, secrétaire exécutif du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI d’Henri Konan Bédié, principal parti de l’opposition parlementaire), le 28 mai. En moins de 100 jours à la tête de l’Assemblée nationale, après la démission de Guillaume Soro, Amadou Soumahoro, baron du Rassemblement des républicains (RDR d’Alassane Ouattara), fait l’objet de vives critiques de la part de l’opposition.

« Depuis le retour au multipartisme, Amadou Soumahoro est le sixième président de l’Assemblée nationale. Tous ses prédécesseurs ont eu à composer des bureaux respectant une arithmétique parfaite, basée sur le quota. Sauf Amadou Soumahoro », a dénoncé Maurice Kakou Guikahué en conférence de presse.

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Un difficile consensus

Les faits remontent au 7 mars 2019. Ce jour-là, Amadou Soumahoro est porté à la tête de l’Assemblée nationale par les députés issus du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP du président Alassane Ouattara), dans une salle désertée par les députés de l’opposition, qui dénonçaient une violation des textes. « Jamais dans l’Histoire de la Côte d’Ivoire un président de l’Assemblée nationale n’avait été élu sans un minimum de consensus entre la majorité et la minorité parlementaires », rappelle l’analyste politique ivoirien Innocent Gnelbin. « L’élection du président Amadou Soumahoro est légale et réglementaire. Il est un président légitime et non pas un président entre guillemet à qui on réclame », avait souligné le RHDP dans un communiqué.

Un mois plus tard, après la mise en place du bureau de l’Assemblée nationale encore boycottée par l’opposition, trois députés issus du PDCI, sur les quatre cooptés au sein du bureau composé d’une vingtaine de membres, ont tour à tour décliné leur nomination. « Je constate que, contrairement à la pratique parlementaire, le groupe parlementaire PDCI-RDA auquel j’appartiens n’a pas été consulté ou n’a pas donné son agrément à la proposition de nomination que vous me faites », avait écrit la députée Juliette Kinaya Camara à Amadou Soumahoro, l’invitant à « prendre attache avec le président de (son) groupe parlementaire afin de renouer le dialogue dans l’intérêt supérieur de la nation ».

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Soumahoro n’a pas pris directement attache avec le PDCI, mais a plutôt approché des médiateurs de l’Union africaine, en vue de trouver une issue favorable, non seulement avec le PDCI mais avec les trois groupes parlementaires de l’opposition (PDCI, Vox Populi et Rassemblement – proche de Soro). « Cette médiation a échoué », clament les trois groupes parlementaires, chaque camp se rejetant la responsabilité de l’échec des négociations. La première séance plénière de l’Assemblée nationale a ainsi été reportée sine die.

Soumahoro confiant

Autre front, autre camouflet. Alors qu’il avait demandé le retrait de deux députés PDCI du Parlement de la Communauté économique des États d’Afrique de l’ouest (Cedeao), quelques jours après avoir remplacé Guillaume Soro, le président de cette institution, le Sénégalais Moustapha Cisse Lo, lui avait opposé une fin de non-recevoir, lui rappelant que les textes communautaires n’autorisaient pas le remplacement d’un député avant la fin du mandat parlementaire de quatre ans.

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Au sein de l’institution elle-même, Soumahoro doit faire face au mécontentement de 41 cadres proches de son prédécesseur qu’il a remerciés et qui dénoncent un renvoi abusif. Regroupés en collectif, ils ont saisi un avocat qui devrait porter l’affaire devant les tribunaux en cas d’échec des négociations.

Toutes ces affaires ne semblent pourtant pas perturber Amadou Soumahoro. Il compte ainsi convoquer dans les prochains jours une plénière en vue du vote de lois tout aussi controversées sur la filiation, le mariage ou encore la succession.

D’ores et déjà, l’ex-secrétaire général par intérim du RDR a prévenu que ces textes passeraient sans difficultés, le RHDP disposant de la majorité absolue à l’Assemblée nationale. « Certes, il y a la séparation des pouvoirs comme l’indique la Constitution. Mais soyons réalistes, l’Assemblée nationale est autonome mais elle n’est pas indépendante car nous dépendons du pouvoir exécutif, a précisé Soumahoro le 17 mai en conférence de presse. Nos questeurs qui s’occupent de nos paies sont logés au ministère des Finances. Tant que je serai là, il n’y aura plus de divergences entre l’Assemblée nationale et les pouvoirs exécutif et judiciaire ».

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