OMC : l’Inde fait capoter l’accord de Bali

New Delhi vient de dire « non » à l’adoption de l’accord de Bali, difficilement approuvé en décembre 2013 et qui visait à poursuivre la libéralisation des échanges commerciaux.

Le directeur général de l’OMC, le Brésilien Roberto Azevedo, à Genève le 31 juillet 2014. © Fabrice Coffrini/AFP

Le directeur général de l’OMC, le Brésilien Roberto Azevedo, à Genève le 31 juillet 2014. © Fabrice Coffrini/AFP

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Publié le 1 août 2014 Lecture : 3 minutes.

Roberto Azevedo, directeur de l’OMC, a prié les États membres de « réfléchir longuement et sérieusement aux répercussions de ce revers »

C’est une bombe que l’Inde a fait exploser dans la nuit du 31 juillet, à Genève. La conférence des États membres de l’OMC, réunis à Genève, pour ratifier l’accord de Bali – obtenu en décembre dernier après des années de négociation – n’aurait dû être qu’une simple formalité.

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Las, l’Inde a exercé son droit de veto refusant d’approuver un texte auquel les 159 autres membres de l’Organisation mondiale du commerce avaient fini – bon gré, mal gré – par se rallier. Le premier accord commercial multilatéral négocié dans le cadre de l’OMC depuis la naissance de l’organisation est donc à nouveau dans l’impasse. Le consensus de Bali, qui devait conjurer définitivement la malédiction des cinq conférences ministérielles infructueuses enregistrées depuis 2001, n’aura tenu que deux saisons.

Irréductibles

La règle de l’unanimité qui régit l’OMC étant ce qu’elle est, l’intransigeance de New Delhi au sujet des stock alimentaires a fait capoter l’accord. Ni la pression des États-Unis – dont le secrétaire d’État, John Kerry, s’était rendu en Inde jeudi – ni celle de l’Union européenne, ni la colère de la Chine, de la Thaïlande, du Mexique ou du Pakistan – encore moins l’exaspération impuissante des pays en développement – n’ont suffi. Soutenue par l’irréductible trio de radicaux sud-américains (Cuba, Bolivie et Vénézuela), comme le révèle le Wall Street Journal, l’Inde n’a rien cédé.

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Jusqu’à la dernière minute, le Brésilien Roberto Azevedo, directeur de l’OMC, avait tenté en vain de débloquer la situation, s’entretenant régulièrement avec les coordinateurs des groupes régionaux au sein de l’ institution. En fin de soirée, il a réuni pendant quelques minutes les représentants des 160 Etats membres de l’OMC, à huis clos, pour leur annoncer qu’aucun accord n’avait été trouvé, rapporte l’AFP. Il a également prié les membres de l’OMC de « réfléchir longuement et sérieusement aux répercussions de ce revers ».

Stocks alimentaires

En pure perte. Le nouveau gouvernement indien, conduit par Narenda Modi, est revenu la semaine dernière sur l’accord de Bali. En décembre dernier, New Delhi avait plié devant la pression de Washington, acceptant un moratoire de quatre ans qui repousserait jusqu’à 2017 l’adoption d’une solution définitive à son souhait de pouvoir constituer des stocks de denrées de base, pour des motifs de sécurité alimentaire, en les achetant à ses agriculteurs à des prix supérieurs à ceux du marché pour ensuite les revendre à perte.

À Genève, ce jeudi, l’Inde a insisté pour qu’une réponse définitive à sa proposition soit trouvée avant le 31 décembre 2014, bloquant ainsi sur un point annexe (la sécurité alimentaire) la facilitation des échanges commerciaux – à travers la simplification des formalités douanières – et le droit arraché par les pays les moins avancés d’exporter vers les pays développés, sans frais de douanes, tous les produits dont 25 % de la valeur ajoutée aura été générée sur leur territoire. Tout cela est aujourd’hui dans l’impasse.

L’explosion des accords bilatéraux, qui se sont développés massivement devant l’incurie et la paralysie du système multilatéral de l’OMC, devrait s’accélérer.

La fin du multilatéralisme ?

L’échec de jeudi soir relance le débat sur la nécessité et la survie de l’OMC. Bali ne couvrait que 10 % du programme du cycle de négociations de Doha, lancé en 2001. Les 90 % restant, notamment les volets sur la réduction des barrières au commerce des biens manufacturés, sur le commerce international de services ou encore les droits de propriété intellectuelle, écartés en décembre dernier, sont aujourd’hui plus compromis que jamais.

La conclusion d’accords bilatéraux – ceux-ci se sont développés massivement devant l’incurie et la paralysie du système multilatéral de l’OMC – devrait connaître une accélération au cours des prochaines années.

Que le premier coup de pelle sur la carcasse de l’OMC vienne de l’Inde, qui mieux qu’aucun autre pays a su mettre à son avantage les vertus du libre-échange, n’en est que plus déroutant.

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