Les Africains entre deux feux

Publié le 25 février 2003 Lecture : 2 minutes.

Les États-Unis parviendront-il à rallier à la guerre contre l’Irak les trois pays africains – Angola, Cameroun et Guinée – siégeant actuellement au Conseil de sécurité de l’ONU ? En tout cas, ils ne ménagent pas leurs efforts en ce sens : en cinq jours, du 17 au 21 février, Walter Kansteiner, le sous-secrétaire d’État aux Affaires africaines, devait successivement se rendre à Luanda, à Yaoundé et à Conakry.
A priori, le gouvernement angolais paraît le plus enclin à soutenir Washington, qui lui a apporté une aide décisive pour venir à bout de l’Unita de Jonas Savimbi. Les États-Unis sont aujourd’hui le premier investisseur étranger dans ce pays qui leur fournit 17 % de leurs importations de pétrole et auquel ils apportent une aide annuelle de 100 millions de dollars. Lors de son récent séjour à Luanda, Kansteiner a même promis une « rallonge » d’une dizaine de millions, au titre d’une « assistance d’urgence ». Comme pour motiver davantage José Eduardo Dos Santos, que George Bush a eu au téléphone le 13 février. À l’inverse, les relations entre Paris et Luanda sont notoirement délicates depuis le scandale dit de l’« Angolagate ». L’absence de Dos Santos au récent Sommet Afrique-France en est l’illustration.
Le Cameroun, en revanche, est l’un des plus sûrs alliés de la France en Afrique subsaharienne. Depuis 1974, les deux pays sont liés par des accords de défense dans le cadre desquels, en 2002, Paris a fourni à l’armée camerounaise trente-six coopérants militaires et 8 millions d’euros d’assistance. Le président Paul Biya s’est entretenu par téléphone avec Jacques Chirac, avant de participer au Sommet de Paris. Il est par ailleurs en contact régulier avec Dominique de Villepin. Les applaudissements de la délégation camerounaise après le discours de ce dernier devant le Conseil de sécurité, le 14 février, ne sont évidemment pas passés inaperçus. Les États-Unis n’ont pourtant pas tiré un trait sur la voix camerounaise. À Yaoundé, Kansteiner devait d’ailleurs remettre à Biya un message personnel de George W. Bush. Les intérêts américains dans le pétrole camerounais et le pipeline Doba-Kribi sont également à prendre en considération.
La Guinée est le pays dont le vote est le plus incertain. Colin Powell et Condoleezza Rice ont approché Mamady Traoré, son représentant aux Nations unies, et téléphoné à deux reprises à François Lonsény Fall, son ministre des Affaires étrangères. La baronne Valerie Amos, sous-secrétaire d’État britannique aux Affaires étrangères et au Commonwealth, est pour sa part attendue à Conakry le 22 février. De septembre 2000 à août 2001, Washington a fourni des armes à Conakry pour l’aider à repousser des attaques rebelles sur ses frontières méridionales, et l’armée américaine a dispensé (jusqu’en novembre 2002) une formation à près d’un millier de rangers guinéens.
La France est en revanche en froid avec la Guinée depuis l’affaire Alpha Condé et les élections contestées qui ont suivi. Mais elle reste son premier partenaire, avec plus de 220 millions d’euros par an d’aide publique au développement. Reste à déterminer la position du président Lansana Conté, dont l’état de santé est, comme l’on sait, préoccupant. Peu réceptif aux pressions extérieures, le chef de l’État ne s’embarrasse généralement pas de savants calculs avant de prendre une décision. Il réagit plus volontiers au feeling. Or tous les témoignages s’accordent sur un point : de sa retraite, il ne cesse de proclamer son opposition à la guerre.

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