George W. Bush fragilisé

Sa popularité aux États-Unis est en forte baisse. Motif de ce revirement : la situation économique…

Publié le 25 mars 2003 Lecture : 3 minutes.

Au moment où président le George W. Bush lançait son ultimatum à Saddam Hussein, le 17 mars, sa popularité dans l’opinion américaine était retombée à son niveau du 10 septembre 2001, à la veille des attentats. Il est devenu vulnérable. S’il ne redresse pas la barre, sa réélection n’est pas assurée en 2004.
Il faut, cependant, voir les choses de plus près. Ce n’est pas parce qu’ils considèrent Bush comme un dangereux va-t-en-guerre que les Américains lui ont retiré leur confiance, bien au contraire. Un sondage New York Times-CBS News réalisé entre le 7 et le 9 mars constatait que 55 % d’entre eux étaient favorables à une invasion de l’Irak, avec ou sans l’accord des Nations unies. Le 19 mars, dans les dernières heures de l’ultimatum, on estimait à 70 % le pourcentage des opinions favorables.
En revanche, un sondage Ipsos-Reid réalisé entre le 4 et le 6 mars faisait apparaître que si l’élection présidentielle avait lieu aujourd’hui, 38 % seulement des électeurs voteraient Bush, et 37 % pour un autre candidat, quel qu’il soit. Il y a un an, Bush disposait de 54 % d’intentions de vote favorables, face à 20 % d’intentions de vote défavorables.
Son action en tant que président ne recueille plus aujourd’hui qu’un peu plus de 50 % d’opinions favorables, alors que, jusqu’à la fin de l’année dernière, près des deux tiers des Américains l’approuvaient.
Motif de ce revirement : la situation économique. Le Dow Jones – l’indice des valeurs boursières – est au plus bas, le chômage augmente et le revenu national plafonne. Au premier trimestre 2002, 66 % des Américains, en moyenne, approuvaient la politique économique de Bush, et 32 % la désapprouvaient. Selon le sondage Ipsos-Reid du 4 au 6 mars, 51 % la jugent mauvaise, et 43 % seulement bonne.
La vulnérabilité du président est confirmée par une analyse plus fine des réponses. Ainsi, 73 % des républicains interrogés dans le sondage du New York Times ont indiqué qu’ils étaient favorables à une invasion de l’Irak, même sans l’accord de l’ONU, mais 42 % seulement de démocrates. D’où un regain de combativité chez ces derniers. Leurs parlementaires ont voté, en 2002, la résolution du Congrès autorisant le recours à la force en Irak : ils étaient donc, jusqu’ici, tenus à la discrétion. Mais les revers diplomatiques accumulés par l’administration Bush, ces derniers mois – non seulement à l’ONU, mais aussi à l’Otan, face à la Turquie, à l’Union européenne, à la Corée du Nord – leur donnent désormais droit à la parole. Bush n’a pas su se forger une stature d’homme d’État capable de faire régner l’ordre dans le monde. Ils peuvent donc l’attaquer sans avoir l’air de se montrer trop indulgents pour Saddam ou de porter atteinte au moral des troupes.
La guerre peut-elle redorer le blason du président ? Ici, la comparaison avec Bush père est inévitable. L’opération Tempête du désert, lors de la guerre du Golfe de 1991, avait été un triomphe militaire : elle n’avait pas empêché, en 1992, l’élection de Bill Clinton – « l’économie, vous dis-je », dixit celui-ci. Il n’est pas certain que pour Bush II tout se passera aussi bien. Si le succès n’est pas triomphal, si la victoire se fait attendre, s’il y a trop de victimes américaines, le grand élan patriotique actuel risque de se perdre dans les vents de sable. Et, même si tout est bouclé militairement en un tournemain, il y aura l’après-Saddam, forcément coûteux.
La guerre de 1991 avait été soutenue par l’opinion mondiale et financée par les alliés. Pour celle-ci, et pour la reconstruction, dont le coût est estimé entre 15 milliards et 20 milliards de dollars par an sur cinq ans, le contribuable américain devra mettre la main à la poche. Ce n’est pas demain que le pétrole irakien financera le nation-building. Tout cela ne facilitera pas le vote, au Congrès, des 674 milliards de dollars du plan de relance du 7 janvier. Pour gagner une réélection, disent les politologues, on n’a pas besoin d’une économie florissante, simplement d’une économie qui repart. Tout à sa guerre, Bush II paraît l’oublier.
Et que deviendra son image si l’Irak « libre » ne répond pas à ses espérances ? Si les Turcs vont un peu trop loin et si les Kurdes n’apprécient pas ? Si les chiites rappellent un peu trop fort aux sunnites au pouvoir qu’ils représentent 60 % de la population arabe, et eux seulement 20 % ?

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