De la musique aux affaires

Maison de production, immobilier, presse… la star Youssous Ndour investit dans de multiples secteurs et se retrouve à la tête d’un véritable empire financier.

Publié le 25 février 2003 Lecture : 3 minutes.

«Tout ce que je veux, c’est rendre aux Sénégalais ce qu’ils m’ont donné, en réinvestissant dans mon pays l’argent que je gagne. J’aurais pu me contenter, comme d’autres, de dépenser cet argent avec ma famille. Qu’on me laisse travailler ! » Youssou Ndour n’est pas, mais alors, pas du tout content. C’est qu’il a comme l’impression de faire aujourd’hui l’objet d’un complot qui ne dit pas son nom. Lui qui, dit-il, en l’espace de deux décennies, a réussi à bâtir une fortune à la sueur de son front et fait travailler près de deux cents personnes au Sénégal ! Car, outre les royalties que lui ont apportées ses plus de cent cinquante titres, ses multiples albums et autres disques d’or, il a mis sur pied un véritable empire financier. Cela a commencé en 1986 avec la création de la Société africaine de promotion musicale (Saprom), qui, à l’origine, devait s’occuper plutôt de location de matériel de sonorisation musicale.
Quelques années plus tard, l’artiste acquiert un studio d’enregistrement qu’il modernise et rebaptise Xippi, « l’éveil » en wolof. L’ouvrage, qui a coûté près de 70 millions de F CFA, est inauguré le 8 octobre 1991. Youssou y produit des musiciens sénégalais qui n’ont pas les moyens d’aller faire enregistrer leurs albums à l’étranger. Mais bientôt, ce studio, doté de vingt-quatre pistes, ne répond plus aux ambitions de l’artiste, qui, de plus, rêve de faire enregistrer à Dakar les plus grands noms de la musique mondiale. En 1995, il décide donc de construire un second studio, pour un coût de plusieurs centaines de millions de francs CFA. Xippi 2 sera équipé par la suite d’une unité de production audiovisuelle.
Dans la foulée, en 1996, Youssou lance le label Jololi pour en faire la principale maison de disques au Sénégal et s’ouvre sur le marché international en signant des contrats avec Real World, World Circuit, DeLabel, Virgin… But de l’opération : faire connaître à l’extérieur des musiciens sénégalais comme Ndiaga MBaye, Ablaye MBaye, Kiné Lam…
Au même moment, Youssou investit aussi dans la presse : il acquiert les 33 % (soit 214 millions de F CFA) des actions du groupe Com 7, une structure dotée d’une radio (7 FM) et de deux quotidiens people, Info 7 et Le Populaire, en plus d’une imprimerie. Le chanteur déclare aujourd’hui avoir vendu ses actions de Com 7 pour aller fonder, en mai 2002, son propre groupe de presse Futur Médias, propriétaire de la radio sportive Sport FM. Bref, avant d’être mis sur la sellette bien malgré lui, Youssou avait acquis une réputation de capitaine d’industrie touchant à tout, depuis l’informatique (un projet mené en collaboration avec Hewlett-Packard pour vulgariser l’usage de l’ordinateur en milieu rural) jusqu’à l’immobilier. L’artiste a fait construire à Dakar un bel immeuble de quatre étages mis en location, sur la Corniche, non loin de sa maison natale, à la Médina. Youssou a aussi, dans les années quatre-vingt-dix, racheté puis modernisé le Thiossane, un vieux dancing situé dans le quartier populaire de Grand-Dakar, où il se produit les week-ends. Quelques jours à peine après le naufrage du bateau Joola, le 26 septembre 2002, l’artiste a décidé de fermer sa discothèque, pour cause de normes de sécurité insuffisantes. Il a fait savoir qu’il ne comptait pas la rouvrir « tant que les services compétents de l’État » ne lui auront pas donné leur feu vert. D’ici là, le chanteur, qui affirmait il y a encore quelques années gagner plusieurs centaines de millions de francs CFA par an, est aussi celui qui déclare avoir investi (pratiquement) tout son argent au Sénégal, soit « des milliards de francs CFA ». Serait-ce pour cela qu’on lui cherche palabres ?

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