Afrique : selon la Cnuced, les investissements étrangers en hausse sur le continent

Selon le World Investment Report, publié mercredi 12 juin par la Cnuced, les Zones économiques spéciales sont un levier important pour attirer les investisseurs.

Mukhisa Kituyi, secrétaire général de la Cnuced, le 22 octobre 2018 à Genève. © Salvatore Di Nolfi/AP/SIPA

Mukhisa Kituyi, secrétaire général de la Cnuced, le 22 octobre 2018 à Genève. © Salvatore Di Nolfi/AP/SIPA

Publié le 12 juin 2019 Lecture : 4 minutes.

C’est une bonne surprise : alors que les investissements mondiaux sont en baisse pour la troisième année consécutive (- 13% selon le World Investment Report, publié ce 12 juin par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement), l’Afrique échappe à cette tendance générale : les investissements directs étrangers y grimpent au contraire de près de 11 %, même s’ils continuent à représenter une infime part des flux financiers mondiaux (3,5 %).

D’après le rapport, « cette augmentation s’explique par la progression de la demande et, par voie de conséquence, du prix de certains produits de base. Dans un certain nombre de pays, la croissance des investissements n’est pas liée aux ressources naturelles », ajoutent les experts. La situation est très différente selon les économies.

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En Égypte, qui occupe le haut du tableau et reste le premier destinataire d’IDE avec 6,8 milliards de dollars, malgré un repli de 8 %, ce sont principalement les secteurs du gaz et de l’industrie qui attirent les investisseurs.

>>> À LIRE : Les investissements directs étrangers vers l’Afrique ont atteint 59 milliards de dollars en 2016, selon la Cnuced

Au Maroc, les IDE s’élèvent à 3,6 milliards de dollars (bondissant de 35,5 % par rapport à l’an dernier). Les intérêts y sont dirigés vers des secteurs plus variés : finance, énergie renouvelables, infrastructures et automobile.

L’Afrique de l’Ouest, et surtout le Nigeria, en recul

Ailleurs sur le continent, les pays dont les économies sont les plus diversifiées affichent de bonnes performances, à l’image du Kenya (+ 27 %). Si l’enveloppe baisse en Éthiopie (- 18 %), le pays se place tout de même parmi les plus attractifs du continent, avec 3,3 milliards de dollars.

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En Afrique subsaharienne, les variations sont souvent à deux chiffres. En cause, les secteurs énergétiques et miniers, dans lesquels les montants investis sont traditionnellement importants.

Le Nigeria pâtit des incertitudes liées aux élections ainsi que des conflits entre le gouvernement et des multinationales, observent les auteurs du rapport. Avec des investissements en baisse de 43 % (à 2 milliards de dollars), il fait ainsi reculer l’Afrique de l’Ouest (- 15 %).

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Le moteur des zones économiques spéciales

Focus de ce rapport 2018 : les zones économiques spéciales (ZES), identifiées comme un facteur de croissance des investissements étrangers. On en dénombre 237 en Afrique, où elles sont présentes dans 38 pays.

« Bien que l’objectif de ces zones sur le continent, surtout en Afrique subsaharienne, soit d’améliorer le secteur manufacturier et les exportations dans les industries où la main-d’œuvre est peu qualifiée, comme le textile et le prêt-à-porter, certains pays ciblent des secteurs diversifiés avec plus de valeur ajoutée », note le rapport, qui donne l’exemple du Maroc (high-tech, automobile), du Sénégal ou encore du Rwanda.

>>> À LIRE : Les zones économiques spéciales peuvent-elles transformer l’Afrique ?

Le potentiel des zones économique régionales est aussi signalé par les experts, comme celle initiée en 2018 dans le triangle constitué par les villes de Sikasso (Mali), Bobo-Dioulasso (Burkina Faso) et Korhogo (Côte d’Ivoire).

Des bénéfices « jamais automatiques »

Les tensions sécuritaires, croissantes dans la région, sont un frein pour les investisseurs. Mais selon Alexandre Dabbou, économiste à la division des investissements et des entreprises de la Cnuced, « les ZES, de plus en plus nombreuses, sont intéressantes en termes de croissance, d’emploi, de diversification des exportations et de réalisation des objectifs de développement durable, sans compter les retombées indirectes. Mais attention, les bénéfices ne sont jamais automatiques. Un des avantages est le partage d’infrastructures coûteuses à mettre en place pour les pays en voie de développement. Bien sûr, dans certaines régions il y a des questions de sécurité, mais cela peut être aussi un laboratoire qui facilite les choses en terme de climat des affaires, d’attractivité et de gouvernance. »

L’entrée en vigueur prochaine de la Zone de libre-échange continentale (Zlec) va encore renforcer la coopération entre les pays africains, estime Mukhisa Kituyi, secrétaire général de la Cnuced : « Conjugué à des prévisions de croissance optimistes, c’est de bon augure pour les entrées d’IDE sur le continent. »

Des flux Sud-Sud en hausse

Les principaux pourvoyeurs d’IDE sur le continent restent les pays européens, notamment la France (64 milliards de dollars), suivie de près par les Pays-Bas, avant les États-Unis (en repli à 50 milliards de dollars), la Chine étant en cinquième position.

Les flux Sud-Sud, et notamment les chiffres des investissements intracontinentaux, sont absents du rapport. Pourtant, l’acquisition des 53 % restant de Saham (Maroc) par l’assureur sud-africain Sanlam constitue un deal non négligeable (1 milliard de dollars). L’Afrique du Sud se classe d’ailleurs juste derrière l’Italie avec 27 milliards de dollars d’investissements (stocks) dans les autres pays d’Afrique.

« Les flux Sud-Sud sont en hausse. C’est une perspective intéressante, notamment avec la zone de libre-échange qui favorisera les investissements de l’extérieur du continent, mais aussi entre les pays africains, commente Alex Dabbour. Ces flux ont une certaine valeur ajoutée : il est plus facile d’intégrer les investissements entre économies similaires. »

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