Ce qu’en pense Bush senior

Publié le 25 mars 2003 Lecture : 2 minutes.

Il a été président des États-Unis, il a mené, en 1991, une guerre victorieuse contre l’Irak à la tête d’une large coalition internationale et avec l’accord des Nations unies. Son fils est aujourd’hui à la Maison Blanche et vient de s’engager dans une nouvelle guerre, unilatérale cette fois, contre Saddam Hussein. Jamais, tout au long des préparatifs militaires qui ont duré des mois ou pendant plusieurs semaines de grandes manoeuvres diplomatiques, on n’a entendu George Bush I dire ce qu’il pensait de la politique moyen-orientale de George Bush II. Interviewé sur la chaîne de télévision ABC avant les premiers bombardements, l’ex-président a déclaré qu’il « soutenait totalement » son fils et qu’il l’approuvait « sans réserve ».
On peut imaginer, cependant, qu’en tenant ces propos, il faisait la restriction mentale recommandée jadis par les jésuites. D’abord, parce que, dans cette même interview, il ajoutait un peu plus tard : « Il vaut mieux rester dans les coulisses, vous savez… Il y a des tas de critiques comme il y a des tas de gens qui approuvent bruyamment. »
Ensuite, parce que, le 26 février, au cours d’une conférence sur le Moyen-Orient à l’université Tufts, dans le Massachusetts, il avait tenu d’autres propos qui ressemblent davantage à ce qu’on sait de lui : « La conférence de Madrid [sur la paix au Moyen-Orient] n’aurait jamais eu lieu si la coalition internationale qui s’est battue dans l’opération Tempête du désert avait outrepassé le mandat de l’ONU, si les États-Unis avaient repris les choses à leur compte, poussé jusqu’à Bagdad et contraint Saddam Hussein à se rendre et à désarmer. La coalition aurait instantanément éclaté. Et le capital politique que nous avions constitué aurait été perdu… […] Grâce à cette conférence de Madrid, nous avons eu ensuite cette poignée de main historique sur la pelouse de la Maison Blanche entre Rabin et Arafat, et les accords d’Oslo… » Les accords d’Oslo ont été, depuis, enterrés, mais on est loin, ici, de l’évocation fugitive et conditionnelle d’un État palestinien faite par George Bush II.
Quant à ce qu’on pense, dans l’entourage du père, du mépris pour l’ONU affiché par le fils, on peut en avoir une idée par ces propos d’un ancien conseiller rapportés par le Financial Times : « Je n’ai pas l’impression que cette administration se rende compte des dégâts qu’elle a causés. Il se pourrait fort qu’on n’arrive pas à les réparer et à remettre sur pied le monde que nous avions hérité de la guerre froide. » Bush senior avait reconnu à l’université Tufts qu’il y a des « divergences avec les Européens », mais ajouté qu’il y a toujours des moyens de les « surmonter ».
Une autre personnalité citée par le Financial Times souligne à quel point Bush senior, « multilatéraliste dans l’âme » après une longue carrière diplomatique entamée dans les couloirs de l’ONU, est différent de son unilatéraliste de fils, « manipulable comme son père ne l’a jamais été » et « bourré de certitudes de néochrétien ». Il est plus facile d’avoir des certitudes, conclut le FT, « quand vous n’y connaissez rien ». On pourrait aussi citer Karl Marx : « Hegel fait quelque part cette remarque que tous les grands événements et personnages se répètent pour ainsi dire deux fois. Il a oublié d’ajouter : la première fois comme tragédie, la seconde fois comme farce. »

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