Rabat et Salé, réconciliation capitale

Depuis 2005, un vaste plan d’urbanisme a métamorphosé les rives du fleuve qui sépare Rabat et Salé, au Maroc. Un chantier qui vise à résorber les fractures géographiques, mais aussi sociales.

Le pont Hassan II a été inauguré en 2011. Long de 1,2km, il comporte un tablier pour les voitures et un autre pour le tramway et les piétons. © Hassan Ouazzani pour J.A.

Le pont Hassan II a été inauguré en 2011. Long de 1,2km, il comporte un tablier pour les voitures et un autre pour le tramway et les piétons. © Hassan Ouazzani pour J.A.

Publié le 1 août 2014 Lecture : 3 minutes.

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Depuis son promontoire, la casbah de Rabat semble regarder avec condescendance les remparts de Salé, sa soeur de lait roturière qui lui fait face. Entre l’aristocratique capitale du royaume et l’ancien nid de corsaires, le fleuve Bouregreg et son embouchure étaient encore il y a quelques années une déchirure polluée, difficile à franchir, grignotée par les constructions sauvages et corsetée, côté Rabat, par une ceinture autoroutière.

Difficile alors d’imaginer les agréables promenades et les ensembles immobiliers harmonieux qui bordent aujourd’hui un fleuve rendu à la nature. Celui-ci a été désensablé et, avec sa marina flambant neuve, Salé la populaire se prend à rêver de yachts et de milliardaires. Si l’on peut toujours traverser en barque le bras d’eau réhabilité, un tramway dernier cri court maintenant sur le pont Hassan-II, inauguré en 2011. Le 10 janvier 2014, c’était au tour du pont Moulay-Youssef d’être ouvert à la circulation. D’ancienne frontière, l’embouchure du Bouregreg est ainsi devenue le trait d’union qui réconcilie les deux soeurs pour leur offrir un avenir commun.

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Ancienne frontière, l’embouchure du Bouregreg est devenue un trait d’union entre les deux cités.

Convergence

Véritablement lancé en 2005, le projet d’aménagement du Bouregreg affiche l’ambition, sur 6 000 hectares, de « restituer aux citadins des deux rives un espace commun, aménagé pour être un lieu de convergence ».

Neuf ans plus tard, l’agglomération Rabat-Salé-Témara est l’un des meilleurs exemples de développement urbain durable du continent. Et les réalisations vont se poursuivre avec la construction d’un port sur l’Atlantique, d’une autre marina, d’un grand théâtre de 2 000 places, de musées, d’un hôpital, d’ensembles de logements, de commerces, etc.

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En mai dernier, le plan de la ville pour 2014-2018 a été lancé par le roi Mohammed VI. Investissement prévu pour l’ensemble de l’agglomération : 18 milliards de dirhams (1,59 milliard d’euros), une somme en nette hausse par rapport au montant investi (7,78 milliards de dirhams) sur la période 2006-2011.

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Pour l’économiste Mekki Zouaoui, grand défenseur de son Salé natal, « le défi majeur est d’infléchir la tendance à la bipolarisation sociale et urbaine. À ce titre, le tramway et les deux rocades prévues qui vont relier les deux villes font fortement progresser l’intégration géographique de Rabat et Salé ».

Patrimoine

En octobre 2013, l’organisation internationale Cités et gouvernements locaux unis (CGLU) avait choisi la capitale marocaine pour accueillir son 4e Sommet des dirigeants locaux et régionaux, qui a rassemblé quelque 3 000 représentants venus du monde entier.

Ayant vocation à moderniser l’agglomération, les programmes mis en oeuvre visent aussi à préserver et à mettre en valeur un patrimoine naturel et culturel remarquable. En 2012, l’Unesco a d’ailleurs inscrit Rabat sur sa liste du Patrimoine mondial.

Mais les défis à relever restent importants, rappelle Mekki Zouaoui : « Le pouvoir d’achat des ménages est environ 40 % plus élevé à Rabat qu’à Salé. Cette fracture, que beaucoup qualifient de bombe sociale à retardement, constitue aujourd’hui le problème majeur de l’agglomération capitale. » Pour y répondre, l’économiste prône l’innovation institutionnelle : « Salé devrait bénéficier des attributs administratifs de la capitale, c’est pourquoi je pense qu’il faudrait unifier les deux villes. Cet acte politique serait la réponse audacieuse à la nécessité d’adapter les limites du territoire administratif de la capitale aux réalités d’aujourd’hui. »

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