Algérie : « Le maintien de Louisa Hanoune en détention est une condamnation préventive »

Le juge d’instruction du tribunal militaire de Blida a décidé mercredi soir du maintien en détention provisoire de la cheffe du Parti des travailleurs (PT) Louisa Hanoune, accusée de « complot » contre l’État. Sa formation dénonce cette décision et alarme sur l’état de santé de la secrétaire générale.

La secrétaire générale du Parti des travailleurs Louisa Hanoune. © AP/SIPA

La secrétaire générale du Parti des travailleurs Louisa Hanoune. © AP/SIPA

Arianna Poletti

Publié le 20 juin 2019 Lecture : 3 minutes.

Accusée de « complot » contre l’État et l’armée dans le cadre de l’affaire impliquant le frère de l’ex-chef de l’État Saïd Bouteflika et les généraux Toufik et Tartag, Louisa Hanoune reste en détention provisoire, où elle se trouve depuis plus de quarante jours. Mercredi 19 juin, la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT) a comparu devant le juge d’instruction du tribunal militaire de Blida. L’audition s’est terminée en fin d’après-midi, lorsque le magistrat a décidé de son maintien en détention. Une décision qui a rapidement suscité des commentaires d’indignation.

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« Tout le monde est conscient que Louisa Hanoune est une prisonnière politique », commente pour Jeune Afrique Ramdane Taazibt, membre dirigeant du Parti des Travailleurs. Jeudi 20 juin, des rassemblements de protestation sont prévus en Algérie et à l’étranger. « Nous avons lancé un appel à l’international pour la libération de Louisa Hanoune. Il y aura des rassemblements devant les ambassades et les consulats algériens d’au moins 70 pays », confirme Ramdane Taazibt – qui, jusqu’à la décision de mercredi, se disait confiant quant à une possible remise en liberté.

Un état de santé préoccupant

Une première demande de libération avait déjà été formulée, mais avait été refusée le 20 mai dernier par le juge d’instruction. Les avocats de la défense prévoient de réitérer une nouvelle demande dimanche 23 juin. Selon Ramdane Taazibt, « le maintien de Louisa en détention préventive est déjà une condamnation provisoire. Pour le pouvoir, elle comploterait pour un changement de régime, alors que c’est ce que réclament des millions d’Algériens. Une dirigeante de parti d’opposition placée en détention provisoire est une menace pour la révolution. »

Pour Ramdane Taazibt, la responsable du PT est victime d’une ‘double injustice’

L’état de santé de Louisa Hanoune inquiète par ailleurs ses proches. Pour notre interlocuteur, la responsable du PT est victime d’une « double injustice ». « Les autorités connaissent son état de santé, et tous les médecins qui lui ont rendu visite sont d’accord pour qu’elle soit prise en charge en dehors du milieu carcéral », explique-t-il – précisant qu’elle souffre de « plusieurs maladies chroniques », et qu’elle a déjà fait des malaises après avoir perdu huit kilos en un peu plus d’un mois de prison.

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« Elle risque beaucoup. Le pouvoir est le seul responsable de ce qui pourrait arriver », prévient Ramdane Taazibt, s’alarmant des conséquences que le maintien en détention pourrait avoir sur la santé de la secrétaire générale. Selon son avocat, Maître Dabouze, la vie de Louisa Hanoune serait même « en danger ».

« Des intimidations envers toute opposition »

Le PT a annoncé sa participation, mercredi 26 juin, à la conférence nationale organisée par sept partis d’opposition, dans l’objectif de s’entendre sur une transition politique. Mais l’ombre de l’arrestation de Louisa Hanoune et de son maintien en détention préventive plane sur cette rencontre. « Tous les partis démocratiques demandent d’une seule voix la libération de notre dirigeante. La question sera certainement évoquée lors de la conférence, car nous avons compris que, derrière cette incarcération, il y a des menaces, des intimidations adressées à tout parti, à toute voix libre, à toute tentative d’opposition », assure encore Ramdane Taazibt.

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Alors que l’opération « mains propres » se poursuit, le pouvoir garde le silence sur la question des détenus politiques. « On ne peut pas appeler au dialogue et en même temps jeter en prison les opposants qui ne sont pas d’accord avec le point de vue du régime », déplore notre source, en rappelant que la libération des prisonniers politiques reste la condition pour la réussite d’une transition vers une nouvelle Algérie. « Nous n’avons eu aucun signe de la part du régime. Mais beaucoup de responsables politiques croient que l’arrestation de Louisa met le pouvoir dans une position inconfortable », continue-t-il.

Mercredi, l’ancienne ministre de la Culture Khalida Toumi, proche de Louisa Hanoune et auteure d’une tribune qui dénonçait le « virage dangereux » du régime à la suite de son arrestation, a par ailleurs été convoquée par la justice dans le cadre d’une affaire de surfacturation liée à une manifestation culturelle.

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