Le baromètre de la liberté

Publié le 22 octobre 2007 Lecture : 3 minutes.

Le dernier « classement mondial de la liberté de la presse » que publie chaque année depuis 2002 l’ONG française Reporters sans frontières (RSF) réserve, comme d’habitude, quelques surprises. Et fait apparaître de considérables disparités entre les 168 pays étudiés.
Même si les quatorze premiers au palmarès sont européens, aucun continent n’est épargné par la censure et/ou les exactions à l’encontre des professionnels des médias. Les vingt pays les plus mal classés sont situés en Asie (Pakistan, Sri Lanka, Laos, Vietnam, Chine, Birmanie, Corée du Nord), en Afrique (Éthiopie, Libye, Somalie, Érythrée), dans l’ex-Union soviétique (Bélarus, Ouzbékistan, Turkménistan) ?et en Amérique (Cuba).

Le pays qui se soucie le moins de la liberté de la presse n’est autre que l’Érythrée. « Ce pays mérite sa dernière place, commente RSF. La presse privée a été bannie par l’autoritaire Issayas Afewerki et les rares journalistes qui ont osé critiquer le régime ont été jetés au bagne. Nous savons que quatre d’entre eux sont morts en prison et nous avons toutes les raisons de croire que d’autres vont suivre. » 166e en 2006, l’Érythrée a donc été dépassée cette année par ses suivants immédiats : ?le Turkménistan et la Corée du Nord.
L’ONG se montre particulièrement préoccupée par les récents événements en Birmanie (164e), où, écrit-elle, « les journalistes continuent à travailler sous le joug d’une censure implacable à laquelle rien n’échappe, pas même les petites annonces. » Elle regrette que la Chine (163e) continue de stagner dans les profondeurs de ce classement. « À moins d’un an des J.O. de Pékin, les réformes et les libérations de journalistes tant de fois promises par les autorités ne semblent plus qu’une vaine illusion », estime-t-elle.
Un an après l’assassinat d’Anna Politkovskaïa, la Russie pointe quant à elle à une peu reluisante 144e place. Moralité : le respect de liberté de la presse n’a pas de lien direct avec le développement économique d’un pays. Le classement des membres du G8 – les huit pays les plus industrialisés – en apporte la confirmation. La France (31e) remonte de six places par rapport à l’année dernière, mais les États-Unis ne sont que 48e. La première puissance mondiale pâtit du maintien en détention, depuis le 13 juin 2002, sur la base militaire de Guantánamo – et sans l’ombre d’une charge -, de Sami Al-Haj, le cameraman soudanais d’Al-Jazira. Et de l’assassinat à Oakland, en août dernier, du journaliste noir américain Chauncey Bailey.
En revanche, les prospères pays d’Europe du Nord trustent les premières places du classement : Islande (1re), Norvège (2e), Belgique (5e), Finlande (6e), Suède (7e), Danemark (8e), Irlande (9e) Pourtant, tout n’est pas rose sur le Vieux Continent, y compris au sein de l’Union européenne, où la Bulgarie et la Pologne font figure de mauvais élèves. ?« À Sofia, révèle RSF, les journalistes peuvent être pris à partie physiquement pour leur travail. » De même, « depuis l’arrivée au pouvoir de Lech Kaczynski, en octobre 2005, puis de son frère Jaroslaw, quelques mois plus tard, les poursuites contre la presse polonaise se sont multipliées. »

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Quant à l’Afrique, elle n’est plus le théâtre de violations systématiques des droits des journalistes. Sept pays du continent sont même plutôt bien classés : Maurice (25e), Namibie (26e), Ghana (29e), Afrique du Sud (43e), Cap-Vert (45e), Togo (49e) et Mauritanie (50e). L’irruption de ces deux derniers pays parmi les démocraties au-dessus de tout soupçon, ou presque, n’a rien de fortuit. Le Togo respire depuis la mort, en février 2005, de Gnassingbé Eyadéma et l’arrivée de Faure, son fils, à la tête de l’État. De même que la Mauritanie, depuis le renversement, le 3 août 2005, de Maaouiya Ould Taya.
En revanche, regrette RSF, « des pays qui, traditionnellement, figuraient en bonne position ont sensiblement reculé. C’est le cas du Bénin (53e) et du Mali (52e). Pour la première fois depuis plusieurs années, des journalistes ont été emprisonnés dans ces deux États africains après avoir été reconnus coupables de diffamation ou d’offense au chef de l’État. »

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