Les candidats passés au crible

Publié le 24 octobre 2006 Lecture : 14 minutes.

Personnalités
Kabila – Arrivé au pouvoir au lendemain de l’assassinat de son père, le 26 janvier 2001, Joseph Kabila est devenu, à 29 ans, le plus jeune chef d’État du monde. Dans un pays dévasté par la guerre, occupé par des forces étrangères et dépecé pour ses ressources naturelles, cette jeunesse avait de quoi inquiéter. Depuis, « le petit » a bien grandi. « On dit beaucoup de choses sur le président, mais il décide seul et n’est pas prisonnier de son entourage », affirme son directeur de cabinet, Léonard She Okitundu. De fait, ceux qui croyaient pouvoir le manipuler en ont été pour leurs frais. Quant aux gardiens de l’héritage du « Mzee », seul Abdoulaye Yérodia Ndombasi a survécu en devenant, en juin 2003, l’un des quatre vice-présidents de transition. « L’homme donne parfois l’apparence d’une construction, mais il a des convictions et a finalement bien mené sa barque », analyse un diplomate. Un rapide apprentissage militaire aux côtés des troupes rwandaises durant les premières années du pouvoir paternel, un poste de chef d’état-major aux pires heures de la guerre en 1998 lorsque Kinshasa a décidé de bouter « les envahisseurs », Joseph Kabila apprend vite, mais en silence.
Entouré des siens, parmi lesquels figurent en très bonne place les membres de sa famille – « Maman Sifa », sa sur jumelle Jaynet, son frère cadet Joël, son épouse Olive et sa jeune fille Sifa -, le président a cultivé son jardin secret. Loin de la faconde désinvolte du père, le fils se coltine les dossiers même si son agenda réserve du temps pour son loisir favori : la moto. À la tête d’un gouvernement d’union nationale pléthorique réunissant les belligérants d’hier, il a su préserver l’essentiel : l’équilibre du pouvoir afin d’éviter au pays un nouveau plongeon dans le chaos. Les joutes électorales et les effets de tribune ne sont pas son fort, mais il a respecté le rendez-vous des législatives et celui du scrutin présidentiel.
« C’est sans doute ma principale vertu, affirme-t-il pour expliquer cette détermination, savoir ce que l’on veut. S’en donner les moyens, ne pas dévier et aller jusqu’au bout. » En ligne de mire, devenir un chef d’État élu.

Bemba – Longtemps, ses manières ont déplu. Trop impulsif. Le coup de gueule trop facile, avec ses collaborateurs comme avec les journalistes. Beaucoup de gens le prenaient pour un énergumène. Mais petit à petit, un autre Bemba est apparu. Plus réfléchi. Bon stratège.
Jean-Pierre Bemba est un fils à papa. Son père, Jeannot Bemba, a été l’un des trois ou quatre milliardaires de l’époque Mobutu. Une compagnie aérienne et de l’import-export. Sa mère est morte jeune. Il lui voue un culte. Il est très attaché à ses surs cadettes, notamment à Cathy.
Après de bonnes études à l’Institut catholique des hautes études commerciales de Bruxelles, il rejoint son père à Kinshasa et se lance dans la téléphonie mobile. Les affaires marchent. Les portes du clan Mobutu s’ouvrent. Entre le vieux maréchal et le gosse intelligent, le courant passe. Mobutu regrette que ses enfants aient négligé leurs études. À la fin de son règne, il fait de Bemba junior l’un de ses hommes de confiance. Il lui confie même des missions à l’étranger. Le jeune Bemba a eu la bonne idée de passer un brevet de pilote pour Boeing 727.
Signe de l’intimité entre les deux familles, Cathy, la petite sur de Jean-Pierre, épouse Nzanga Mobutu avec la bénédiction de Bobi Ladawa, mère de Nzanga et dernière épouse du maréchal. De son côté, le jeune Bemba épouse Lilia, une métisse de père brésilien et de mère kasaïenne. Elle lui donnera cinq enfants, dont deux jumelles. C’est l’époque de la jeunesse dorée. Passe-temps préférés de ce « gosse de riches » : l’avion, les cabriolets, la moto et la plongée sous-marine à Faro, une station balnéaire au sud du Portugal.
Bemba héritier de Mobutu ? Pas si simple. Certes, il est de la province de l’Équateur, comme son mentor. Il a du bagout, comme lui. Sur un plateau de télévision ou dans un stade, il n’a pas son pareil pour capter l’attention avec une formule cinglante ou une anecdote qui fait mouche. En lingala comme en français. C’est un séducteur. Mais l’homme n’est pas un soldat de métier. C’est un civil qui a fait le coup de feu par opportunisme. Mobutu ne supportait pas la contradiction. Il faisait torturer à mort un Pierre Mulele ou jeter en prison un Étienne Tshisekedi. Jean-Pierre Bemba semble se nourrir de la contradiction. Il n’est jamais aussi à l’aise que dans la joute verbale. C’est pourquoi il attend avec impatience ce débat d’entre-deux tours que prévoit le code électoral. « Chez Bemba, tout est dans le bec », dit une de ses vieilles connaissances.

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Équipes
Kabila – Si les fidèles de la première heure sont toujours aux côtés du chef de l’État, l’onction du suffrage universel impliquera nécessairement des changements en cas de victoire. « Les circonstances de son accession au pouvoir, en 2001, ont conduit à la mise en place d’une équipe resserrée à la présidence. Mais s’il passe de la légitimité familiale, voire clanique, à celle des urnes, Kabila sera dans l’obligation d’ouvrir les portes du Palais de la nation. Avec un risque : se fâcher avec sa garde rapprochée », analyse un observateur. « Il y aura une restructuration dans l’entourage présidentiel », promet She Okitundu. « Joseph Kabila n’est pas dans une démarche solitaire. Il a voulu l’Alliance de la majorité présidentielle [AMP] et poursuivra cette ouverture en fonction des compétences, des convictions et des origines géographiques de chacun. Le poids électoral des différents partenaires sera évidemment pris en compte. »
Selon l’accord passé avec l’opposant historique, Antoine Gizenga, arrivé troisième au premier tour de la présidentielle avec 13,06 % des voix et qui dispose de 34 sièges à l’Assemblée nationale, le poste de Premier ministre est promis au Parti lumumbiste unifié (Palu). Il faudra aussi réserver des places de choix à l’Union des démocrates congolais (Udemo) du ?« fils » François-Joseph Nzanga Mobutu, qui a appelé à voter Kabila. Dans son escarcelle, 4,7 % des suffrages et 9 députés. « Avec 111 députés sur 500, nous restons malgré tout la première force de l’AMP, qui détient la majorité absolue », tient à rappeler le secrétaire général de la formation présidentielle, le Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD), Vital Kamehre. « L’attaquant de base et de pointe » de l’équipe Kabila a parcouru l’ensemble du pays entre juin et juillet en misant sur une victoire dès le premier tour. Si la logique de rassemblement actuellement à l’uvre le fragilise, il compte bien néanmoins rester la clé de voûte de l’édifice présidentiel. Quoi qu’il en soit, seul le verdict des urnes conditionnera les derniers arbitrages pour « un accord gagnant-gagnant ».

Bemba – Après les défections d’Olivier Kamitatu et d’Alexis Tambwe Mwamba, l’équipe Bemba s’est resserrée autour de cinq hommes. Cinq fidèles : François Mwamba, secrétaire général du Mouvement de libération du Congo (MLC), un juriste formé à Sciences-Po Paris ; Delly Sesanga, porte-parole du Renaco (Regroupement des nationalistes congolais) et ex-directeur du cabinet Bemba ; Thomas Luhaka, l’homme qui a succédé à Kamitatu au perchoir de l’Assemblée, un juriste diplômé à Paris-II ; José Makila, le député de Gemena qui « tient » la province de l’Équateur ; et Fidèle Babala, le bien nommé. Actuel directeur du cabinet Bemba, il a été élu député à Kinshasa.
Quand il faut dire tout haut ce qu’on pense tout bas, Bemba fait donner la jeune garde : Yves Kissombe, Romain Nimy et Jean-Lucien Mbusa. Et quand il faut « ratisser » le plus large possible, Bemba envoie la vieille garde dans les provinces. Même son père, Jeannot, « mouille la chemise ». Il sillonne le Bandundu et l’Équateur. Il est loin ce jour de 1999 où Jeannot Bemba était entré dans un gouvernement de Laurent-Désiré Kabila et avait renié publiquement le fils rebelle
Face à la coalition de choc Kabila-Gizenga-Nzanga, le candidat Bemba s’appuie sur des candidats régionaux. L’ancien Premier ministre Lunda Bululu au Katanga, l’ex-porte-parole maï-maï Anselme Enerunga au Sud-Kivu, Jean Idambituo en Province orientale, les anciens candidats Joseph Olengha Nkoy au Kasaï et Mboso Nkodia au Bandundu, enfin le démocrate-chrétien Anatole Matusila et Justine Kasavubu au Bas-Congo. Le challengeur de Joseph Kabila essaie également de couper l’herbe sous le pied à son beau-frère Nzanga Mobutu. In extremis, il vient d’obtenir le ralliement de l’ancien Premier ministre Kengo Wa Dondo, un baron du mobutisme. L’héritière du parti-État MPR Catherine Nzuzi Wa Mbombo est aussi dans son camp. Enfin, le vice-président ne désespère pas de voir venir à lui quelques lieutenants d’Étienne Tshisekedi qui sauront convaincre la base UDPS de renoncer au boycottage et d’aller aux urnes le 29 octobre.

Réseaux
Kabila – Pas de relations particulières avec les Églises évangélistes pourtant très influentes en République démocratique du Congo. Pas de liens avérés avec de riches hommes d’affaires. Peu d’embrassades avec les chefs d’État de la sous-région. Les réseaux de Joseph Kabila sont discrets et obéissent surtout à des critères de confiance. Le plus proche conseiller du chef de l’État est Augustin Katumba Mwanke, surnommé « le Dick Cheney du Congo ». Trésorier de l’AMP, ce natif du Katanga est souvent cité comme ayant des intérêts dans le secteur minier. Élu député dans sa province, il doit quitter le palais. Même chose pour le conseiller spécial à la sécurité, Guillaume Samba Kaputo – un autre Katangais – et le secrétaire particulier du président Kikaya Bin Karubi, adoubé par les électeurs sur ses terres du Maniema. Quant au conseiller militaire, le très écouté Denis Kalume, il est devenu ministre de l’Intérieur lors du remaniement intervenu le 10 octobre, en remplacement de Théophile Mbemba, député à présent dans le Bandundu. Le jeu des chaises musicales ne fait que commencer. « Je reste à la disposition du chef de l’État », précise She Okitundu, qui est resté en marge de la bataille des législatives, mais qui tire une bonne part des ficelles de campagne. Qu’adviendra-t-il par ailleurs du conseiller politique Marcellin Cishambo, de l’ambassadeur itinérant Antoine Ghonda et de l’omniprésent Jean-Claude Masangu, actuel gouverneur de la Banque centrale ? Pour l’instant, le camp présidentiel affiche unité et combativité.
Au-delà des frontières, Joseph Kabila jouit d’une bonne image auprès de la communauté internationale, même si la plupart des capitales étrangères affichent leur neutralité. C’est le cas de Jacques Chirac à Paris et de George Bush. Même ton du côté de la Belgique et au siège de l’ONU. Avec une réserve, Kofi Annan n’a pas du tout apprécié les violents affrontements qui ont suivi l’annonce des résultats du premier tour. Sur le continent, les appuis les plus marqués viennent de Thabo Mbeki en Afrique du Sud, de José Dos Santos en Angola, d’Omar Bongo Ondimba au Gabon et de François Bozizé en Centrafrique.

Bemba – « Je n’ai jamais reçu le moindre soutien des généraux Nzimbi et Baramoto », a dit Jean-Pierre Bemba à Jeune Afrique au plus fort de sa rébellion en 1999. C’est peut-être vrai. Les anciens officiers supérieurs de Mobutu n’ont jamais été vus à ses côtés à Gbadolite. Plus trouble est le rôle de Seti Yale, le tout-puissant conseiller à la sécurité au temps du maréchal. Il possède une villa à Faro, au Portugal. Bemba aussi. Les deux hommes sont proches. Cette année, Joseph Kabila a restitué à Seti Yale sa belle maison de Kinshasa que les services de renseignements avaient réquisitionnée un temps, au bord du fleuve. Bien joué. Aujourd’hui, Seti Yale balance. « Son cur est avec Bemba, et sa raison avec Kabila », dit un de ses amis.
En fait, la vraie connexion Bemba est ailleurs, à l’étranger. Comme Joseph Kabila avec son homologue angolais José Eduardo Dos Santos, Jean-Pierre Bemba entretient une relation privilégiée avec un chef d’État de la région. En 1998, le président ougandais lui a mis le pied à l’étrier. Il a formé et armé ses combattants. Depuis, il ne l’a jamais lâché. Et c’est grâce à Yoweri Museveni que l’ancien chef rebelle est entré en contact avec le colonel Kadhafi. Depuis sa première visite sous la tente en 1999, Bemba est en cour à Tripoli. Au dernier Sommet de la Censad, en juin dernier à Bamako, le numéro un libyen a même essayé de convaincre le président centrafricain François Bozizé de casser la glace avec Bemba. Sans doute Kadhafi cherche-t-il à protéger un « Museveni boy » qui contrôle, dans le nord du Congo, un territoire grand comme la France
Côté francophone, le vice-président congolais est en relation suivie avec les présidents Sassou Nguesso et Bongo Ondimba. Quand il est reçu en audience par ce dernier à Libreville, il ne lui dit pas « bonjour Monsieur le Président », mais « bonjour Papa ». Tout simplement. Depuis l’époque Mobutu, il fréquente aussi Henri Konan Bédié. Peu ou prou, il appartient au « village franco-africain ».
Néanmoins, ses relations avec la France sont en dents de scie. Au début, tout allait bien. En janvier 2000, le ministre français délégué à la Coopération, Charles Josselin, l’a rencontré discrètement en Ouganda. Puis, en janvier 2001, après l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila, Jacques Chirac a été séduit par le nouveau chef de l’État congolais. Paris et son ambassade ont soutenu ouvertement le candidat Kabila. Ce n’est qu’en juillet dernier, au vu des foules que déplaçait le candidat Bemba, que les autorités françaises se sont ravisées. À Kinshasa, l’ambassadeur de France, sur le point de quitter son poste, a dit alors à Bemba : « Tu sais, Jean-Pierre, il est ouvert, ce scrutin. »
Plus prudents, les États-Unis, qui ont un faible pour Joseph Kabila, se sont gardés de montrer ouvertement leur préférence. Cela dit, la secrétaire d’État Condoleezza Rice a rencontré Joseph Kabila à deux reprises le mois dernier à New York, en marge de l’Assemblée générale de l’ONU.

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Programmes
Kabila – « La fin de la guerre, la réconciliation du pays et la tenue d’élections crédibles, tels étaient mes engagements. Chose promise, chose faite », n’a cessé de répéter le chef de l’État avant le premier tour. Avant d’ajouter en faisant allusion à la fragilité de la situation, « celui qui tient des ufs ne se bat pas, car sinon, ils cassent ». « Face aux attaques personnelles mettant en cause les origines congolaises du président, nous avons été trop timides et nous avons négligé l’impact de ce discours populiste, notamment dans l’ouest du pays et à Kinshasa », regrette aujourd’hui le camp présidentiel, qui a promis une campagne pour le second tour « plus agressive ». « Le 29 octobre, les électeurs auront à choisir entre deux styles de gouvernance. Kabila assure l’unité du pays, Bemba incarne les réflexes nostalgiques du mobutisme », explique She Okitundu. « La consolidation de la nation et la restauration de l’État » demeurent l’axe du projet présidentiel, mais, ces derniers jours, l’accent a été mis sur « le développement économique, la lutte contre la pauvreté et l’accès à l’initiative pour les pays pauvres très endettés en 2007 ». En RDC, les trois quarts de la population, estimée à plus de 60 millions d’habitants, vivent avec moins de 2 dollars par jour. « La réunification du pays et l’organisation des élections ont englouti beaucoup d’argent. »

Bemba – Deux thèmes dominent la campagne du vice-président congolais. D’abord, la lutte contre la pauvreté. S’il est élu, l’ancien homme d’affaires promet de mobiliser 7 milliards de dollars d’ici à 2011 pour combattre ce fléau. Par des ressources internes et par un apport des bailleurs de fonds. Priorité à la réforme des régies d’État et à la lutte contre la fraude. Toutes les concessions minières accordées à des compagnies étrangères seront réexaminées.
L’autre thème, c’est « la reconquête du Congo ». Selon le candidat Bemba, la souveraineté du pays est bafouée depuis dix ans. « Sous Mobutu, c’était la gabegie, mais nos frontières étaient respectées », dit-il. Pour les « bembistes », Joseph Kabila est « le candidat de l’étranger ». La preuve, disent-ils, « Paris et Bruxelles ont tout fait pour qu’il soit élu au premier tour ». Beaucoup de partisans de Jean-Pierre Bemba accusent même Joseph Kabila de ne pas être congolais, ni de père ni de mère. En pointillé, le camp Bemba joue sur la « congolité », une variante locale de la xénophobie. Dans un pays où les Tutsis sont traditionnellement les boucs émissaires, c’est un jeu très dangereux.
Si Jean-Pierre Bemba est élu, il s’engage à former un gouvernement d’union nationale qui sera ouvert au PPRD de Joseph Kabila et à l’UDPS d’Étienne Tshisekedi.

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Moyens
Kabila – Par nature, c’est la question la plus délicate lorsqu’il s’agit d’un président sortant qui demande à ses concitoyens d’être reconduit à la magistrature suprême. Profite-t-il des moyens de l’État : un peu, beaucoup ? Difficile à dire. Une chose est sûre, les tournées électorales du premier tour ont été abondamment filmées par les caméras de la télévision nationale (RTNC). Ces déplacements ont par ailleurs exigé une grosse logistique. Un Boeing 727, trois Antonov, un jet et deux hélicoptères avaient été loués à une société privée de droit congolais, Executive Jet Service. Pour quelle somme ? « Cela reste secret, car nos compatriotes pourraient être effrayés par certains montants, mais nous n’utilisons pas les moyens de l’État. Nous avons en revanche des amis et des chefs d’État qui nous aident », expliquait, en juillet, Vital Kamehre. Pour le second tour, le chef de l’État envisage peu de sorties, même s’il observe avec attention l’évolution de l’opinion dans l’Ouest et notamment dans la province du Bas-Congo, où les scores du 30 juillet ont été décevants. Pour l’instant, la date et le lieu du dernier meeting ne sont pas encore fixés. « En fait, nous privilégions une démarche de proximité. Il faut absolument que nous devenions un parti de masse, notamment à Kinshasa, où nous n’avons obtenu que 15 % au premier tour. On ne peut gouverner contre la capitale », explique She Okitundu. Pour cela, tous les députés de l’AMP vont recevoir 2 000 dollars pour porter la bonne parole. « Nous n’avons aucun moyen de contrôle sur l’utilisation de ces fonds, mais nous espérons que l’esprit militant l’emportera », conclut le directeur de cabinet. Quant aux conseillers à la présidence, aux membres du gouvernement et aux dirigeants des entreprises publiques, il leur a été demandé de contribuer à l’effort de campagne à hauteur de 10 % à 15 % de leur salaire. Voilà un joli geste !

Bemba – Jean-Pierre Bemba aurait-il réussi à mettre Joseph Kabila en ballottage s’il n’avait pas fait une campagne à l’américaine ? Sans doute pas. Bon organisateur, il n’a rien laissé au hasard. Quelle somme a-t-il dépensée ? Vingt millions de dollars, dit la presse congolaise. À peine 10 millions de dollars, réplique son entourage. Sans doute moins que son adversaire, dont les frais de campagne sont estimés à 40 millions de dollars par les journaux de Kinshasa.
Il faut dire qu’avant la campagne le vice-président était déjà propriétaire de deux chaînes de télévision et d’une compagnie aérienne. De précieux atouts dans un pays-continent. Bemba a-t-il acheté des avions et des studios de télévision pour faire de l’argent ou pour être élu ? Sans doute les deux. C’est toute l’ambiguïté du personnage. S’il gagne, on sait ce qu’il fera. Mais s’il perd ?

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