Kamikaze, mode d’emploi

L’auteur de l’attentat-suicide du 11 juillet et son commanditaire, l’un et l’autre membres d’al-Qaïda au Maghreb islamique, ont été identifiés.

Publié le 23 juillet 2007 Lecture : 3 minutes.

Comme lors des attentats-suicides du « mercredi noir », comme on appelle ici les attaques kamikazes du 11 avril contre le Palais du gouvernement et la direction régionale de la police judiciaire, les enquêteurs algériens ont très vite identifié l’auteur et le commanditaire de l’opération terroriste du 11 juillet contre une caserne de l’armée à Lakhdaria, qui a provoqué la mort d’une dizaine d’appelés du contingent (voir J.A. n° 2427).
Cette célérité doit beaucoup, bien sûr, à l’expérience accumulée par l’Antiterroriste depuis quinze ans, mais pas seulement. La stratégie de communication d’al-Qaïda au Maghreb islamique, nouvelle appellation du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), lui a singulièrement facilité la tâche. Les prélèvements d’ADN dans le camion piégé utilisé lors de l’attaque n’étaient pas encore achevés que, déjà, al-Qaïda diffusait sur le Net la photo de son « martyr », dont le nom de guerre est Souhaib Abou Malih.

Qui est le kamikaze ?

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Cadet d’une fratrie dont tous les garçons ont fait partie, à un moment ou à un autre, d’un groupe islamique armé, celui-ci se nomme en réalité Mohamed Hafid, il a 20 ans et est né à Legata, dans la wilaya (préfecture) de Bordj Menaïl, en Kabylie. Membre d’une cellule de soutien logistique au GSPC, il a rejoint les maquis islamistes au début de l’année, après qu’Abdelhamid Saadaoui, alias Yahia Abou el-Haïthem, le numéro deux d’al-Qaïda au Maghreb, lui a adressé le message suivant : « La police est à tes trousses, monte au djebel ! » Ancien « émir » de la Zone 2 (centre du pays) du GSPC, Saadaoui occupe désormais au sein de la direction d’al-Qaïda la fonction de mufti. Son « prestige » dans les maquis est considérable…
Il prend sous son aile le jeune Mohamed Hafid et lui confie des tâches aussi peu dangereuses que gratifiantes : organisation de faux barrages routiers ou kidnappings d’hommes d’affaires. Il flatte l’ego de la nouvelle recrue, exalte son courage auprès des maquisards, mais ne souffle mot de son projet d’en faire un kamikaze.

Qui est le commanditaire ?

Saadaoui est un vieux routier du jihad. Lieutenant de Hassan Hattab, il fut, en 1998, au nombre des fondateurs du GSPC. Par la suite, il est parvenu à survivre aux innombrables purges qui jalonnent l’histoire de l’organisation. Recherché depuis 1994, date à laquelle il rejoint les maquis islamistes, il déjoue tous les dispositifs policiers, échappe à tous les ratissages de l’armée. Son insolente baraka (du moins jusqu’à aujourd’hui) se double d’un opportunisme sans faille. En 2003, il a lâché Hattab sans état d’âme quand son étoile a commencé à pâlir. Il s’est alors allié à Nabil Sahraoui, son successeur, avant de faire allégeance, en juillet 2004, à Abou Moussab Abdelwadoud.
À tort ou à raison, Saadaoui passe pour le « cerveau » des attentats du 11 avril. Selon certaines indiscrétions, il serait aussi le commanditaire de celui de Lakhdaria. Quoi qu’il en soit, la décision d’al-Qaïda de recourir aux attaques-suicides coïncide, comme par hasard, avec sa nomination au poste de mufti, qui lui confère le pouvoir d’émettre des fatwas et de procéder à des exégèses théologiques. Ce choix a d’ailleurs suscité de vifs débats dans la mouvance salafiste. Plusieurs chefs de guerre l’ont carrément récusé et l’ont fait savoir à Abdelwadoud. Mais ce dernier l’a soutenu contre vents et marées.

Faut-il s’attendre à d’autres attaques-suicides ?

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Tout incite à répondre par l’affirmative. Même Yazid Zerhouni, le ministre de l’Intérieur, en est apparemment convaincu. Pour au moins deux raisons. D’abord, parce qu’Abdelwadoud reste plus que jamais favorable à cette « technique », en dépit des réticences d’une partie de son état-major. Ensuite, parce que plusieurs aspirants kamikazes ont déjà été identifiés par les services de sécurité. La police scientifique a même procédé à des prélèvements d’ADN au domicile de leurs parents. Au cas

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