Mauritania Airways dans la course aux parts de marché

Huit mois après sa création, la compagnie mauritano-tunisienne doit faire face à un nouveau concurrent sur des liaisons ouest-africaines très convoitées.

Publié le 23 juin 2008 Lecture : 3 minutes.

À l’aéroport de Nouakchott, un Airbus A320 et un ATR 42 portent les drapeaux mauritanien et tunisien à l’arrière de leurs fuselages. Cette double nationalité est le signe distinctif de Mauritania Airways, la compagnie aérienne opérationnelle depuis novembre 2007. « La flotte va s’étoffer avec l’acquisition de deux nouveaux appareils d’ici à l’année prochaine », assure Moncef Badis, le directeur général de la compagnie. Avec deux vols hebdomadaires vers Paris-Orly, des liaisons quotidiennes avec le Sénégal et des connexions vers le Mali et la Côte d’Ivoire, la compagnie tente de faire le lien entre l’Europe et la sous-région. Elle vient d’ouvrir des liaisons intérieures vers Nouadhibou et Zouérate, deux pôles économiques où est installée la Snim, la société nationale qui exploite le minerai de fer.
Créée sur le papier en novembre 2006 après un accord signé entre les ministres tunisien et mauritanien des Transports, Mauritania Airways est détenue à 51 % par la compagnie nationale tunisienne Tunisair, à 39 % par l’entreprise mauritanienne BSA Investment (de l’homme d’affaires Mohamed Bouamatou) et à 10 % par l’État. Elle succède à l’opérateur national, Air Mauritanie, étouffé par une dette colossale (30 millions d’euros pour un capital de 22 millions) et placé en liquidation judiciaire en janvier 2008, laissant 400 salariés sans emploi. Seuls 16 d’entre eux ont pour le moment été embauchés par la nouvelle compagnie, qui emploie 80 personnes dont 19 Tunisiens. Au secrétariat général des Transports, on explique que l’État s’est désengagé du secteur depuis 2000 dans le cadre d’une politique de libéralisation et pour des questions de rentabilité.
En attendant de procéder à de futures embauches, Mauritania Airways cherche à se faire une place dans un ciel ouest-africain déjà très disputé : l’aéroport de Nouakchott, qui accueille 190 000 passagers par an, est déjà desservi par Air France, Royal Air Maroc, Tunisair, Air Algérie, Air Sénégal et le canarien Binter. « Nous n’avons pas la folie des grandeurs ni la prétention de concurrencer Royal Air Maroc [RAM]. Ils visent le trafic de transit avec leur hub de Casablanca. Nous, nous voulons développer un trafic intra-africain », explique Moncef Badis. « Le triangle formé par Abidjan-Bamako-Dakar constitue pour nous un potentiel de croissance en raison du boom démographique qui touche ces zones », complète Anis Chebil, directeur commercial.

Taux de remplissage à 40 %
Le marché est porteur – Air Mauritanie réalisait un chiffre d’affaires annuel de 30 millions d’euros -, mais Mauritania Airways devra bientôt le partager avec un nouveau concurrent local. Lors d’une visite à Nouakchott, l’émir du Qatar a signé un accord qui prévoit la mise en service d’une compagnie au capital de 18 millions de dollars. Elle sera contrôlée à 60 % par le groupe qatari El Betil, et l’on retrouvera des privés mauritaniens (30 %) et l’État (10 %) à son capital. Mauritania Airways garde le cap sur le développement de vols régionaux. Depuis sa mise en service il y a huit mois, le taux de remplissage de ses avions est passé de 15 % à 40 %. Des investissements sont prévus, comme la rénovation des infra­structures pour l’accueil des passagers à l’aéroport de Nouakchott pour un montant de 1 million d’euros. L’entreprise compte détenir 30 % de parts de marché à l’international d’ici à la fin de l’année et table sur la croissance annoncée du secteur aérien en Afrique de l’Ouest de 5 % à 8 % par an pour s’assurer un avenir serein. À condition que les prix du brut cessent leur vertigineuse ascension. « C’est une vraie menace pour l’ensemble du secteur aérien, se désole Moncef Badis. Nous sommes à la limite. Si le baril passe les 150 dollars, la situation sera critique. »

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