La forteresse assiégée

Publié le 23 juin 2008 Lecture : 2 minutes.

Pour juguler les flux migratoires, l’Union européenne n’a d’autre réponse que de se transformer chaque jour davantage en forteresse. Et de durcir le ton : expulsions forcées, manoeuvres militaires en Méditerranée, camps de refoulement installés au Maghreb, etc. Dernier épisode de cette guerre aux migrants, l’adoption par le Parlement européen, le 18 juin, de la directive « Retour », qui vise à harmoniser les règles d’expulsion des sans-papiers. Jusqu’à dix-huit mois d’internement pour le seul fait de fuir la misère, rétention et expulsion de mineurs et de personnes vulnérables (victimes de tortures, femmes enceintes), interdiction de retour sur le territoire européen pendant une durée de cinq ans pour les expulsés… Bienvenue sur le Vieux Continent !

Oui, l’Europe est en guerre contre les dizaines de milliers de candidats à l’immigration qui se pressent à ses frontières. Migrer, un droit fondamental inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. La longue liste des petits arrangements avec le droit international n’en finit d’ailleurs plus de s’allonger : entraves au regroupement familial, à l’accès aux soins, à une justice équitable, à la scolarité, au statut de réfugié, traitement policier musclé et discriminatoireÂÂ

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Les accomodements avec la morale ne sont pas moins nombreux. Comme cette immigration « choisie », indispensable à la croissance européenne nous dit-on, qui ne fait que dépouiller les pays d’origine de leurs forces vives. Comme le « codéveloppement », aussi, nouvelle expression à la mode en France, qui n’est au fond qu’un troc cynique : de l’aide contre des accords dits concertés avec les pays de départ (Cameroun, Sénégal, Mali, Mauritanie, etc.), réduits à accepter sans sourciller les tests ADN et le retour des candidats au bonheur recalés. Ou comme cette initiative de Sarkozy, enfin, qui accorde aux Polonais, entre autres, ce qu’il refuse aux Africains en annonçant l’ouverture totale du marché français aux travailleurs de l’Est.

L’état de siège, depuis longtemps décrété par l’UE, donne-t-il des résultats ? À voir l’augmentation exponentielle du nombre de victimes, noyées ou mortes d’épuisement, entre les rives africaines et européennes, non. Cette politique ne tarit pas le flot de ceux qui aspirent à une vie meilleure, loin de là. La fin du cauchemar n’est pas pour demain. L’Europe a perdu le sens des réalités et préfère élever ses remparts plutôt que d’ouvrir les yeux. Ce n’est plus une forteresse, c’est une tour d’ivoireÂÂ

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