Coup de pouce aux entrepreneurs
En dix ans d’existence, la Banque tunisienne de solidarité a permis à plus de 460 000 microprojets et microentreprises de se lancer. Une prise de risques dont les autres banquiers pourraient s’inspirer plus largement…
« Confiance mutuelle et ambition individuelle », telle est la devise de la Banque tunisienne de solidarité (BTS). Il s’agit, explique son PDG Lamine Hafsaoui, de conjuguer les efforts de tous les partenaires pour permettre la réalisation d’un projet viable par un entrepreneur engagé. La BTS n’est pas une banque comme les autres : elle ne recherche pas le profit pour elle-même mais pour ses clients. Ce qui ne veut pas dire qu’elle peut perdre de l’argent. « Nos comptes en 2007 sont équilibrés, précise le PDG, à la veille de l’assemblée générale annuelle (le 28 juin à Tunis). La preuve, nos meilleurs projets ont été primés, le 11 juin, par le président de la République. C’est très encourageant », ajoute-t-il, en égrenant la liste des huit lauréats.
Leur profil illustre le rôle joué par la BTS depuis sa création, le 21 mai 1997, et son démarrage opérationnel en mars 1998. Le premier prix présidentiel a été accordé à une jeune promotrice originaire de Gafsa, Sihem Radhouani. Avec un crédit de la BTS, elle a lancé un centre d’appels international. Diplômée en marketing, elle emploie aujourd’hui 87 autres diplômés du supérieur et réalise un chiffre d’affaires annuel de plus de 700 000 dinars (380 000 euros) à l’export. Quant à Ridha Hammouda, le dynamique président d’une Association de microcrédit (AMC) de Souk el-Ahad à Kébili (dans l’extrême sud du pays), il a su mobiliser, outre la BTS, d’importants partenaires internationaux au développement – tels la GTZ allemande ou le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) – dans des programmes de lutte contre la désertification.
Petites idées devenues grandes
Les autres jeunes entrepreneurs primés témoignent de l’étendue des activités couvertes par la microfinance en Tunisie : promotion des petits métiers (AMC de Medjez el-Bab), formation des primo-demandeurs d’emploi (AMC de Sakiet el-Daïr, Sfax), architecture paysagiste (Tunis), transformation de dattes (Douz), numérisation des cartes et plans parcellaires (Béjà)Â
Deux départements clés se distinguent à la BTS : celui des AMC, sous la responsabilité de Samia Mansour, et celui des microentreprises, sous celle de Hafedh Gharbi. Le premier gère les concours destinés aux AMC, lesquelles les redistribuent – sous forme de microcrédits – aux jeunes promoteurs qui, faute de moyens et de garanties, ne peuvent pas avoir accès au marché bancaire commercial. En dix ans, la BTS a développé un réseau de 271 AMC couvrant l’ensemble du territoire national. Le plafond de leur financement ne dépasse pas 4 000 dinars (2 100 euros) par projet, remboursable sur une durée moyenne de trois ans avec un taux d’intérêt largement bonifié par l’État (5 %, soit moitié moins que le taux du marché). En 2007, ce réseau a octroyé 57 millions de dinars (31 millions d’euros) de microcrédits pour 64 000 projets. « Notre objectif est d’atteindre 72 millions en 2008 », précise Lamine Hafsaoui.
Pour les microentreprises, les plafonds de crédits ont été relevés cette année de 80 000 à 100 000 dinars (54 000 euros) au profit des promoteurs diplômés du supérieur et de 15 000 à 20 000 dinars pour les autres. Autre nouveauté : les projets agricoles bénéficient d’un plafond de 100 000 dinars. L’exercice 2007 s’est terminé avec l’octroi de 104 millions de dinars pour 10 281 microentreprises et celui de 2008 s’annonce plus volumineux (157 millions pour 11 000 projets). À cela s’ajoutent les 5 à 6 millions de dinars versés aux jeunes pour l’acquisition de 5 000 à 6 000 ordinateurs par an.
Avec plus de 460 000 crédits accordés et 970 millions de dinars d’engagements à la fin de mai 2008, le travail accompli par la BTS est considérable : création de milliers d’emplois et des sources de revenus durables. « Je ne sais pas ce que tous ces jeunes seraient devenus sans la BTS », commente un banquier privé. Mais la principale fierté de Lamine Hafsaoui est d’ordre moral : « Les microemprunteurs sont de très bons payeurs. » Le taux de recouvrement des crédits de la BTS est en effet supérieur à 90 % pour les AMC et à 80 % pour les microentreprises. Preuve que les projets sont rentables et que la « confiance mutuelle » règne.
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