Conférence Fin4Ag de Nairobi : 3 stratégies clés pour financer l’agriculture africaine
Venus nombreux, les participants à la conférence internationale Fin4Ag de Nairobi ont planché du 14 au 18 juillet sur les modèles de financement susceptibles d’impulser une nouvelle révolution agricole en Afrique. Focus sur le tiercé gagnant.
Tenue du 14 au 18 juillet, à l’initiative du Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA) et de l’Association africaine du crédit rural et agricole (AFRACA), la conférence internationale Fin4Ag de Nairobi sur le financement des chaînes de valeur agricoles a fait le plein. Près de 900 participants venus de 81 pays ont fait le déplacement ainsi qu’un aréopage de décideurs politiques parmi lesquels le vice-président kényan, William Ruto, et la commissaire pour l’Économie rurale et l’Agriculture de l’Union africaine, Rhoda Peace Tumusiime.
Une conférence pour « changer de paradigme financier », selon les mots de Michael Hailu, directeur du CTA, et qui aura mis en avant trois stratégies-clés pour mobiliser les capitaux nécessaires à la transformation de l’agriculture sur le continent. « Un paysan qui obtient de son banquier un crédit à 18 % de taux d’intérêt annuel et parvient à le rembourser sans difficulté est certainement dans le trafic de stupéfiants », a rappelé, pince-sans-rire Akinwumi Ayodeji Adesina, le ministre de l’Agriculture nigérian. D’où l’urgence de trouver des mécanismes innovants et pragmatiques pour assurer le financement de l’agriculture sur le continent.
Garanties
Première réponse : la mobilisation des services de gestion de garantie. C’est un fait, les prêteurs exigent le plus souvent des garanties physiques comme préalable à toute décision de crédit, dans des pays où les titres de propriété et les actifs tangibles sont rares. Une solution mise en avant durant cette rencontre, pour répondre à ce dilemme, est le développement des services de contrôle des produits agricoles comme collatéral d’un prêt.
‘Un paysan qui parvient à rembourser sans difficulté un crédit à 18 % annuel est certainement dans le trafic de stupéfiants’, avertit le ministre de l’Agriculture nigérian
« L’intervention d’un gestionnaire de garanties qui supporte le risque de défaut serait un bon moyen pour l’agriculteur d’obtenir des financements et une sécurité supplémentaire pour la banque », résume Alex Gideon Kwayu, Directeur de CGS Collateral Control.
Plateformes
Les intervenants à la Conférence Fin4Ag ont également recommandé le développement des plateformes digitales de financement. Agrilife, Ensibubuuko, Tangaza Pesa FarmDrive, Musoni System, les applications offrant des services financiers aux petits producteurs agricoles, via leur téléphone ou internet, existent déjà. Elles peuvent servir de relais et d’intermédiaires pour accéder aux crédits des institutions de microfinance, des coopératives, des banques commerciales ou même des investisseurs individuels.
« Cela permet aux agriculteurs en quête de fonds de se connecter de manière sécurisée aux bailleurs de fonds, de demander des prêts, de les recevoir et d’effectuer les remboursements depuis leur téléphone portable », énumère Gichane Muraguri de Tangaza Pesa.
Idem pour les plateformes de financement participatif, elles aussi de plus en plus actives sur le continent. Kiva, la première plateforme mondiale de crowdfunding, a ainsi ouvert l’année dernière au Kenya son premier bureau permanent en dehors des Etats-Unis. Le modèle kényan, où Kiva a financé 63 000 projets, majoritairement dans le secteur agricole, pour un montant total supérieur à 20 millions de dollars, pourrait inspirer les autres pays africains.
Bourses
La conférence de Nairobi a enfin été l’occasion de vanter les mérites de l’East African Exchange (EAX) de Kigali, la dernière-née des bourses de matières premières africaines, lancée le 3 juillet.
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Le développement de places de négoce qui favorisent la transparence des prix et permettent aux agriculteurs de mieux tirer profit de leur production en monétisant plus facilement celle-ci, devrait être encouragé selon les participants à Fin4Ag.
Associées à des systèmes d’entreposage et aux mécanismes de gestion de garanties indiqués plus haut, ces plateformes d’échange faciliteraient le financement agricole et pourraient permettre de couvrir une partie des risques agricoles.
Big business
Qu’il s’agisse des services de garantie, des plateformes de financement ou encore des bourses agricoles, les solutions préconisées à Nairobi partagent hélas un travers commun : « Aujourd’hui, elles s’adressent surtout aux grandes exploitations commerciales, orientées vers l’exportation », a reconnu Adam Gross, consultant financier auprès du NEPAD Business Council.
Une orientation « Big business » qu’il faudra faire réformer pour démocratiser et accroître le financement de l’agriculture sur un continent où 70 % de la population active continue de tirer sa subsistance du secteur primaire et où 40 % des habitants vit toujours sous le seuil de pauvreté.
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