Djerassem Le Bémadjiel : « Glencore est un partenaire stratégique du Tchad »

« Jeune Afrique » publie une enquête sur les changements en cours dans le négoce de matières premières en Afrique dans le n° 2794 (à paraître le 27 juillet). Djerassem Le Bémadjiel, le ministre tchadien du Pétrole, a répondu aux questions du magazine sur les liens qui unissent le pays d’Afrique centrale au trader suisse controversé Glencore.

Djerassem Le Bemadjiel. © GouvernementduTchad.org (archives)

Djerassem Le Bemadjiel. © GouvernementduTchad.org (archives)

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Publié le 24 juillet 2014 Lecture : 3 minutes.

Alors que Jeune Afrique publie une enquête sur les changements en cours dans le négoce de matières premières sur le continent dans le numéro 2794 (à paraître le 27 juillet), Djerassem Le Bémadjiel, ministre tchadien du Pétrole, répond à nos questions sur les liens qui unissent le pays d’Afrique centrale au trader suisse controversé Glencore.

Propos recueillis par Christophe Le Bec.

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Jeune Afrique : Comment le Tchad a-t-il pu reprendre les parts de Chevron dans le projet pétrolier de Doba?

Djerassem Le Bémadjiel : L’année dernière, en 2013, nous avions entamé des négociations avec Esso, Petronas et Chevron, les trois actionnaires du projet, pour qu’ils cèdent à l’État tchadien 5% des parts du projet. Nous étions dans ces discussions quand nous avons appris, à notre grande surprise, la sortie du capital de Chevron, qui détenait 25% des parts. Le groupe américain proposait le français Perenco comme repreneur de ses actions, mais cette revente ne pouvait se faire sans notre autorisation et nous l’avons bloquée. L’occasion était trop belle : cette sortie de Chevron du projet fournissait la possibilité à l’État tchadien de monter au capital jusqu’à 25% des parts, bien plus que les 5% auxquels nous pensions initialement.

À partir de 2018, l’intégralité des 25% de la production du projet de Doba reviendra au Tchad.

Pour réussir cette prise de participation, nous ne disposions initialement que de 45 jours pour apporter les fonds avec une offre alternative à celle de Perenco. Nous avons pu rallonger ce délai à six mois. Dans ce temps, nous avons été en contact avec plusieurs groupes, mais seul Glencore s’est mobilisé rapidement.

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Est-ce vous qui avez sollicité Glencore pour cette opération, ou le groupe suisse qui est venu vers vous ?

C’est le gouvernement tchadien qui a sollicité ce groupe.

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Glencore, connu pour être dur en négociation, n’a pas bonne réputation sur le continent. Il est notamment accusé d’évasion fiscale dans plusieurs pays africains, dont la Zambie. Le Tchad ne s’est-il pas mis en de mauvaises mains ?

Je ne peux pas commenter ce qui se passe en dehors du Tchad. En revanche, ce que je peux dire, c’est que Glencore est impliqué de façon positive et depuis longtemps dans notre pays : Il a notamment acquis Caracal Energy, qui développe des projets de production pétrolière sur notre sol. Il nous a déjà accordé un prêt de 600 millions de dollars par le passé en échange d’un quota de la production détenue par l’État.

Lire ausi :

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Nous avons l’habitude de travailler ensemble, Glencore est un partenaire stratégique. Il est vrai qu’il dispose de professionnels rompus aux négociations. Mais, de notre côté, nous avons pris le temps pour nous assurer que cet accord était bénéfique pour le Tchad. Nous avons consulté plusieurs cabinets d’avocats internationaux, et avons obtenu l’allongement du délai de négociation de 45 jours à six mois, comme je viens de le dire.

Quels bénéfices attendez-vous de cet accord ?

Dans cette opération, le Tchad ne s’endette pas, mais il accepte de partager avec Glencore sa production future ! Nous avons étalé nos remboursements en cargaison de pétrole brut sur quatre années. Pendant ce temps, non seulement nous satisferons nos obligations envers Glencore, mais nous pourrons également garder une autre partie des revenus de la production pour investir dans le développement et la maintenance du projet.

Et en sus, nous dégagerons pour le Tchad quelques 500 millions de dollars d’excédents à la fin de cette période. Et dès 2018, l’intégralité des 25% de la production de brut nous reviendra. Enfin, nous continuerons à récolter 12,5% de royalties sur la production, ce qui est plutôt élevé.

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