Comment Sharon fait diversion
Si Sharon veut empêcher tout accord israélo-palestinien, il lui suffit d’insister – comme il le fait – sur la nécessité de faire précéder le moindre geste d’Israël par « cent pour cent d’efforts » contre le terrorisme de la part d’Abou Mazen. Il lui suffit de proclamer – comme il le fait – qu’avant toute mise en oeuvre de la feuille de route Israël doit d’abord faire discuter les quatorze objections qu’il lui a faites. Il lui suffit de continuer – comme il le fait – les assassinats ciblés, enflammant ainsi les extrémistes et faisant apparaître les forces de sécurité d’Abou Mazen comme des supplétifs d’Israël. Le nouveau Premier ministre palestinien est déjà assez faible ; il n’a aucune chance contre une telle détermination d’Israël.
Pourquoi Sharon souhaiterait-il un échec d’Abou Mazen ? Parce qu’un véritable processus de paix conduirait presque certainement à un accord dont les modalités seraient inacceptables par Sharon. Israël devrait restituer tous les territoires de Cisjordanie et de Gaza (sauf peut-être 5 %), plus les quartiers palestiniens de Jérusalem, et reloger des dizaines de milliers de colons juifs. Ces conditions ont été acceptées par l’administration Clinton, par le dernier gouvernement israélien et la grande majorité de la population d’Israël, mais Sharon les voit comme un suicide. Son objectif politique central a été de déplacer le consensus international sur un autre problème : de quel territoire et de quelle souveraineté devrait disposer un futur État palestinien de sorte qu’Israël conserve, par exemple, la plus grande partie de la Cisjordanie et tout Jérusalem ? Ce pourquoi il ne cesse de répéter que son but est un « accord intérimaire à long terme » avec les Palestiniens.
Sharon a préparé un plan de rechange plus conciliant. En visite à Washington, il y a un mois, son principal collaborateur, Dov Weisglass, a évoqué une série de concessions possibles à Abou Mazen. Elles allaient du domaine humanitaire, comme l’octroi aux Palestiniens d’un plus grand nombre de visas de travail en Israël, au domaine politique, par exemple la libération d’un contingent de prisonniers palestiniens, ou le redéploiement des forces israéliennes dans certains secteurs de Gaza, pour tester la capacité d’Abou Mazen d’y assurer la paix.
Les idées de Dov Weisglass restent très en retrait des obligations d’Israël, mais leur application pourrait marquer un premier pas. Sur les colonies, par exemple, l’envoyé de Sharon a rejeté l’exigence de geler toute construction. Il a déclaré néanmoins qu’Israël était prêt à démanteler les douzaines d’« avant-postes » créés depuis deux ans. S’il le faisait vraiment, cela forcerait probablement Sharon à remanier son actuel gouvernement de droite et donnerait à Abou Mazen un réel coup de pouce.
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