Du sang dans les urnes
Processus électoral sous haute tension.
De rebondissements en péripéties, le scénario de la présidentielle nigériane est resté, jusqu’à la toute dernière minute, imprévisible. Le 16 avril, cinq jours avant la tenue d’un scrutin censé donner lieu, pour la première fois dans l’histoire du pays, à la transmission du pouvoir d’un civil à un autre, la Cour suprême autorise le vice-président Atiku Abubakar à se porter candidat. Le 15 mars, la Commission électorale nationale indépendante (Inec) a rayé des listes l’ennemi juré d’Obasanjo – Atiku s’est opposé aux tentatives du chef de l’État sortant de briguer un troisième mandat – pour des soupçons de corruption. Le jugement était prévu le 12 avril, mais deux jours fériés ont été soudainement décrétés par la présidence. Pour l’Action Congress (AC), le parti du vice-président, aucun doute : la manuvre est ourdie par Aso Rock en vue de saboter le retour d’Atiku dans la course. Il fait la même interprétation de la décision – tout aussi inattendue – d’interdire les meetings la semaine précédant le scrutin. Et de l’absence, sur une partie des bulletins de vote, du nom d’Atiku, l’Inec n’ayant pas eu le temps de l’y faire figurer Jusqu’au bout, Olusegun Obasanjo et son équipe auront fait tout leur possible pour barrer la voie à l’opposition (dont une partie n’avait finalement pas intérêt à la tenue du scrutin) et, au contraire, favoriser l’ascension du successeur que le chef de l’État sortant s’est choisi, le très discret Umaru Yar’Adua, candidat du People’s Democratic Party (PDP), au pouvoir.
La menace, pendant 48 heures, du boycottage du scrutin par 18 partis de l’opposition, en plus de faire le jeu d’Obasanjo, souligne les fragilités de la démocratie nigériane. Moins de dix ans après la fin d’une longue série de dictatures militaires, ponctués de brefs intermèdes civils, elle est encore toute expérimentale. La présidentielle de 2003 avait été marquée par la violence, la fraude et la désorganisation. Quatre ans plus tard, le scénario se répète. En guise de préambule au 21 avril, l’élection des gouverneurs, une semaine auparavant, s’est soldée par une cinquantaine de morts, des urnes bourrées par tous les partis (y compris l’opposition), des scrutins annulés au moins 26 des 36 États et, probablement, un faible taux de participation (l’Inec ne l’a pas divulgué ; encore faudrait-il que le chaos nigérian lui ait permis de le calculer). « Un esprit de paix et de saine compétition », a salué le chef de l’État sortant au lendemain de la première manche. Et pour cause : son parti en est sorti largement vainqueur.
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