Afrique : « la fin justifie les moyens »

Publié le 23 avril 2007 Lecture : 2 minutes.

Pas moins de cinq voyages sur le continent, un Plan d’action spécifique lancé dès son arrivée à la tête de la Banque, pas de doute, Wolfowitz a placé son mandat sous le signe de l’Afrique. Intarissable sur les ravages de la pauvreté, sincèrement affecté par les désastres des guerres et du sida, l’ancien numéro deux du Pentagone s’est voulu le défenseur des plus démunis. « Admettre qu’il y ait des gens qui restent à la traîne est un échec pour tous », déclarait-il avant sa première tournée, en juin 2005. Mais si les clichés on le voit dans un bidonville tenant un enfant dans les bras ont de quoi émouvoir, si les plans « com » sont admirablement orchestrés, la politique exclusivement articulée autour de la lutte contre la corruption a montré ses limites.
Premier revers au Tchad, lorsque Wolfowitz décide unilatéralement de suspendre les programmes de la Banque après la décision de N’Djamena, en décembre 2005, de revoir l’utilisation des revenus pétroliers. La France dénonce « une méthode brutale », le président Idriss Déby Itno ne cède pas. Finalement, les États-Unis, soucieux de défendre les intérêts d’ExxonMobil et de contenir la menace rebelle venue du Soudan, demandent à l’ancien conseiller de George W. Bush de mettre de l’eau dans son vin. Un compromis est trouvé, mais N’Djamena a gagné le bras de fer.
Au cours de l’année 2006, « Wolfie » s’obstine, et menace de couper les vivres au Burundi et au Congo-Brazzaville pour cause de mauvaise gestion. Mais plusieurs pays donateurs s’interrogent à voix haute. Paris estime notamment que l’exigence légitime d’une bonne gouvernance ne peut être qu’un moyen et non une fin en soi dans la lutte contre la pauvreté. Faute de quoi les populations en paieront le prix.
Le hiatus apparaît au grand jour lors d’une réunion du conseil d’administration particulièrement houleuse, en janvier dernier. La France, la Chine, la Suisse, le Canada et même les États-Unis demandent une clarification des priorités et des stratégies de la Banque. Si un compromis a été trouvé sur une nouvelle stratégie en matière de lutte contre la corruption, certaines capitales laissent planer le doute sur leur contribution financière à l’Association internationale de développement (AID), structure qui englobe la moitié de l’aide accordée par la maison mère dans les pays les plus pauvres.
Cette reconstitution des réserves doit aboutir en décembre 2007. Les besoins sont énormes. Du fait de l’annulation de la dette multilatérale décidée en juillet 2005 au Sommet de Gleneagles, l’AID ne peut plus compter sur le remboursement des prêts pour se financer. Pour maintenir ses capacités d’intervention, elle estime ses besoins entre 25 et 30 milliards de dollars sur la période 2008-2011. La moitié est destinée à l’Afrique. La rupture entre Wolfowitz et certains pays membres de la Banque tombe vraiment très mal.

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