Méditations d’un témoin (suite)

Publié le 23 février 2004 Lecture : 2 minutes.

Dans son livre La Prison juive, que vous avez présenté et cité (n° 2248, pp. 84-85), Jean Daniel a rappelé les positions de Bourguiba et de Hassan II sur Israël. Je pense que les lecteurs de J.A./l’intelligent, qui ne peuvent se procurer le livre, aimeraient les connaître.

Réponse : Les positions des deux chefs d’État maghrébins, telles que décrites par Jean Daniel, sont en effet intéressantes à connaître. Voici ce qu’a écrit l’auteur de La Prison juive (éd. Odile Jacob, 258 pp.). B.B.Y.

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Bourguiba, Hassan II et Israël
« Innovateur audacieux dans la décolonisation de son pays, le leader tunisien devint un précurseur téméraire sur la question palestinienne. Dès 1965, rompant avec la Ligue arabe, il adjurait que l’on laissât les Palestiniens revenir librement au Plan de partage adopté par l’ONU en 1948. Ne jamais tourner le dos à la légalité internationale, c’était son principe et sa stratégie pour vaincre l’Occident avec ses propres armes. Eût-il été écouté, Bourguiba eût prévenu l’une des tragédies du siècle. Ce n’est pas lui, en tout cas, qui eût attendu – pour obtenir plus que ce que l’on lui proposait – qu’un Bush succédât à Clinton et un Sharon à Barak !
Le roi Hassan II du Maroc observait, lui, non sans condescendance, qu’après tout on pouvait bien concevoir un ghetto à l’échelle du monde arabe. Il y avait un ghetto dans chaque pays, pourquoi n’y en aurait-il pas un qui les rassemblerait tous, ayant un nom particulier, et pourquoi pas un drapeau, un ghetto qui serait l’objet de la tolérance musulmane et de la bienveillance arabe ? Ce que les Occidentaux n’ont pu faire, pourquoi ne le ferions-nous pas ? Il y avait dans ces propos une sorte de désinvolture aristocratique, mais aussi la mémoire bénie de l’âge d’or andalou, à l’époque des trois rois, et des trois religions. Le souvenir, aussi, de l’assistance que les médecins, les financiers, les philosophes et les ingénieurs juifs apportaient aux princes berbères. On pouvait tout attendre, dans cette disposition d’esprit, d’un petit État d’élite qui apporterait ce même genre d’assistance à une Arabie en devenir. Et puis les Marocains, en tout cas les Berbères, avaient une estime de chevaliers pour les hommes qui savent vaincre et mourir. Maintenant que les Juifs décidaient de vaincre en abandonnant leurs rapports anciens avec la mort, ils devenaient dignes de considération. Bref, les Israéliens, dans leur esprit, avaient, par le sang, légitimé leur existence. »

La Matinale.

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