Au chevet des voyageurs

Les amateurs de voyages en zones tropicales reviennent parfois avec des pathologies spécifiques. Un service hospitalier leur est dédié en région parisienne.

Publié le 23 février 2004 Lecture : 3 minutes.

Un petit bâtiment en préfabriqué niché entre deux constructions plus vieilles et le chantier d’une troisième qui devrait sortir de terre d’ici à 2005. Nous sommes à l’hôpital Avicenne, à Bobigny, en région parisienne. Ce local provisoire, en attendant la fin des travaux, est celui de la petite équipe entourant le professeur Olivier Bouchaud, qui a été officiellement constituée le 31 janvier. Son service : la consultation du voyage. Deux médecins et deux infirmières sont chargés de conseiller les voyageurs avant leur départ, tant en matière de vaccination que d’hygiène, mais aussi de les suivre à leur retour. Parfois, en effet, on ne ramène pas uniquement des souvenirs ensoleillés de ses vacances, mais aussi des maladies tropicales. Et, contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas forcément les touristes « lambda » qui sont les plus exposés. Les immigrés retournant au pays sont, eux aussi, vulnérables. Ceux de la première génération, parce qu’ils pensent être immunisés contre les pathologies de leur pays d’origine, alors qu’ils le sont moins qu’un autochtone, et ceux des générations suivantes, qui n’ont jamais vécu au pays et sont donc tout aussi sensibles que n’importe quel touriste. Et d’autant plus exposés que, en général, ils séjournent dans des zones beaucoup moins aseptisées que les voyageurs fortunés qui ne quittent pas leur chambre d’hôtel climatisée. Résultat, ces gens ne prennent pas de précautions, et ont besoin d’être suivis à leur retour, explique Olivier Bouchaud.
Ce dernier connaît très bien ces pathologies et les besoins des patients immigrés ou voyageurs. Il n’en est pas à son coup d’essai. Précédemment, il exerçait à l’hôpital Bichat, à Paris, où il avait créé la même consultation, en 1993. Elle n’avait réellement fonctionné à plein régime qu’au bout de cinq ou six ans. Réaliser la même structure à Avicenne, un établissement de l’Assistance publique situé en Seine-Saint-Denis, un département avec une forte population immigrée, était une suite logique. Les deux tiers des patients se présentant à la consultation, ouverte tous les matins du lundi au samedi, sont des immigrés. Les visites ne se font pas sur rendez-vous. Le patient vient, prend un ticket et attend dans un coin bien aménagé du préfabriqué. On y trouve des sièges et de la lecture, comme dans tout cabinet médical, mais aussi un panneau informant sur tous les risques sanitaires encourus aux quatre coins du monde.
Pour être connue des voyageurs et donc toucher un large public, l’équipe mise sur le rappel de la vaccination de la fièvre jaune, qui doit être réalisé tous les dix ans. Les médecins attachés en profitent pour conseiller les patients sur les autres précautions à prendre. Parmi elles, les médecins et infirmières du service préfèrent promouvoir la prévention contre le paludisme que faire l’apologie du « tout vaccinal ». « Nous ne procédons qu’aux vaccinations très essentielles afin que cela ne coûte pas trop cher et que les voyageurs puissent s’acheter des antipaludéens, très onéreux, mais indispensables dans certaines régions », explique le professeur Bouchaud. Les crises de palu représentent une des principales causes de consultation au retour. Avec 7 000 cas enregistrés par an, la France est le premier pays de déclenchement de la maladie hors zones à risques. Mais 60 % de ces cas se produisent chez les immigrés, qui ne représentent pourtant que 15 % des voyageurs. Autant dire qu’il est urgent d’assurer la prévention. L’équipe est régulièrement informée sur les circuits touristiques, afin de savoir exactement quel antipaludéen prescrire et, surtout, de ne le faire que lorsque le circuit en question traverse des zones impaludées, ce qui n’est pas toujours le cas.
L’autre motif principal de consultation est la maladie diarrhéique, de la plus bénigne, durant quelques jours, aux plus graves, pouvant durer plusieurs mois. Le service est en cheville avec celui de parasitologie, afin d’obtenir des résultats rapidement et ainsi poser un diagnostic fiable.
Olivier Bouchaud et son équipe ne s’intéressent pas seulement au retour au pays des immigrés, mais aussi à leur santé sur place. D’autant qu’ils sont de plus en plus nombreux à ne pas repartir une fois à la retraite et à rester en France. Une nouvelle donne tant sociale que sanitaire. Une conférence-rencontre sur le sujet – « Vieillir ici quand on est d’ailleurs… » – aura lieu le 18 mars à partir de 9 heures, à la salle des fêtes de l’hôpital Avicenne, et réunira de nombreux experts et personnalités immigrées.

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