À quoi joue Kadhafi ?

Publié le 24 janvier 2006 Lecture : 2 minutes.

« C’est une insulte ! » Hostiles à tout ce qui peut s’apparenter à une reconnaissance de l’indépendance de Taiwan, les autorités de Pékin n’ont pas mâché leurs mots pour qualifier la rencontre, le 18 janvier, à Taipei, entre Seïf el-Islam Kadhafi et Chen Shui-bian, le président taïwanais. D’autant que le fils et dauphin putatif du « Guide » libyen a promis à son interlocuteur la réouverture immédiate de la représentation commerciale taïwanaise à Tripoli, fermée en 1997. Et si le fils de Kadhafi n’a pas donné à Shui-bian un engagement explicite sur le rétablissement des relations diplomatiques entre la Jamahiriya et Taiwan, rompues en 1978, il n’a pas manqué de lui transmettre une invitation officielle en Libye. Invitation que l’intéressé a immédiatement acceptée.
Au moment même où Seïf el-Islam « fraternisait » avec le maître de Taipei, allant jusqu’à lui proposer « un partenariat triangulaire » en Afrique, son père caressait dans le sens du poil, sous sa tente, à Syrte, Li Zhaoxing, le ministre chinois des Affaires étrangères : « Il n’y a qu’une seule Chine dans le monde. La Libye s’opposera à l’indépendance de Taiwan et soutiendra la cause de la réunification chinoise. » Ce qui n’a pas suffi à rassurer son hôte. À peine sorti de la tente du « Guide », il a officiellement protesté auprès de son homologue Abderrahmane Chalgham et du chef du cabinet libyen Chokri Ghanem, qui se sont par la suite déclarés « surpris » par la véhémence de la réaction de Pékin. Reste à savoir quelles sont les raisons de ce geste inamical de Tripoli à l’égard de la Chine. Certains analystes estiment que Kadhafi voulait utiliser la carte de Taiwan pour amener les Chinois, qui s’apprêtent à abriter, au début de février, le sommet du forum sur la coopération sino-africaine, à en faire un interlocuteur privilégié dans leur nouvelle politique africaine. D’autres pensent qu’il s’agit plutôt d’un clin d’il supplémentaire au nouvel ami américain, traditionnellement protecteur de Taiwan. On évoque aussi une manière de vengeance typiquement bédouine qui aurait amené Kadhafi, aujourd’hui en bons termes avec l’Occident, à faire payer à Pékin le chantage qu’il a exercé sur lui, en 1997, en l’enjoignant de fermer la représentation commerciale de Taipei à Tripoli sous peine de voter pour le maintien de l’embargo contre la Libye au Conseil de sécurité de l’ONU.

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