Patrons de choc

Malgré un environnement international instable, certains entrepreneurs ont frappé fort. Très fort. Florilège.

Publié le 25 janvier 2006 Lecture : 5 minutes.

Comment s’est comportée l’économie mondiale en 2005 ? On retiendra bien sûr la flambée des prix du pétrole et son impact sur les industries du transport, avec un bilan finalement mesuré pour l’ensemble des activités. Parmi les autres éléments marquants, la bonne progression des marchés financiers, notamment en Europe, portés par la vigueur inattendue du dollar face à l’euro (+ 13 % sur l’année). Mais aussi la montée en puissance de la Chine, grande consommatrice de matières premières et désormais fournisseur numéro un de la planète. Dans cet environnement incertain, mais in fine favorable, quelques entrepreneurs ont su tirer leur épingle du jeu. Voici notre galaxie 2005.

Automobile : passage de témoin
Le marché américain de l’automobile a subi de plein fouet l’augmentation des prix à la pompe. Premier constructeur mondial depuis près de quatre-vingts ans, General Motors (GM) est sérieusement menacé par Toyota, qui n’en finit pas de lui grignoter ses parts de marché. La firme dirigée par Katsuaki Watanabe, sexagénaire spécialiste de la réduction des coûts, a continué de mettre l’accent sur la qualité, s’offrant une belle communication grâce à la Prius, une voiture à la motorisation hybride. Malgré le succès rencontré – 7,24 millions d’unités vendues en 2005 -, Watanabe reste modeste, fixant pour 2006 des objectifs de vente inférieurs de quelques unités à ceux de GM, histoire de ménager les susceptibilités. Même discrétion chez Carlos Ghosn, patron de l’alliance franco-japonaise Renault- Nissan depuis mai, qui dévoilera sa stratégie en février. Laquelle sera probablement musclée : l’homme a lui aussi une réputation de « tueur de coûts » (cost killer) et doit faire face à des ventes en berne (- 4,5 % ?sur le marché national) pour cause de gamme vieillissante, malgré le succès de la Dacia Logan produite dans plusieurs pays, dont le Maroc.

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Rebond technologique
En 2005, les activités commerciales sur Internet dégagent enfin des profits de façon régulière, comme le montrent le succès de la librairie en ligne Amazon et celui du site d’enchères électronique eBay, qui s’est offert le petit poucet de la téléphonie sur IP, Skype, pour 4,1 milliards de dollars. L’année aura été phénoménale pour Steve Jobs, le président d’Apple. La firme américaine, jusqu’ici spécialisée dans la conception et la fabrication des ordinateurs Macintosh, est devenue un géant de la musique, avec plus de 32 millions de lecteurs portables iPod vendus en 2005. Le marché des accessoires pour iPod représente à lui seul un gâteau de 700 millions de dollars pour les fournisseurs. Et les ordinateurs – dont les prochains modèles seront équipés de processeurs Intel, comme sur les PC – ne représentent plus que 46 % de son chiffre d’affaires.
Un succès douloureusement vécu par Sony, le géant de l’électronique grand public. Devancé par Apple, l’inventeur du baladeur reste en situation difficile et clôt son exercice en perte malgré l’arrivée à sa tête, en septembre dernier, de Howard Stringer, un Britannique rompu aux méthodes américaines. En revanche, la réussite d’Apple n’inquiète pas Microsoft dont le patron, Bill Gates, a, dès ses débuts, su prendre des risques calculés et se diversifier. Téléphone sur Internet, systèmes d’exploitation, tablet-PC et consoles de jeu comme la nouvelle Xbox 360 : rien n’arrête la firme de Redmond, qui reste numéro un mondial du logiciel avec un chiffre d’affaires de 40 milliards de dollars en 2005. « En trente ans, le concurrent principal de Microsoft a souvent changé », déclare, amusé, celui qui place l’innovation au premier plan, qu’elle provienne de son entreprise ou du rachat de brevets externes. Première fortune de la planète, Bill Gates, 49 ans, est aussi le plus grand philanthrope du monde. Sa fondation, qui dispose d’un budget de près de 30 milliards de dollars, supérieur à celui de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), lutte, entre autres, contre le paludisme et le sida sur le continent africain.
En 2005, la téléphonie mobile n’aura pas profité qu’aux groupes occidentaux, comme en témoigne le succès de l’égyptien Orascom Telecom dirigé par Naguib Sawiris et implanté en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie. Sa filiale irakienne, IraQna, est un succès malgré le kidnapping de ses techniciens en début d’année. Orascom a franchi le cap des 30 millions d’abonnés en décembre dernier, et ne compte pas s’arrêter là. Après avoir fait la meilleure offre à 256,5 millions de dollars pour obtenir 51 % de l’opérateur nigérian Nitel, le groupe vient d’acquérir 19,3 % du capital d’Hutchinson Telecom, une filiale du groupe asiatique Hutchinson Whampoa. Une opération à 1,3 milliard de dollars qui lui ouvre le marché de l’Asie du Sud-Est et lui permet d’atteindre les 100 millions de clients d’ici à 2010.

Pékin change la donne
A la tête du premier producteur mondial d’acier, Lakshmi Mittal se frotte les mains. Troisième fortune mondiale, cet Indien de 55 ans a bâti son empire en rachetant des usines en faillite, créant le concept de mini-usine intégrée et rationalisant l’utilisation de ferraille dans la production. Avec près de 57 millions de tonnes par an et un chiffre d’affaires de 31,5 milliards de dollars, Mittal Steel aura doublement profité de la croissance chinoise : la consommation d’acier a atteint un pic en mars, avant de se trouver en surcapacité. La baisse des prix sur le marché de l’empire du Milieu permet désormais à Mittal de prendre des participations dans les aciéries chinoises : il est en négociations pour 49 % de Baotou Steel, après avoir acquis 36,37 % de Hunan Valin Steel Tube & Wire pour 310 millions de dollars.
La Chine est aussi à l’origine de l’importante croissance du trafic maritime mondial. C’est pourtant le moment qu’a choisi Vincent Bolloré pour revendre à CMA-CGM l’ensemble de ses activités maritimes, qui représentaient 13 % du chiffre d’affaires de son groupe. Avec cet investissement valorisé à 600 millions de dollars, le marseillais CMA-CGM, présidé par Jacques Saadé, devient le numéro trois mondial du transport maritime et signe avec Bolloré un accord de partenariat sur la création d’agences maritimes dans les ports d’Afrique. Bolloré, lui, se désendette et se concentre sur les médias : après avoir créé la chaîne de télévision Direct8, il a pris plus de 20 % de Havas, le second groupe publicitaire français, puis 25 % de l’anglais Aegis, le dernier groupe indépendant britannique d’achat d’espace.

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