[Chronique] Ouganda : Yoweri Museveni a-t-il le droit de bloquer qui il veut sur Twitter ?
Un Ougandais attaque en justice la décision du président ougandais Yoweri Museveni de le bloquer sur Twitter. Une démarche peut-être moins farfelue qu’il n’y paraît…
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 29 août 2019 Lecture : 2 minutes.
L’étudiant ougandais Hillary Innocent Taylor Seguya affirme avoir déposé une requête auprès de la Haute Cour de l’Ouganda suite à la décision de Yoweri Museveni de le bloquer sur le réseau à l’oiseau bleu, le 30 juillet dernier. Le plaignant cible également le porte-parole du gouvernement Ofwono Opondo et le policier « twittophile » Asan Kasingye. Il plaide une atteinte à sa liberté de pensée, de conscience et de conviction garantie par l’article 29 de la Constitution ougandaise.
La requête du jeune homme peut paraître saugrenue ou présomptueuse, si l’on considère que le « blocage » sur Twitter ne consiste qu’à rompre la communication publique ou privée entre deux comptes individuels mutuellement désabonnés. Il existe pourtant trois raisons qui permettent de comprendre l’insolite requête…
Tout d’abord, l’étudiant réside aux États-Unis, pays à ce point procédurier que le sénateur américain Ernie Chambers avait pu porter plainte contre Dieu, en 2008, pour propagation de « la mort, la destruction et la terreur ».
Liberté d’expression
Deuxièmement, l’étudiant ougandais de la prestigieuse université d’Harvard connaît la valeur de la jurisprudence, même étrangère. Il n’ignore pas qu’une cour d’appel américaine a confirmé, début juillet, que Donald Trump violait les lois sur la liberté d’expression –notamment le Premier amendement de la Constitution– en bloquant les critiques sur Twitter, argumentant que le président américain avait fait de son compte Twitter, suivi par 61,8 millions de personnes, un espace public lié à ses fonctions officielles. Y bâillonner ceux qui ne sont pas d’accord avec le régime actuel s’apparenterait donc à une forme de discrimination d’opinion, voire de censure…
Enfin, si l’on considère que l’objectif initial d’une inscription sur Twitter est de faire parler de soi, Hillary Innocent Taylor Seguya a tapé dans le mille. Son nom est projeté dans les organes de presse du monde entier et la lumière est braquée sur un régime qu’il dénonçait jusque-là avec la confidentialité conférée à l’Ouganda dans la couverture médiatique mondiale. Comme Ernie Chambers, dont la plainte contre Dieu avait comme seule ambition de dénoncer la lenteur du système judiciaire de son pays, l’étudiant ougandais n’a pas vraiment besoin d’obtenir gain de cause judiciaire pour crier victoire militante.
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