Habib Thiam
Ancien Premier ministre du Sénégal
Dans le quartier huppé de Fann Résidence à Dakar, au bord de l’océan Atlantique, se niche, au détour d’une ruelle, une imposante bâtisse blanche dérobée aux regards par une clôture grillagée couverte de fleurs. Ici vit, depuis qu’il a pris sa retraite, Habib Thiam, un personnage qui a joué les premiers rôles dans la vie politique sénégalaise de 1960 à 1998.
Secrétaire d’État à la présidence de la République, chargé du Plan et du développement au lendemain de l’indépendance, ministre dudit département en 1963, ministre du Développement rural en 1968, député en 1973, éphémère président de l’Assemblée nationale de 1983 à 1984, Premier ministre à deux reprises (de 1981 à 1983, puis de 1991 à 1998), Habib Thiam goûte aujourd’hui à une retraite bien méritée.
Il passe ses journées dans sa maison spacieuse, décorée avec goût, en compagnie de son épouse Anna, née Majken, une Danoise blonde ex-députée dans son pays, à qui il a dit oui en 1981. Le couple vit avec sa seconde fille, Fatiha, élève de terminale à Dakar, l’aînée, Yacine, poursuivant ses études à Paris, où elle vient de décrocher une licence en droit.
« Après de nombreuses années où l’État ne laissait place à rien d’autre dans ma vie, je m’occupe aujourd’hui pleinement de ma femme, de ma fille qui vit avec nous, mais aussi des petits-fils que m’ont donnés mes cinq grands enfants. » Nés d’un premier mariage avec une Française, Mabousso, Myriam, Rama, Aïda et Abdou sont tous établis au Sénégal, où ils ont réussi à décrocher de bons jobs.
Pour meubler ses journées, l’ancien athlète international, médaillé d’or aux Jeux mondiaux de 1957 et deux fois champion de France de l’épreuve du 200 m (en 1954 et en 1957), entretient sa forme. Il passe 30 à 45 minutes par jour à s’entraîner dans une des pièces de sa maison équipée en matériel de gym. Il écoute aussi de la musique, comme l’indiquent les rayons de son salon bourrés de CD et de cassettes. « Anna et moi adorons la musique classique, les rythmes folkloriques et le jazz, celui notamment des negro spirituals. Nous sommes un couple de mélomanes, ma femme joue de la guitare et du piano. »
Habib Thiam donne également de son temps à ses amis, notamment à son compagnon de plusieurs décennies Abdou Diouf, l’ancien président sénégalais devenu secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie. « Abdou est plus qu’un ami, c’est un frère, assure-t-il. Nous nous parlons au téléphone au moins une fois par semaine. » Il se montre toutefois circonspect sur un éventuel retour de Diouf dans l’arène politique, agité ces derniers mois par la presse sénégalaise : « Je suis musulman. Dieu seul sait ce qui se passera demain. »
Hors du cercle de la famille et des amis, Thiam, habitué à l’action, s’occupe en dirigeant le conseil d’administration de Maersk Lines Sénégal, une société maritime dans laquelle il est actionnaire. Ses tâches ? Présider, évidemment, les réunions du conseil d’administration, mais aussi suivre la gestion de l’entreprise en relation avec le directeur général.
L’ancien Premier ministre surfe sur lnternet et lit beaucoup : le Coran, des journaux, des livres. Sur sa table, alors que la campagne présidentielle américaine retient toutes les attentions, Les Bush, le volumineux best-seller de Kitty Kelley paru le mois dernier. Mais aussi deux livres qu’il vient de terminer : De Gaulle, mon père, de Philippe de Gaulle, et Avant le big bang, un ouvrage dans lequel les scientifiques français Igor et Grichka Bogdanov expliquent les débuts de l’univers à l’aide d’outils mathématiques.
À 71 ans, Thiam vit en effet un regain de foi qui l’amène à s’intéresser aux questions métaphysiques et à approfondir sa connaissance de l’islam. Mais il se veut l’adepte d’une religion modérée : « Je ne me reconnais pas dans ceux qui tuent au nom de la foi et recouvrent leurs femmes de voiles et de burqas. Le Prophète a appelé, dans le dernier sermon de sa vie, à la tolérance entre les peuples et au respect des droits de la femme. »
Inondé de livres, entouré de bibliothèques garnies qui ornent presque toutes les pièces de sa maison, Habib Thiam écrit. Après Par devoir et par amitié (éd. du Rocher, 2001, 260 pages), un ouvrage qui a fait grand bruit à Dakar et dans lequel il raconte son long compagnonnage avec Diouf, l’exPremier ministre en prépare un autre. Cette fois-ci, sur une question qu’il vit comme une angoisse existentielle : les problèmes de développement de l’Afrique.
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