Nigeria-Bénin : « La fermeture des frontières ne permettra pas de parvenir à l’autosuffisance alimentaire »
Depuis le 20 août, le Nigeria n’a pas rouvert sa frontière terrestre avec le Bénin aux importations de produits alimentaires et autres véhicules d’occasion. Une situation qui pèse sur l’économie régionale, estime Kwami Ossadzifo Wonyran docteur togolais en économie.
Plus d’un mois après leur fermeture le 20 août, sur décision du président nigérian Muhammadu Buhari, les frontières nigérianes restent légalement infranchissables aux véhicules d’occasion et à divers produits alimentaires (boissons, riz, surgelés). Si l’économie béninoise est durement touchée, car très dépendante de ses exportations vers son voisin nigérian, les autres pays de la sous-région, notamment le Togo, ne sont pas épargnés.
Pour Kwami Ossadzifo Wonyra, docteur en économie à l’université de Kara, cette fermeture doit amener les pays à diversifier les partenaires sociaux pour que l’économie des pays voisins ne soit plus asphyxiée par la fermeture de la frontière nigériane.
Jeune Afrique : Quelles sont les économies impactées par la fermeture de la frontière entre le Nigeria et le Bénin ?
Kwami Ossadzifo Wonyra : Pour le Bénin, l’impact est très prononcé et tous ceux qui utilisent le commerce informel sont touchés [d’après la Banque mondiale, le commerce informel entre le Bénin et le Nigeria représenterait 20 % du PIB du premier, ndlr]. Mais l’économie togolaise n’est pas épargnée. Dès le début de la fermeture, on a noté une flambée des prix du carburant illicite importé du Nigeria, ce qui a entraîné de l’inflation.
Le secteur de la construction est également touché du fait du ralentissement de l’importation du ciment Dangote. Tout au long du littoral, les producteurs voient leur chiffre d’affaires baisser, créant une surproduction sans précédent. Enfin, en ce qui concerne les exportations, certains produits risquent de périr, ce qui va entraîner un manque à gagner pour les producteurs togolais.
Quelles sont les conséquences de la fermeture de la frontière sur la future zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) ?
Certes, le Nigeria n’a pas ratifié l’accord sur la ZLECA mais il l’a quand même signé, ce qui peut bloquer l’accélération de sa mise en œuvre. Néanmoins, cela peut être une opportunité pour que les pays puissent respecter les règles d’origine qui sont inscrites dans l’accord, dans lequel il est clairement précisé que les échanges concernent les produits originaires des pays membres (et non la réexportation de produits importés de pays tiers).
Cette affaire va ouvrir des perspectives de réflexion pour que de telles situations n’arrivent plus avant le début de la mise en œuvre de l’accord, prévue en juillet 2020.
Quelles pourraient être les solutions alternatives à la fermeture des frontières ?
Le Nigeria doit d’abord faire d’efforts en matière d’investissements pour amener son agriculture à produire suffisamment afin de parvenir à l’autosuffisance alimentaire. C’est une leçon pour le pays qui doit faire des efforts en diversifiant son économie. La fermeture systématique des frontières ne réglera pas à elle seule la situation.
Par ailleurs, les pays voisins doivent limiter l’importation de carburant illicite tout en faisant en sorte que les stations d’essence légales puissent satisfaire la demande nationale. Enfin, il faut que le secteur agricole diversifie au maximum ses partenaires commerciaux.
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