François Lonsény Fall

Premier ministre de Guinée

Publié le 22 mars 2004 Lecture : 3 minutes.

« Non, je ne connais pas mieux New York que Conakry », dit en riant le nouveau chef du gouvernement guinéen. Il est vrai que cet homme jovial de 55 ans est diplomate depuis vingt-cinq ans. Mais ce petit-fils d’émigrants sénégalais, né à Dabola au centre de la Guinée, a fait toutes ses études et une grande partie de sa carrière au pays. Nommé ministre des Affaires étrangères en 2002, il a fait preuve d’une grande souplesse lors du bras de fer franco-américain sur l’Irak. Premier ministre depuis le 23 février dernier, il va mettre désormais ses talents de diplomate au service de la « décrispation » politique. Son atout ? L’homme ne milite dans aucun parti.

Jeune Afrique/L’Intelligent : L’après-Lansana Conté risque d’être une période troublée. L’armée pourrait-elle jouer un rôle d’arbitre ?
François Lonsény Fall : Pour l’instant, le général Conté est là. Il est président. Je ne peux pas disserter sur l’après-Conté. De toute façon, souvenez-vous, après la mort de Sékou Touré, tout le monde prédisait la guerre civile. Or des hommes sages nous ont préservés de la guerre. Quant à la question de l’armée, je ne crois pas qu’elle se pose. Il y a une nouvelle culture en Afrique. La prise de pouvoir par des moyens non constitutionnels n’est plus admise. À l’Union africaine, c’est même la tolérance zéro.
J.A.I. : Quelle sera la priorité de votre action gouvernementale ?
F.L.F. : Redresser la situation économique et financière qui n’est pas reluisante. Il faut faire en sorte que, d’ici à la fin de l’année, l’argent rentre à nouveau dans les
caisses de l’État. Pour cela, nous venons de créer un ministère du Contrôle économique et financier. Il faut aussi résoudre les problèmes de l’eau, de l’électricité et du téléphone. Il faut enfin restaurer la confiance avec nos partenaires internationaux.
J.A.I. : Vous avez été choisi parce que vous êtes connu et apprécié de ces partenaires. Mais cela suffira-t-il pour renouer avec des bailleurs de fonds très mécontents du mode
de réélection du président Conté ?
F.L.F. : Mon profil a sans doute joué dans ma nomination, c’est vrai, mais je sais que la confiance avec les partenaires ne se restaurera pas grâce à mon image. Tout dépendra de nos résultats sur le terrain. Sur le plan politique, je dis que l’élection est derrière nous et que nous sommes prêts, aujourd’hui, à reprendre le dialogue avec les partis de l’opposition pour décrisper l’atmosphère.
J.A.I. : L’opposition réclame la libéralisation des ondes et une commission électorale indépendante. Engagerez-vous ces réformes d’ici à 2005 ?
F.L.F. : Des radios privées en 2005, ce n’est pas impossible. La loi sur la liberté de la presse existe. Son premier volet sur la presse écrite est déjà appliqué. Maintenant, nous allons travailler très activement sur le second volet, à savoir précisément la libéralisation des ondes. Quant à la Commission électorale indépendante, je ne peux pas assurer qu’elle sera créée. Chaque pays a ses lois. Chez nous, le ministère de l’Administration du territoire est compétent en matière électorale. Je pense qu’on pourrait s’entendre avec les partis politiques pour créer un organe ad hoc dans ce cadre-là. De ce point de vue, l’arrivée à ce ministère de Kiridi Bangoura (NDLR : en remplacement de Moussa Solano) est un bon présage pour l’avenir.
J.A.I. : La possibilité de poursuivre votre carrière aux Nations unies vous donne-t-elle une plus grande liberté que vos prédécesseurs face au président ?
F.L.F. : Il est vrai que j’ai eu au début de cette année une proposition du secrétaire général des Nations unies. Mais je sais ce que je dois à mon pays. C’est lui qui m’a donné tout ce que j’ai aujourd’hui. J’ai donc décidé de continuer à le servir. Et je ne souhaite pas arriver au jour où je devrai changer de métier [rires].

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