Des législatives de bon augure

Publié le 22 mars 2004 Lecture : 3 minutes.

Le premier tour des élections des assemblées des îles, qui s’est tenu aux Comores le dimanche 14 mars, s’est déroulé dans le calme. 255 160 électeurs étaient appelés aux urnes pour cette première consultation électorale depuis juin 2002. Tous les résultats n’avaient pas encore été définitivement validés à l’heure où nous mettions sous presse, mais quelques tendances se dégageaient cependant : 13 députés ont été élus au premier tour, alors que 55 sièges étaient en jeu en Grande Comore, à Mohéli et à Anjouan. En Grande Comore (Ngazidja), le taux de participation a été de 62 %, et aucun incident n’a été déploré par les observateurs de l’Union africaine. Quatre candidats de la coalition soutenant le dirigeant de l’exécutif insulaire, Mze Abdou Soulé El Bak, ont été élus au premier tour. Les partisans de l’opposant au président de l’Union, Azali Assoumani, originaire lui aussi de l’île de Ngazidja, pourraient y bénéficier d’une courte majorité. Ce qui ne constitue pas véritablement une surprise. Les barons de la politique insulaire – les fameux dinosaures -, tenus pour responsables de la faillite de l’archipel dans les années 1990, ont été marginalisés au sein du camp présidentiel. L’opération de renouvellement de la classe dirigeante s’est traduite par la promotion de jeunes candidats au profil de technocrates, mais dépourvus d’assise villageoise forte. Une stratégie qui a peut-être compromis les chances de victoire du camp présidentiel à Ngazidja. La relative contre-performance enregistrée dans la première île du pays est contrebalancée par les résultats partiels d’Anjouan, où le camp de l’Union devrait être majoritaire. Le chef de l’État, constatant que nombre de ses fidèles étaient en ballottage favorable, s’est dit confiant pour le second tour du 21 mars.

Commentant le scrutin, Ali Msaidié, le porte-parole du gouvernement, s’est félicité du bon déroulement du vote : « On s’achemine vers une stabilité réelle, et il semble que la démocratie s’installe. » C’est aussi l’avis des observateurs internationaux, pour qui ces élections étaient un test. Le processus de normalisation doit s’achever avec les législatives de l’Union, prévues pour les 24 et 28 avril 2004. Plusieurs dossiers chauds attendent les parlementaires qui seront désignés à la fin du mois prochain. À commencer par le vote des lois organiques qui fixeront le partage des compétences entre les trois îles autonomes d’une part, et l’Union de l’autre. Le flou des dispositions transitoires qui organisaient la transition entre la présidentielle de mars-avril 2002 et les législatives (initialement prévues en octobre 2002) est en effet à l’origine du paralysant conflit d’attributions qui a fait perdre presque deux ans au pays. Le blocage institutionnel, les risques de dérapage, illustrés notamment par les incidents de décembre 2003, quand une manifestation non autorisée des partisans d’El Bak avait failli dégénérer, ont amené la communauté internationale à s’impliquer dans un plan de règlement de la crise : les accords de Moroni du 20 décembre dernier. Ce jour-là, en présence notamment de Thabo Mbeki, le président sud-africain, d’Abdou Diouf, le secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), de Paul Bérenger, le Premier ministre de Maurice, et de Pierre-André Wiltzer, le ministre français délégué à la Coopération, tous les protagonistes de l’imbroglio insulaire s’étaient engagés à tenir les législatives des îles et de l’Union dans les délais les plus brefs. Les diplomates l’avaient affirmé sans ambages : pour les Comores, c’était l’accord de la dernière chance. Les formations politiques ont, semble-t-il, compris le message.

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L’Assemblée de l’Union, qui sera connue fin avril, aura théoriquement la possibilité d’amender la Constitution de décembre 2001. Une hypothèse que redoutent tout particulièrement les Anjouanais, rentrés dans le giron fédéral après une tentative séparatiste, entre 1997 et 2001. Le caractère tournant de la présidence, qui doit normalement revenir à un Anjouanais ou à un Mohélien à l’expiration du mandat du chef de l’État actuel, en 2006, est pour eux l’acquis fondamental du nouveau système. Mais cette disposition est loin d’arranger les politiciens grands-comoriens, pouvoir et opposition confondus, car si elle était respectée, ils devraient alors patienter jusqu’en 2014 avant de pouvoir briguer la magistrature suprême.

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