Que les grosses fortunes lèvent le doigt !

Publié le 23 janvier 2007 Lecture : 2 minutes.

La guéguerre des patrimoines à laquelle se sont livrés, la semaine dernière, les candidats à l’élection présidentielle française a quelque chose de sidérant, vu du sud de la Méditerranée. Premier constat, somme toute banal : pour faire de la politique, mieux vaut être riche. Si l’on en croit le montant des contributions versées en 2006 au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), le plus à l’aise est Nicolas Sarkozy. Base imposable du ministre de l’Intérieur : 1,14 million d’euros, soit la coquette somme de 746 millions de F CFA. À très courte distance se tient Jean-Marie Le Pen, qui a payé 300 euros de moins que « Sarko » à l’ISF, mais dont la propriété de Saint-Cloud vaut plusieurs millions. Arrive ensuite Ségolène Royal, dont le patrimoine immobilier personnel avoisine 450 000 euros, le double si l’on additionne celui de son compagnon François Hollande – ce qui a valu au couple d’être assujetti à l’ISF en 2006. François Bayrou et Philippe de Villiers se tiennent juste en dessous de la barre fatidique, avec un patrimoine immobilier et foncier de, respectivement, 700 000 et 600 000 euros. En queue de liste : l’inoxydable trotskiste Arlette Laguiller : 2 300 euros de retraite mensuelle, 5 000 euros d’économies et une Renault Clio. Ni elle ni son camarade facteur Olivier Besancenot (une Peugeot 106) ne sont menacés d’être rattrapés par l’ISF !
Exercice sain pour la transparence de la vie politique, ces déclarations, obligatoires pour tout candidat à la présidence et pour tout élu en début et en fin de mandat, seront-elles un jour transposées à l’Afrique ? Hormis l’Afrique du Sud, où des pas prometteurs ont été faits en ce sens, aucun pays n’a inclus un tel « outing » dans sa législation. Dans le cas contraire, les conséquences en seraient décoiffantes. Car déclarer est une chose, justifier en est une autre. Comment tel ou tel ministre, gouverneur de banque, trésorier-payeur général, voire tel chef de parti, pourrait-il expliquer le fossé abyssal qui sépare ses biens de ses revenus officiels ? Comment tel ou tel chef d’État pourrait-il exposer sur la place publique l’étendue de ses avoirs à l’étranger, sans parler de ceux de son épouse, de ses enfants, neveux, nièces et assimilés ? Devrait-il avouer qu’il détient de facto en usufruit personnel son propre pays ? À moins que l’un d’eux, poussé par quelque inspiration divine – ou quelque pulsion suicidaire -, ne se décide à faire le premier pas, quitte à négocier au préalable son immunité, le continent demeurera le royaume de l’opacité. Seule différence : hier, il n’était pas rare de voir un ministre ou un haut fonctionnaire fêter au champagne, en toute impudeur, son premier milliard. Aujourd’hui, on cache sa fortune. C’est déjà ça !

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