Pis que pendre

Publié le 23 janvier 2007 Lecture : 2 minutes.

Je voudrais revenir sur un des événements qui ont clos l’année 2006 : l’exécution de Saddam Hussein. En tant que citoyenne du monde foncièrement opposée à la peine de mort, j’ai trouvé fort choquantes les images de son supplice qui ont fait le tour de la planète. J’ai malheureusement eu le triste privilège de voir l’intégralité de sa pendaison, non pas en allant fouiner comme tant d’autres sur un des sites macabres qui ne cachaient rien de ses derniers instants, mais en regardant tout simplement les informations d’une chaîne numérique française. J’avoue avoir été soufflée par tant de barbarie et d’irrespect face à un être sur le point de franchir le seuil de l’au-delà. Cette corde impressionnante qui n’aurait pas déparé le cou d’un brontosaure, ces quolibets et insultes dignes de voyeurs médiévaux assistant au supplice d’un bandit de grand chemin roué à coups de barre de fer On se serait cru un instant sur la place de Grève.
Je tiens à être claire : mon propos n’est point de prendre la défense d’un tyran qui a commis nombre d’atrocités. Simplement, je voudrais remettre en cause la responsabilité de certains médias. Est-il bon, dans l’intérêt de l’information, de tout montrer ? Faut-il forcément que le spectateur lambda boive à tout prix le calice jusqu’à la lie ? Certaines chaînes de télévision ont eu la décence de couper la séquence au moment où Saddam se tenait debout sur l’échafaud. D’autres ont jugé utile de diffuser l’intégralité de la vidéo pirate. En quoi s’y sentaient-elles obligées ? Les derniers instants d’un condamné, quels que soient ses crimes, ne devraient-ils pas bénéficier d’un minimun de respect ?

Non, il semblerait qu’il soit normal de jeter en pâture au grand public l’agonie des êtres humains. On a vu à quel point la mort est aujourd’hui banalisée, quand elle n’est pas tournée en dérision. Un site de jeux en ligne vient d’ailleurs de sortir un jeu du pendu avec un Saddam Hussein animé, suspendu à une potence. D’autres sites montrent des parodies de l’exécution du plus mauvais goût, où l’on voit le dictateur prier d’une voix d’outre-tombe avant de se balancer au bout d’une corde.
Les conséquences de la diffusion de l’exécution à la télévision sont d’ores et déjà désastreuses. Selon Associated Press, celle-ci a incité de nombreux enfants du monde islamique à se livrer à de funestes jeux de rôles en parodiant la pendaison de l’ex-raïs, oubliant qu’une corde de gibet est bien plus dangereuse qu’une corde à sauter Plusieurs d’entre eux ont ainsi trouvé la mort dans ce qui se voulait un simulacre de pendaison. On a voulu faire de l’exécution du tyran déchu un exemple. Mais, à trop tirer sur la corde, nombre de médias ont plutôt fait de son châtiment une succession de tours pendables dont les premières victimes, innocentes, elles, sont des enfants.

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