Mali : Ibrahim Boubacar Keïta qualifie « d’élucubrations » les spéculations sur un putsch
Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta a qualifié « d’élucubrations » les spéculations sur un putsch militaire à la suite d’un revers meurtrier infligé par les jihadistes à l’armée, alors qu’il recevait la classe politique samedi.
L’armée malienne a essuyé ses plus lourdes pertes depuis des années des mains des jihadistes dans deux attaques lundi et mardi à Boulkessi et Mondoro, dans le centre du pays, près de la frontière du Burkina Faso. Trente-huit soldats ont été tués, selon un bilan gouvernemental largement soupçonné d’être en deçà de la réalité. Ces attaques et l’impuissance imputée au pouvoir central à faire face à la dégradation continue de la situation ont réveillé le spectre d’un coup d’État semblable à celui mené par des officiers en 2012.
Le président malien a assuré samedi que « toutes les conséquences » seraient tirées de ces évènements. Mais, a-t-il ajouté devant des responsables politiques, le Mali, « plus que jamais, a besoin de solidarité, a besoin de se resserrer, n’a pas besoin d’élucubrations des nostalgiques du putsch ».
« Aucun putsch militaire ne prévaudra au Mali »
« Aucun putsch militaire ne prévaudra au Mali, qu’on se le dise. Et je crois que cela n’est pas du tout à l’ordre du jour et ne saurait nous inquiéter », a-t-il dit selon l’enregistrement de ses propos diffusé par la présidence.
La bataille de Boulkessi est une nouvelle illustration de la dégradation continue de la situation dans ce pays en proie depuis 2012 à des insurrections indépendantistes, salafistes et jihadistes et à des violences intercommunautaires meurtrières. Elle a provoqué la colère des familles des soldats, qui ont accusé le pouvoir de cacher la vérité et de ne pas donner à l’armée les moyens de se défendre.
Le chef de l’État malien a dit « comprendre l’émoi » suscité chez « les jeunes militaires », mais, a-t-il promis, « nous en tirerons toutes les conséquences ».
« Moyens limités »
En mars, une attaque jihadiste dans laquelle une trentaine de soldats avaient été tués, suivie une semaine après par le massacre de 160 villageois peuls au cours de violences intercommunautaires, avait débouché sur le limogeage des principaux chefs d’état-major. Le gouvernement avait démissionné en avril sous la pression de manifestations contre l’impuissance de l’État.
Samedi, le président s’est contenté de demander au gouvernement « d’être vigilant, d’anticiper ».
« Nous sommes en guerre »
Il a espéré que les missions onusienne, africaine et française face aux jihadistes porteraient leurs fruits. Mais il a aussi tenu des propos aux sombres perspectives.
« Nous sommes en guerre. Ça veut dire que ce qui s’est passé à Boulkessi pourrait malheureusement survenir encore », a-t-il dit. Par ailleurs, Boulkessi « était l’un de nos points les mieux protégés » et avait été renforcé. Cela n’aurait pas empêché les jihadistes d’y saisir d’importantes quantités d’armes et d’équipements.
Lui-même a annulé un déplacement en Suisse et en France « en raison de la volatilité des choses » et parce qu’il pensait que sa présence était « moralement de mise, même si elle est de peu d’effet ».
Et face aux agissements des jihadistes, pour lesquels infliger « la mort est devenue l’objectif », « nos moyens deviennent limités », a-t-il reconnu.
Les solutions sécuritaire et politique à la détérioration de la situation paraissent pour l’heure introuvables.
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