Des relents colonialistes

Publié le 22 décembre 2003 Lecture : 2 minutes.

La capture de Saddam Hussein était inévitable. Mais les images de ce chef d’État traité comme un hors-la-loi, traqué dans son dernier refuge par des troupes occidentales armées jusqu’aux dents, sont choquantes. Elles en rappellent cruellement d’autres, qu’on croyait
appartenir à un passé révolu : les troupes britanniques poursuivant le Mahdi, au Soudan, Lyautey faisant plier Abdelkrim, au Maroc Le 13 décembre est un nouvel épisode de l’histoire coloniale.
Ces images nous rappellent aussi que la guerre déclenchée par la coalition était illégitime. Qu’elle a déjà tué vingt mille Irakiens, militaires et civils. Qu’aucune arme de destruction massive n’a été trouvée dans le pays, qu’aucun lien n’a pu être établi
entre Oussama Ben Laden et le dictateur déchu, et que ce dernier était, dans une certaine mesure, une création de l’Occident.
Américains et Britanniques étaient menacés d’enlisement en Irak. Pour eux, l’arrestation de Saddam est une excellente nouvelle, qu’ils s’efforcent d’exploiter au maximum. Reste à savoir de quelle manière ils le feront. Saisiront-ils l’occasion pour accélérer le transfert de pouvoir aux Irakiens, précipiter leur départ et confier aux Nations unies le rôle de superviser l’élaboration de la nouvelle Constitution et la tenue des futures
élections ? Ou, au contraire, s’obstineront-ils dans leur volonté de « remodeler » l’ensemble du monde arabe ?

S’ils choisissent la seconde solution, la résistance à l’occupation pourrait y trouver un nouveau souffle. Et un surcroît de légitimité. Car les résistants, dans leur grande majorité, ne combattaient pas pour Saddam, qui, pour sa part, se cachait autant d’eux que des Américains. Leur cause est devenue nationale. Tous les Irakiens hostiles à la présence
américaine à commencer par les chiites sont susceptibles de s’y rallier, sans réticence.
Saddam a obtenu le statut de prisonnier de guerre et sera protégé par la convention de Genève. Comme l’on sait, les prisonniers de Guantánamo n’ont pas cette chance… Le problème est qu’au cours de son procès, il pourrait être conduit à dire des choses embarrassantes. Révéler, par exemple, ses liens passés avec certains gouvernements
occidentaux. Et l’ampleur de l’aide qu’il en a reçue. Lui en laissera-t-on la possibilité ?
Il va de soi que personne ne peut défendre Saddam Hussein, la brutalité de son régime, ses violations systématiques des droits de l’homme. Mais, aux yeux de certains, son plus grand crime est sans aucun doute d’avoir refusé de se plier aux exigences américaines et
d’avoir menacé Israël. Voilà pourquoi il a été pourchassé et pourquoi il sera puni. Le reste, c’est de la mise en scène !

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