L’après-pétrole a commencé

Si les réserves d’hydrocarbures s’amenuisent, d’autres ressources minières prennent progressivement le relais. Ainsi, le manganèse suscite la convoitise des investisseurs étrangers.

Publié le 21 novembre 2005 Lecture : 3 minutes.

Et si Total Gabon était l’arbre qui cache la forêt ? La filiale du groupe français est toujours le premier opérateur pétrolier du pays avec une production de 110 000 barils/jour (sur un total de 260 000 b/j), suivi de Shell (55 000 b/j) et Perenco (42 000 b/j). Mais derrière ce trio de tête, une vingtaine d’autres sociétés pétrolières se sont installées au Gabon, parmi lesquelles quatre nouveaux venus depuis 2004 : le chinois Sinopec, les sud-africains Rockover et Mvelaphanda ainsi que le « petit français qui monte », Maurel et Prom. Avec une trentaine de champs exploités et des réserves estimées à 3,5 milliards de barils, la production s’est stabilisée à 13,5 millions de tonnes depuis 2003, représentant encore 45 % du PIB, 80 % des exportations et 55 % des recettes fiscales. Il n’empêche, le Gabon a bel et bien perdu sa place de troisième producteur d’Afrique subsaharienne au profit de la Guinée équatoriale. « Le maintien de la production grâce à l’optimisation des techniques de forage ne doit pas faire oublier que la perspective de déclin est une certitude », résume Jean-Pierre Favennec, économiste à l’Institut français du pétrole (IFP). Il est difficile d’échapper aux règles de la géologie. Conscientes de cette réalité, les autorités de Libreville misent sur la diversification de l’économie nationale. Avec un atout de taille : les autres richesses du sous-sol.
Dans le sud-est du pays, le gisement de manganèse de Moanda (situé dans le Haut Ogooué) est exploité depuis les années 1960 par la Comilog (Compagnie minière de l’Ogooué), filiale du groupe métallurgique français Eramet. La production est régulière, de bonne qualité, et l’extraction devrait dépasser les 3 millions de tonnes en 2006. Mais la Comilog est à présent confrontée à une rude concurrence. La Compagnie brésilienne Vale do Rio Doce (CVRD) a entrepris en mars 2004 des travaux de prospection sur deux gisements, dans la même province, à Franceville et Okondja. Les réserves sont estimées à 175 millions de tonnes.
Par ailleurs, l’opérateur brésilien s’est vu attribuer, en mars 2005, un site de 80 hectares sur la zone industrielle d’Owendo, près de Libreville, pour accueillir une plate-forme d’exportation du minerai. Les investissements portant sur des voies ferrées, deux centrales électriques, des équipements et un terminal portuaire sont chiffrés à 140 millions de dollars. Parallèlement, les chinois de Sinostel ont obtenu en avril 2005 un accord de prospection près de Mbigou, dans le sud du pays. Deux autres sociétés de l’empire du Milieu ont par ailleurs créé la Compagnie industrielle et commerciale des mines du Gabon (CICMG) pour explorer, puis exploiter, le site de Njole, situé à 50 kilomètres au sud de Libreville. « Le Gabon a l’ambition de devenir le premier producteur au monde de manganèse », affirme le ministre des Mines, du Pétrole, de l’Énergie et des Ressources hydrauliques Richard Onouviet. À l’horizon 2007-2008, la production pourrait atteindre les 7 millions de tonnes.
L’autre « vertige du sous-sol » se trouve dans le nord du pays, avec le fabuleux gisement de fer de Belinga, dans la province orientale de l’Ogooué-Ivindo. Les premiers wagonnets de minerai devraient sortir en 2008. D’ici là, les investissements prévus sont colossaux. Le consortium international détenu à 51 % par la CVRD prévoit de dépenser 645 millions de dollars pour construire une ligne de chemin de fer, des routes, un barrage hydroélectrique et le port en eau profonde de Santa-Clara. Parmi les autres partenaires, on retrouve les chinois de Sinostel et de la CMEC, ainsi que la Comilog. Tous doivent à présent s’entendre sur le partage des revenus espérés. Le Gabon dispose en outre d’un minerai à très haute valeur ajoutée, utilisé pour la fabrication d’aciers très spéciaux ou des alliages particulièrement résistants destinés à l’aéronautique. Il s’agit du niobium. Une société a été créée, la Minière de la Mabounié, détenue à 40 % par la Comilog. Découvert dans les années 1980, le gisement situé à l’est de Lambaréné va être relancé et le démarrage des études sur deux ans doit coûter 4 millions de dollars.
Fer, manganèse et niobium, le potentiel minier gabonais pourrait à terme générer 300 millions à 400 millions de dollars par an. On comprend mieux l’empressement des investisseurs étrangers et l’optimisme affiché par les autorités de Libreville.

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