Botswana : les élections générales vont trancher un combat des chefs inédit

Les électeurs ont commencé à voter, mercredi au Botswana, pour des élections qui s’annoncent comme les plus disputées de l’histoire du pays, au point de menacer le règne sans partage du parti au pouvoir depuis l’indépendance du pays en 1966.

Mokgweetsi Masisi, président du Botswana et leader du BDP, arrive à un meeting dans un village à une quarantaine de kilomètres de Gaborone, le 22 octobre 2019. © REUTERS/Siyabonga Sishi

Mokgweetsi Masisi, président du Botswana et leader du BDP, arrive à un meeting dans un village à une quarantaine de kilomètres de Gaborone, le 22 octobre 2019. © REUTERS/Siyabonga Sishi

Publié le 23 octobre 2019 Lecture : 3 minutes.

Les quelque 2 200 bureaux de vote du pays ont ouvert leurs urnes dès 06H30 (04H30 GMT). « Nous voulons tous une chance de donner notre avis », a déclaré, déterminé, Chops Maswikiti, un banquier de 37 ans venu dès l’aube déposer son bulletin dans l’urne à l’école Tlogatloga, dans la capitale Gaborone. Le scrutin pour l’élection des 57 députés du Parlement botswanais doit se poursuivre jusqu’à 19H00 (17H00 GMT). Le parti qui obtiendra la majorité choisira ensuite le président du pays. Les résultats sont attendus d’ici à la fin de la semaine.

Jusque-là loué pour ses pratiques démocratiques et sa stabilité exemplaires, ce vaste pays d’Afrique australe riche en diamants et en éléphants sauvages est agité par une guerre fratricide entre son actuel chef de l’État et son prédécesseur.

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L’ex-président a quitté le parti au pouvoir

Comme le veut la Constitution, Ian Khama, au pouvoir depuis 2008, a cédé il y a dix-huit mois les rênes du Botswana à son vice-président, Mokgweetsi Masisi, issu du même Parti démocratique du Botswana (BDP). Mais depuis, le torchon brûle entre les deux hommes.

En mai dernier, Ian Khama a même claqué la porte du BDP en accusant son successeur de dérive autoritaire. « J’ai constaté une menace pour notre démocratie (…) nous avons des dirigeants devenus ivres de pouvoir », expliquait l’ex-chef de l’Etat dans un entretien à l’AFP.

Cette fronde inédite fragilise aujourd’hui la position électorale dominante du BDP, qui avait réalisé le plus mauvais score de son histoire aux élections générales de 2014 en tombant sous la barre symbolique des 50% des suffrages.

Le principal parti d’opposition, la Coalition pour un changement démocratique (UDC), espère tirer les marrons du feu.

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« Comme Trump »

« L’élection s’annonce très serrée, son sort peut basculer dans un sens comme dans l’autre », résume l’analyste Peter Fabricius, de l’Institut sud-africain pour les études de sécurité (ISS). Et Ian Khama n’a pas ménagé sa peine pour nuire à son ancien parti, y compris en appelant publiquement à voter pour l’UDC et ses candidats dans plusieurs régions du pays.

Fils du cofondateur du BDP et premier président du pays Seretse Khama, l’ex-chef de l’Etat a gardé de puissants alliés au sein du parti et une incontestable influence dans le pays. Il reproche à son successeur d’avoir tourné le dos à son héritage, notamment en levant l’interdiction de la chasse aux éléphants.

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« Il a voulu effacer tout ce que nous avons mis en place », a déploré Ian Khama. « Notre démocratie est menacée par un tsunami de la même veine que ce que fait (Donald) Trump dans son pays », a-t-il ajouté.

Pas de menace pour la stabilité du pays

Son rival Mokgweetsi Masisi se justifie en expliquant que la politique de son prédécesseur avait nui à l’image du parti au pouvoir et s’est dit persuadé de l’emporter. « Nous sommes forts mais pas arrogants », a-t-il assuré mardi en clôturant sa campagne devant un millier de partisans réunis dans son village natal de Moshupa. « J’espère demain une manifestation éclatante de confiance ».

Le chef de l’UDC, Duma Boko, est persuadé que l’heure de l’alternance a enfin sonné. « Je pense que nous allons gagner cette élection », a-t-il pronostiqué.

Avec un produit intérieur brut par habitant de plus de 8 000 dollars largement nourri par ses diamants, le Botswana est un des pays les plus riches du continent. Mais il est aussi un des plus inégalitaires, avec un taux de chômage de 18%. Contrairement à d’autres pays voisins, l’importance des enjeux ne devrait toutefois pas menacer la stabilité du Botswana.

Mokgweetsi Masisi a promis de respecter le verdict des urnes. « Si l’inattendu se produit et que nous ne sommes pas vainqueurs, je ferai tranquillement mes bagages et je rentrerai chez moi », a-t-il assuré mardi, « l’Etat de droit s’impose à tous au Botswana et j’y suis très attaché ».

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