Faisant fi des pressions du FMI, le Maroc préfère avancer à petits pas vers le dirham flexible
Abdellatif Jouahri, le gouverneur de Bank Al-Maghrib n’entend pas céder au FMI, qui souhaite voir le Maroc accélérer sa libéralisation du régime de change pour le dirham. Le royaume attendra encore avant d’engager une nouvelle étape de cette réforme.
Abdellatif Jouahri, le gouverneur de Bank Al-Maghrib, n’aime pas qu’on touche ou qu’on perturbe son calendrier des réformes et il n’hésite pas à le faire savoir. Il l’a démontré lors de son passage à Washington pour les Assemblées annuelles du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque Mondiale, qui se sont tenues du 14 au 20 octobre.
Si le FMI s’est montré insistant ces derniers mois concernant la poursuite de la réforme du régime de change du dirham, Abdellatif Jouahri n’a pas cédé.
Pour le wali de la Banque centrale, la prochaine étape consistera à élargir davantage la bande de fluctuation. Cette libéralisation peut se faire dès le premier signe d’un choc externe sur l’économie du royaume, a indiqué Abdellatif Jouahri, relate Bloomberg, citant en exemple un éventuel pic pétrolier.
Des conditions préalables au passage à la flexibilité des changes
Pour rappel, en 2018 le régime de change du dirham a connu un premier changement avec l’instauration d’une bande de fluctuation élargie à ±2,5 %, contre ±0,3 % auparavant.
Pour le moment donc, rien ne change et Bank Al-Maghrib continuera de maintenir la cotation du dirham dans un panier euro-dollar suivant un ratio de respectivement 60 % et 40 %. « Pour nous, la réforme vise à absorber les chocs externes et à renforcer la compétitivité du Maroc… le timing doit être bien choisi », a affirmé le wali de Bank Al-Maghrib.
Mais ce dernier pose une condition pour la réussite de cette deuxième étape de la réforme du régime de change. La poursuite et le succès des futures étapes dépend d’après lui fortement de la discipline budgétaire.
Vers des taux d’intérêts plus fréquemment ajustés
Il est hors de question, pour lui, d’avancer vers la libéralisation du régime de change si les entreprises, et en particulier les PME, n’y sont pas préparées et si elles ne se sont pas encore adaptées aux réformes de l’année dernière.
Petit à petit, le dirham commencera donc à se défaire du panier de cotation. Suite à quoi, à terme aucune bande de fluctuation ne sera retenue, laissant toute sa marge de manœuvre au marché des devises. “L’offre et la demande détermineront la valeur du dirham”, a expliqué le wali de Bank Al-Maghrib à ce propos.
“Suite à ces changements, le pays envisage de passer de la gestion de sa monnaie à une politique monétaire qui cible l’inflation et dans laquelle les taux d’intérêt seront ajustés plus fréquemment”, poursuit Abdellatif Jouahri.
Assouplissement du contrôle des capitaux
Le Maroc doit faire face à des besoins sociaux croissants. Le roi Mohammed VI a demandé en août dernier l’élaboration d’un nouveau modèle de développement économique pour essayer d’effacer les disparités sociales très présentes au Maroc, puis invitant même en octobre les banques à ouvrir le robinet des crédits pour financer l’économie en générale, et les jeunes en particulier. “Ce nouveau modèle ne ralentira pas les réformes monétaires”, a rassuré le wali de la Banque centrale.
“Le Maroc a récemment perdu du terrain sur la compétitivité mondiale… le gouvernement doit rattraper son retard. Si les réformes des changes arrivent à leur troisième phase, les autorités devront assouplir davantage les contrôles des capitaux”, explique Jouahri, qui rappelle que la loi de finances 2020 prévoit déjà une amnistie fiscale de 5 % pour les entreprises et les citoyens possédant des avoirs à l’étranger.
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