Le Sarko choc
On n’a pas besoin d’être toujours d’accord avec Nicolas Sarkozy pour reconnaître que, depuis son élection, la France bouge. Après le grand sommeil du second mandat de François Mitterrand et l’apnée des années Chirac, voilà, enfin, du mouvement.
La présidence « monarchique », empesée, lointaine a rendu l’âme. Les amours, la vie privée, le cigare dans les jardins, dorénavant tout est public ou presque. Nicolas Sarkozy ne connaît pas la langue de bois, il traite les uns de « connards », les autres d’« incompétents », il ne s’embarrasse pas de prudence, il « engueule » ministres, généraux et hauts fonctionnaires, il n’hésite pas à partager avec les Gaulois son bonheur, son malheur, son divorce et ses conquêtes. Imperméable aux critiques et aux sondages, il assume sans complexe apparent un mode de vie et un style « brut de décoffrage », finalement so typically French.
En quatorze mois, la France a « accepté » une réforme des fameux régimes spéciaux de retraite, une réforme de la carte judiciaire, une réforme du droit de grève, un début de privatisation de certains services publics (GDF et La Poste), une réorganisation de l’omnipotent ministère des Finances, la lutte sans pitié contre l’immigration clandestine, l’autonomie des universités, la diminution des effectifs de la fonction publique, le démantèlement de la télévision publique, une mise à mort lente et systématique des 35 heures, la réhabilitation des heures supplémentaires et, d’une certaine manière, la réhabilitation du profit, du gain, de l’argent Dans les semaines qui viennent, on mettra en Âuvre une réforme des armées qui devrait aboutir à la suppression de 55 000 postes. Et, à l’heure où vous lirez ces lignes, le président aura pris un risque énorme en tentant d’obtenir du Congrès une réforme constitutionnelle. Ouf !
Sur le plan extérieur, la France n’est plus la France. Tabou suprême, elle a réintégré de facto l’Otan (que de Gaulle avait quittée avec perte et fracas en 1966). Elle s’est rapprochée des États-Unis, elle est devenue atlantiste, ou presque. En quatorze mois, Sarkozy a fait aboutir, tant bien que mal, son idée d’Union pour la Méditerranée (UPM). Un concept encore vide d’argent et de structure, mais qui incite l’Europe à penser différemment, à penser plus « grand ». Quarante-trois chefs d’État et de gouvernement à Paris sous le soleil, avec cette image d’un Premier ministre israélien à quelques mètres d’un président syrien sur l’estrade officielle du défilé du 14 Juillet En quatorze mois, la France s’est aussi rapprochée d’Israël, tout en offrant aux Palestiniens un appui plus que symbolique. Elle s’est réinstallée au Moyen-Orient et a réaffirmé ses liens avec les pays du Maghreb. Il y aurait beaucoup à dire, à critiquer, à contester, mais voilà : la France endormie, sclérosée, conservatrice est soumise au choc Sarko.
À Paris, aussi, ça bouge. La capitale a survécu à l’humiliation olympique et aux émeutes des banlieues. On sent un souffle créatif, une jeunesse que l’on n’avait pas vue depuis des lustres. Les Vélib sillonnent la ville, et les grands projets d’architecture se multiplient. Le maire Bertrand Delanoë, socialiste, homosexuel reconnu et accepté, évoque « l’audace » et le « libéralisme »Â
Sarkozy et DelanoëÂ
Il va falloir suivre ces deux incarnations françaises du changement.
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