Ce qui attend el-Béchir

Au regard des différentes dispositions du droit international, ce n’est pas demain que l’homme fort de Khartoum risque de se retrouver dans le prétoire de la CPI.

Publié le 21 juillet 2008 Lecture : 2 minutes.

Il revient à trois femmes – la Ghanéenne Akua Kuenyehia, la Lettonne Ekaterina Trendafilova et la Brésilienne Sylvia Steiner -, membres de la chambre préliminaire de la Cour pénale internationale (CPI), d’émettre – ou de refuser d’émettre – le mandat d’arrêt international demandé par le procureur, Luis Moreno-Ocampo, à l’encontre du président soudanais Omar el-Béchir.
Dans un délai d’au moins deux mois, ces trois juges vont apprécier s’il y a des « motifs raisonnables de croire » ­qu’el-Béchir a commis les faits dont l’accuse le procureur dans sa requête. Pour donner son quitus, la chambre préliminaire s’assure que trois conditions sont réunies : les crimes présumés ont été commis dans un lieu et pendant une période qui relèvent de la CPI ; les faits sont suffisamment graves pour relever de la compétence de la Cour (en l’espèce l’accusation de génocide est discutable) ; le système judiciaire soudanais a fait preuve d’un manque de volonté ou d’une incapacité à mener des poursuites.
Le cas échéant, les magistrates délivreront un mandat d’arrêt ou une citation à comparaître. L’acte sera transmis à Interpol, qui pourrait dès lors émettre une notice rouge, ordonnant l’arrestation immédiate. Une telle éventualité clouerait El-Béchir dans son pays – il pourrait, sait-on jamais, être arrêté dans un État étranger – et constituerait une sérieuse entrave à l’action internationale du Soudan.
Pour l’heure, tout porte à penser que l’homme fort de Khartoum ne se retrouvera pas dans le prétoire de la CPI. Si l’on en juge par sa réaction à l’ouverture de la procédure, l’idée d’une reddition volontaire est écartée. Il est illusoire d’attendre la moindre coopération du Soudan. N’ayant pas signé le traité de Rome, qui a institué la CPI, il n’accepte pas la compétence de cette juridiction.

Compétence universelle
Dépourvue de forces de police, la CPI ne peut compter que sur la co­opération des États pour lui transférer les personnes qu’elle poursuit. Dans le cas présent, seul le Tchad coopérerait.
Un autre obstacle risque de gêner l’action de la CPI : l’immunité dont bénéficie tout chef d’État, Premier ministre ou ministre des Affaires étrangères en fonctions, selon un principe de droit international qui empêche que des responsables de ce rang soient arrêtés ou poursuivis pendant l’exercice de leur charge. Cette règle a été réaffirmée par la Cour internationale de justice (CIJ), dans son arrêt du 14 février 2002, quand elle a interdit à la justice belge de lancer, au nom de la compétence universelle, un mandat d’arrêt international contre Abdoulaye Yerodia pour des faits commis alors qu’il était le chef de la diplomatie congolaise.
Si cet obstacle est contourné, au nom de l’article 27 du statut de Rome, qui dispose expressément que les chefs d’État ne sont pas exemptés de poursuites devant la CPI, le Conseil de sécurité de l’ONU a la faculté de suspendre l’action contre el-Béchir pendant un an. Voire plus s’il estime que celle-ci constitue une menace pour la paix ou la sécurité internationale. En l’occurrence, beaucoup craignent qu’une inculpation du numéro un soudanais embrase le Darfour et enterre un processus de paix déjà bien mal en point.

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