Mohamed Diawara

L’ancien ministre ivoirien du Plan est mort le 13 juin à Abidjan.

Publié le 21 juin 2004 Lecture : 3 minutes.

Mohamed Tiékoura Diawara est décédé le 13 juin à la Polyclinique Sainte-Anne d’Abidjan, au terme d’une « longue et douloureuse maladie ». Il avait 76 ans. Ancien ministre du Plan d’Houphouët reconverti dans les affaires, il avait été mêlé, au milieu des années 1980, à l’un des plus gros scandales financiers de l’Afrique contemporaine : le détournement de 6,5 milliards de F CFA au préjudice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Ceao).

Né le 23 mai 1928 à Dori, au Burkina, Diawara a passé l’essentiel de son enfance dans différentes villes de l’ouest de la Côte d’Ivoire (Danané, Lakota, Bouaflé), où son père était instituteur. Il poursuivra ses études au lycée Faidherbe, à Saint-Louis-du-Sénégal, qu’il quitte, le bac en poche, pour la France. Passionné de mathématiques, il fait les classes préparatoires au célèbre lycée Janson-de-Sailly. Puis il étudie l’économie et les statistiques à l’Université de Paris, avant de s’inscrire à l’Institut de développement économique de la Bird, la future Banque mondiale, à Washington.
Dès lors, sa carrière était toute tracée dans un pays qui s’acheminait, à petits pas, vers l’indépendance : la haute fonction publique. Il entame sa carrière professionnelle dans l’ombre de Raphaël Saller, premier grand argentier du jeune État, comme conseiller technique, puis directeur de cabinet. Il poursuit son ascension vers les sommets : administrateur général du Plan, directeur de la Planification et, le 21 janvier 1966, ministre délégué au Plan, puis, à compter du 23 septembre 1968, ministre du Plan. Il coiffera ce département stratégique pendant onze ans. Brillant, boulimique, il assure par ailleurs plusieurs mandats dans différentes institutions publiques, au Conseil économique et social et à la tête de la Banque ivoirienne de développement industriel notamment. Il affiche ses idées tiers-mondistes en créant en 1974, avec la caution morale des présidents Houphouët et Senghor, le Club de Dakar, une structure de rencontres et de discussions informelles sur les problèmes de développement.
Tout semble réussir au jeune surdoué, considéré alors comme l’un des principaux artisans du « miracle » économique ivoirien. Jusqu’à sa brutale éviction du gouvernement en 1977. Utilisant son réseau relationnel, Diawara se reconvertit dans les affaires, crée, avec d’autres, la Bank of Africa, contribue à la naissance d’Ecobank, propose ses services en tant que consultant à plusieurs gouvernements africains. Puis c’est la descente aux enfers. Au début des années 1980, il réussit à persuader la Ceao de lui confier 6,5 milliards de F CFA tirés de son Fonds d’intervention et de solidarité pour le développement (Fosidec), contre promesse de placements juteux auprès de banques suisses. Mais il ne put ni rendre ni même justifier l’usage des fonds lorsque ses mandataires les lui réclamèrent.

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Révélée par Jeune Afrique, l’affaire fit, à l’époque, grand bruit. Arrêté le 28 octobre 1984 à l’occasion d’un sommet de la Ceao à Bamako, Diawara fut transféré à Ouagadougou, siège de la Communauté. Où il fut jugé, en même temps que deux des principaux fonctionnaires de l’organisation régionale avec qui il avait monté l’opération. Reconnu coupable d’escroquerie, il fut condamné en avril 1986 à quinze ans de prison, mais bénéficia en 1991 d’un allègement de sa peine, sur décision des chefs d’État de la Ceao. À sa sortie de prison, il se fit plus discret. Il conseilla un moment le chef de l’État ivoirien, Henri Konan Bédié, et entretenait, ces dernières années, d’excellentes relations avec Laurent Gbagbo, qui s’est personnellement occupé de lui faire prodiguer des soins, aussi bien en France qu’en Côte d’Ivoire.
Mohamed Diawara a été inhumé le 16 juin à Abidjan. Il laisse une femme, cap-verdienne, ainsi que six enfants.

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