Le Niger veut croire à sa chance

Publié le 22 juin 2004 Lecture : 3 minutes.

Le Sahel sera-t-il bientôt aussi convoité que le golfe de Guinée ? Toujours est-il que
l’exploitation du pétrole tchadien extrait des champs de Doba a redonné espoir aux pays enclavés. À commencer par le Niger, qui pense disposer des ressources suffisantes pour intégrer le club des pays producteurs. La présence de pétrole dans l’est du pays est connue depuis les années 1970, mais son extraction n’a pas encore été jugée suffisamment
rentable.
Le potentiel pétrolier du pays réside dans deux grands bassins qui couvrent 90 % du territoire : le bassin occidental dit bassin des Iullemenden et, à l’Est, de celui du Tchad. Les premières prospections ont débuté en 1958, essentiellement dans la région du Djado à l’extrême nord du pays. Mais ce n’est que dix ans plus tard que l’on vit de grandes compagnies comme Conoco, Texaco ou Exxon s’intéresser au pays. Exxon, associée au groupe Elf, s’est particulièrement investie sur les bassins orientaux, qui semblent présenter le plus grand intérêt.
Durant les quatre décennies qui ont suivi l’indépendance, près d’une quarantaine de puits ont été forés, dont la moitié dans la partie sud du Ténéré. Une vingtaine de forages ont
révélé des traces d’hydrocarbures, notamment dans le sud-est du pays, près du lac Tchad, à proximité de la localité de Nguimi. Ce qui a conduit l’État à délimiter des zones d’exploitation pour les attribuer à d’éventuels opérateurs.
Au début des années 1990, l’adoption d’un nouveau code pétrolier a suscité un regain d’intérêt pour l’exploration. En 1992, la compagnie texane Hunt Oil s’est vu attribuer le
permis du Djado pour une durée de dix ans. Le permis du Ténéré a été confié au canadien TG World Energy, qui a débuté ses recherches en 1997. Enfin, le permis d’Agadem a été
octroyé à la société Esso Exploration & Production Niger, détenue par Exxon à 80 %, en association avec Elf, à 20 %. À cette époque, une demi-douzaine de forages réalisés sur le
bloc 1 de ce permis ont permis d’évaluer les réserves à environ 300 millions de barils de
brut et 10 milliards de m3 de gaz.
C’est cette zone qui intéresse aujourd’hui Petronas Carigali, associée à ExxonMobil. Après avoir ouvert des bureaux à Niamey au début de l’année 2002, la société malaisienne
a lancé officiellement de nouvelles recherches sur le site d’Agadem le 27 mai dernier. La campagne de forage de trois puits d’exploration, actuellement en cours, doit durer cinq
mois. Petronas espère que ces forages seront suffisamment probants pour poursuivre les recherches en 2005.
Selon les spécialistes, il faudrait un minimum de 800 millions de barils de réserves pour justifier les investissements nécessaires à l’exploitation du brut nigérien. Ceux-ci sont
estimés à quelque 2 000 milliards de F CFA (3 milliards d’euros). Dans le cas du permis d’Agadem, aucun gros gisement n’a été localisé. L’exploitation de multiples petites
poches nécessiterait donc le forage d’un grand nombre de puits pour atteindre un niveau de production économiquement viable. Elle exigerait en outre la réalisation d’importantes
infrastructures d’évacuation. Selon Michel Flohic, directeur général de Petronas Carigali Niger, l’enclavement du pays imposerait la construction d’un oléoduc de 900 km, à raccorder à celui qui relie le Tchad à la côte camerounaise.
Officiellement inauguré à Kribi par la partie camerounaise le 12 juin dernier, ce pipeline
suscite déjà de nouveaux projets dans une zone longtemps jugée trop enclavée pour être prospectée. Ainsi, le consortium américano-malaisien composé d’ExxonMobil, Chevron et Petronas, qui exploite déjà les champs de Doba depuis un an, a signé le 10 mai avec le gouvernement tchadien une nouvelle convention de recherches et d’exploitation des hydrocarbures. Cette convention d’une durée de trente ans concerne les bassins de Doba, Salamat et du lac Tchad. La conclusion de cet accord est donc l’une des premières retombées du projet opéré par ExxonMobil. Et d’autres majors pourraient bien s’intéresser
à cette zone, qui d’ailleurs va bien au-delà du sud du Tchad. Outre le Niger, c’est l’est de la Centrafrique et le Nord du Cameroun qui nourrissent désormais des rêves d’or noir jugés jusqu’ici peu réalistes.

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