Toujours la Chine !

Publié le 21 mai 2007 Lecture : 3 minutes.

Le Festival de Cannes a confirmé, dès son ouverture, le 16 mai, l’apparition d’une nouvelle géographie du cinéma mondial. Hormis le très hollywoodien Zodiac, polar quelque peu décevant de David Fincher, tous les films phares des premiers jours de la manifestation venaient en effet d’Asie et d’Europe de l’Est, deux régions aujourd’hui cinématographiquement très dynamiques.
La nouvelle grande puissance chinoise a été tout particulièrement à l’honneur : un réalisateur originaire de Hong Kong et un autre de Taiwan ont en effet inauguré le cycle des projections dans les deux grandes sections officielles. Très attendu, le premier film en compétition était ainsi celui de Wong Kar-wai, My Blueberry Nights. L’auteur tant célébré de 2046 et de In the Mood for Love s’est offert cette année, selon ses propres termes, « un film de vacances ». Il a donc tourné, pour la première fois en anglais et loin de son territoire de prédilection, une sorte de road movie sentimental : une jeune femme tente d’oublier une peine de cur au cours d’un long périple entre les côtes est et ouest des États-Unis. Une uvre légère, attachante, à l’esthétique soignée, mais qui ne retrouve pas la magie des films précédents de Wong Kar-wai, dont le style subtil a, semble-t-il, du mal à s’acclimater sous le ciel américain.
Lors de l’ouverture de la section Un certain regard, Hou Hsiao-hsien, même s’il ne s’agit pas pour lui d’une première, a également été tenté par une escapade loin de ses bases, en l’occurrence à Paris. Très librement inspiré d’un film français vieux de cinquante ans, Le Voyage du ballon rouge évoque quelques mois de la vie d’un enfant de 7 ans, de sa baby-sitter chinoise et de sa mère marionnettiste, superbement interprétée par Juliette Binoche. Là encore, il ne s’agit certainement pas du meilleur long-métrage de l’auteur, mais cette chronique d’une vie familiale agitée lui offre l’occasion d’un beau portrait de la société française d’aujourd’hui. Et d’une promenade réjouissante dans un Paris qui a rarement été aussi bien filmé.
On l’aura compris : ces deux films de cinéastes chinois de tout premier plan suscitent la sympathie davantage qu’un véritable enthousiasme. Ils ont d’ailleurs reçu, à Cannes, un accueil favorable, sans plus. En revanche, le public des professionnels, au moins dans sa grande majorité, a été fortement impressionné par la qualité et l’originalité de 4 mois, 3 semaines & 2 jours, du Roumain Cristian Mungiu. Le film raconte une histoire d’avortement clandestin, en 1987, quelques années avant la chute du dictateur communiste Ceausescu. Mungiu parvient à susciter l’émotion sans jamais verser dans le pathos, grâce à une réalisation aussi sobre et précise qu’intelligente et pleine de virtuosité. Venant après deux belles découvertes de même origine, à Cannes (La Mort de Dante Lazaresacu, de Cristi Puiu, en 2005, et 12 h 08 à l’est de Bucarest, de Corneliu Porumboiu, en 2006, tous deux primés), ce film témoigne à coup sûr de l’apparition d’un « jeune cinéma roumain » très prometteur.
Après presque vingt ans de purgatoire, le cinéma d’Europe de l’Est est décidément en pleine renaissance. Sa particularité est qu’il traite de thèmes on ne peut plus politiques, mais de biais, à travers des sujets de société. Une façon de faire qui se répand d’ailleurs de plus en plus, comme devraient le confirmer, à Cannes, toute une série de films, à commencer par les nouveaux documentaires de Michael Moore (sur l’industrie pharmaceutique) et de Barbet Schroeder (sur l’avocat Jacques Vergès).

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