Jeu de chaises musicales dans l’armée

Publié le 21 mai 2007 Lecture : 2 minutes.

La chute de Kerfalla Camara, chef d’état-major de l’armée, marque la fin d’une époque. Ce Soussou bon teint, originaire de Kindia, au cur de la Guinée maritime, était, parmi tous les membres du Comité militaire de redressement national (CMRN), qui a porté Lansana Conté au pouvoir le 3 avril 1984, le dernier à être resté à un poste important. Kerfalla, en outre, symbolisait l’emprise des « anciens tirailleurs sénégalais » qui ont cheminé avec Conté depuis les premières années de la création de l’armée guinéenne. Ingénieur en génie civil formé à Moscou, devenu ministre de l’Habitat au lendemain du coup d’État de 1984, puis inspecteur général des forces armées avant d’atterrir à la tête de l’état-major en 2000, Kerfalla Camara a eu tous les pouvoirs, y compris celui de renverser Conté
Seul patron de l’armée à avoir détenu les clés de la poudrière, c’est à lui que le président, dépassé par les événements de février 2007, a fait appel pour gérer le pays, placé sous état de siège. « J’ai donné l’ordre à l’armée de tirer sans sommation sur tout attroupement, avait-il prévenu à l’époque. Quant aux soldats, je considère qu’ils sont en règle. À ce titre, je leur applique la loi martiale dans toute sa rigueur. » En clair, peine de mort pour tout acte de désertion ou de désobéissance.
Pour remplacer ce personnage qui avait fini par incarner l’armée, Conté s’est tourné vers Diarra Camara, jusqu’ici commandant de la 3e région militaire, à Kankan. Ce Toma de Macenta, en dépit de son nom à consonance soussoue ou malinkée, appartient à un groupe minoritaire, fortement christianisé, que les Guinéens, majoritairement musulmans, devraient difficilement accepter au pouvoir. Formé à l’école de guerre de Chine, ancien commandant du bataillon autonome de Boké, puis des zones militaires de Kindia et de Kankan, Diarra Camara est réputé obéissant, voire docile. Comme pour le talonner, le président a nommé au poste de chef d’état-major adjoint un membre de son ethnie, le Soussou Mamadou Sampil. Cet ingénieur en bâtiment, formé en Allemagne, était précédemment chef d’état-major adjoint de l’armée de terre.
Autre départ remarqué : celui du ministre de la Défense, Arafan Camara, chef d’état-major adjoint jusqu’à son entrée dans le gouvernement, le 28 mars. Ce Malinké de Farannah, parent par alliance de l’ex-président Ahmed Sékou Touré, avait un double atout : la confiance de Conté et l’amitié du Premier ministre, Lansana Kouyaté. Mais un événement a fortement influencé la décision de le limoger. Le 11 mai, alors que des colonnes d’hommes en armes s’acheminaient vers le centre-ville, le chef de l’État a tenté à plusieurs reprises de le joindre sur son téléphone portable. En vain.
La nomination à sa place de Mamadou Baïlo Diallo, chef d’état-major de l’armée de terre jusqu’à la fin 2005, avant d’être mis d’office à la retraite, tout comme 1 872 autres soldats (soit le dixième de l’effectif total), apparaît comme une revanche. Parti frustré, Diallo revient par la grande porte. Ce général rigoureux affiche de remarquables faits d’armes. C’est lui qui, en 2000, à la tête de ses hommes, a repoussé les assauts de troupes libériennes et sierra-léonaises dans le sud de son pays.

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