[Tribune] Reverdir le Sahara, un plan de survie pour la planète
Le plus grand désert du monde peut devenir une planche de salut si la possibilité, bien réelle, de sa transformation est prise au sérieux. C’est la thèse que défend un livre de l’ingénieur Jean-Edouard Buchter, paru aux éditions Favre en septembre 2019.
-
Jean-Edouard Buchter
Ingénieur, diplômé de l’Ecole polytechnique de Zurich, auteur du livre « Reverdir le Sahara » (Editions Favre, Lausanne, 2019)
Publié le 13 novembre 2019 Lecture : 2 minutes.
Géographiquement, cet immense désert présente des opportunités que n’ont ni le désert de Gobi ni celui d’Australie. Les opportunités du Sahara sont : la chute de pluies encore existantes au sud et dans les massifs montagneux, la proximité de grands fleuves tropicaux, la basse altitude de plateaux argileux permettant le pompage.
Historiquement, le désert fut vert depuis la fin de l’ère glaciaire, jusqu’à environ 5 000 ans avant notre époque. Des peintures rupestre d’une extraordinaire richesse l’attestent. Or un lent changement climatique l’a peu à peu asséché. Cet assèchement a abouti à un basculement vers une sécheresse totale.
Plusieurs météorologues ont établi des modèles de simulation pour le climat du Sahara, qui prédisent une augmentation de l’humidité avec un retour de la mousson africaine. Ce basculement devrait se produire déjà dans le courant de ce siècle. Il est lié au réchauffement climatique et à l’augmentation du gaz carbonique atmosphérique.
Importance de la pluie
La première source d’eau à valoriser est la pluie encore existante. Elle est déjà en probable augmentation. Elle tombe sur la bordure du Sahel ainsi que sur les reliefs tels que le l’Atlas, le Hoggar, le Tibesti, l’Aïr, les monts du Soudan. Tout l’art consiste à ne pas laisser ces pluies raviner le sol et s’écouler vers des marais où elles vont s’évaporer. Il faut retenir cette eau dans des cuvettes creusées dans le sol et dans lesquelles la végétation pourra croître. Cette méthode s’appelle le « zaï ». Elle était pratiquée par les cultivateurs du Sahel. Mon livre détaille certaines expériences actuelles, extrêmement efficaces, dans ce domaine.
La pacification, africaine et mondiale, dépendra de la régénération des terres
Une autre ressource est constituée par les fleuves, tels le Niger, le Sénégal et le Nil. Ceux-ci coulent pratiquement au même niveau que le terrain désertique. En période de crue, ces fleuves pourraient fournir une eau d’arrosage abondante pour des cultures saisonnières. D’autres réalisations, chantiers ou projets sont analysés de façon critique, tels la seconde vallée d’Égypte, le transfert de l’Oubangui au Chari, l’utilisation de l’eau des embouchures fluviales, le dessalement.
Effort sociétal majeur
Beaucoup de chantiers sont en cours. Mon propos est de multiplier cet effort par mille et d’en faire un effort sociétal majeur de ce siècle, dont les conséquences seront la revitalisation des terres des habitants du Sahel, du Maghreb et des oasis; l’inversion de l’exode rural; l’absorption de l’augmentation démographique africaine; la création de terres d’accueil pour les populations déplacées par les problèmes climatiques et les guerres; la résorption du gaz carbonique atmosphérique.
Dans certaines régions, la sécurisation est le préalable à toute action. C’est un problème militaire. Mais la pacification, africaine et mondiale, dépendra de la régénération des terres. C’est un problème essentiellement agricole et sociétal. Cette problématique est avant tout africaine, puis européenne et mondiale. Le partenariat eurafricain sera décisif dans ce défi qui est aussi celui de la résistance face aux forces mercantiles de l’ouest et dirigistes de l’est.
Une fondation a été créée par l’éditeur du livre, Pierre-Marcel Favre, dans le but de promouvoir le concept de reverdir le Sahara en en établissant la faisabilité.
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus
- Sextapes et argent public : les Obiang pris dans l’ouragan Bello
- Burkina Faso : entre Ibrahim Traoré et les miniers, une guerre de tranchées à l’ho...
- Guinée : ce que l’on sait de la mystérieuse disparition de Saadou Nimaga
- Sécurité présidentielle au Cameroun : Dieudonné Evina Ndo, une ascension programmé...
- Ilham Aliyev, l’autocrate qui veut « dégager » la France d’Afrique