Algérie : adoption d’un projet de loi controversé sur les hydrocarbures
Les députés algériens ont adopté jeudi un projet de loi controversé, visant à assouplir et simplifier le régime juridique et fiscal du secteur des hydrocarbures, dont se sont détournés les investisseurs étrangers.
« Les députés ont adopté à la majorité le projet de loi sur les hydrocarbures », a indiqué A3, une des chaînes de télévision nationale. Issue des législatives de 2017, l’Assemblée populaire nationale (APN, chambre basse) est très largement dominée par les partis de l’alliance ayant soutenu Abdelaziz Bouteflika jusqu’à sa démission en avril sous la pression de la rue.
Le projet de loi a été présenté par le gouvernement de Noureddine Bedoui, nommé par Bouteflika deux jours avant qu’il ne démissionne, et que le mouvement inédit de contestation considère dès lors comme « illégitime ». Depuis son adoption en Conseil des ministres le 14 octobre, le texte a suscité une virulente opposition en Algérie, car accusé de « brader » la richesse nationale aux multinationales.
Troisième producteur d’Afrique de pétrole et parmi les dix premiers producteurs mondiaux de gaz, l’Algérie a un besoin urgent de découvrir de nouveaux gisements, pour pallier à de dangereux mouvements croisés de baisse continue de la production des gisements existants et de hausse de sa consommation nationale. Depuis l’adoption en 2005 de la législation jusqu’ici en vigueur, et malgré des amendements en 2013, les entreprises étrangères se désintéressent du sous-sol algérien pourtant prometteur.
« L’exploration de nouvelles réserves pétrolières et gazières est devenu un impératif urgent pour l’Algérie, d’où la nécessité d’un cadre juridique adéquat », avait affirmé le ministre de l’Énergie, Mohamed Arkab, début novembre lors de la présentation du projet loi aux députés, qui n’ont examiné le texte qu’une unique journée.
Selon Mohamed Arkab, seuls 20% des appels d’offres ont trouvé preneurs depuis 2008.
60% du budget
Le nouveau cadre juridique et fiscal vise à attirer de nouveau les investisseurs pour alléger le géant national des hydrocarbures Sonatrach, détenu à 100% par l’État, du fardeau des lourds investissements et des risques élevés liés à la recherche de nouveaux gisements, avait-il expliqué. Sonatrach souffre aussi de l’obsolescence des infrastructures pétrolières algériennes, faute d’investissements récents.
La nouvelle loi laisse les titres miniers (droits sur le sous-sol) aux mains de l’État et continue de garantir une part majoritaire de Sonatrach dans les partenariats, tout en permettant un partage plus favorable aux partenaires étrangers de l’exploitation et des investissements, selon des experts.
Elle élargit aussi la palette des types de contrats, adaptés aux différents risques industriels, et allonge leur durée. Elle remet en outre à plat la fiscalité, instituant notamment un taux fixe (30%) de l’impôt sur les résultats et la suppression de la « taxe sur les profits exceptionnels ».
La colère populaire s’est cristallisée autour du projet de loi sur les hydrocarbures notamment en raison de la suspicion entourant tout projet de loi porté par l’actuel gouvernement, considéré comme « illégitime », et par un régime accusé d’avoir depuis des années dilapidé la rente pétrolière.
Les recettes liées au hydrocarbures contribuent à 60% du budget de l’Algérie. Le pays produit actuellement environ un million de barils de pétrole par jour contre plus d’1,4 million en 2005, selon les chiffres des autorités.
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