Le sabre d’El Hadj Oumar Saïdou Tall, fondateur de l’empire Toucouleur, rendu par la France au Sénégal

Le Premier ministre français Edouard Philippe a symboliquement remis dimanche au président sénégalais Macky Sall un sabre appartenant à El Hadj Oumar Saïdou Tall. Un geste qui s’inscrit dans l’engagement du président Emmanuel Macron à commencer la restitution à l’Afrique de son patrimoine culturel.

Edouard Philippe, le premier ministre français, remettant le sabre d’d’El Hadj Omar Saïdou Tall au président Macky Sall, le 17 novembre 2019 à Dakar. © DR / Primature Fr

Edouard Philippe, le premier ministre français, remettant le sabre d’d’El Hadj Omar Saïdou Tall au président Macky Sall, le 17 novembre 2019 à Dakar. © DR / Primature Fr

Publié le 18 novembre 2019 Lecture : 3 minutes.

Edouard Philippe a remis au président Macky Sall le sabre d’Oumar Saïdou Tall, une très belle pièce de fer, de laiton, de cuivre, de cuir et de bois avec son étui faisant partie des collections du Musée de l’armée à Paris. S’il ne s’agit pas encore à proprement parler d’une restitution, ce geste en est « la première étape », a dit le Premier ministre français au cours d’une cérémonie à la présidence sénégalaise en présence des descendants de l’ancien propriétaire.

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Parmi des accords politiques ou commerciaux signés dimanche a été paraphée une convention prévoyant le dépôt du sabre au Musée des civilisations noires de Dakar pour cinq ans, le temps que soit rédigée en France une loi sur la restitution proprement dite. Le sabre se trouve déjà depuis plusieurs mois au musée de Dakar sous la forme d’un prêt.

Sabre d’un grand conquérant

« Nous sommes liés par l’histoire », a dit Edouard Philippe en faisant référence à la colonisation et aux relations privilégiées après l’indépendance du Sénégal, « et ce lien prend un accent particulier aujourd’hui ». Il a rappelé qu’il conservait lui-même précieusement son sabre d’officier.

« Le sabre qui nous réunit ici est infiniment plus prestigieux que celui que je possède, c’est celui d’un grand conquérant, celui d’un guide spirituel … le sabre du fondateur de l’empire toucouleur qui comprenait la Guinée, le Mali, le Sénégal actuel, c’est le sabre d’un érudit », a-t-il rappelé. « C’est un amateur de sabre qui vous le dit : sa place est bel et bien ici, au coeur de l’ancien empire toucouleur », conclut-il.

Érudit musulman et guide de l’importante confrérie des Tidianes, Oumar Saïdou Tall, dit El Hadj Oumar, fut à l’origine de l’empire toucouleur. Il combattit les troupes françaises de 1857 à 1859 avant de signer un traité de paix avec eux en 1860. Selon des historiens sénégalais, il disparut mystérieusement dans les falaises de Bandiagara, au Mali, en 1864.

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Restituer tous les biens africains

Son fils Ahmadou (1836-1897) lui succéda mais fut vaincu par les Français en avril 1893 à Bandiagara. C’est là que les Français s’emparèrent du sabre, à la lame de fabrication française et au pommeau en forme de bec d’oiseau, mais aussi d’autres pièces, des armes, des manuscrits et de l’or, selon les historiens.

Les collections publiques françaises renferment au moins 90 000 objets d’art d’Afrique sub-saharienne. Plus des deux tiers 70 000 – se trouvent au Quai Branly, dont 46 000 ramenés durant la période 1885-1960. Plus de vingt mille autres se trouvent dispersés dans de nombreux musées, y compris au Havre, dont Philippe fut le maire.

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Le président sénégalais a rappelé que « depuis des décennies, les restitutions font l’objet d’intenses et légitimes réclamations » de la part des pays africains. Au cours d’un discours à Ouagadougou le 28 novembre 2017, Emmanuel Macron avait souhaité que « d’ici cinq ans les conditions soient réunies pour des restitutions temporaires ou définitives du patrimoine africain en Afrique« .

« Ce jour est historique. Voici que les descendants d’anciens belligérants se retrouvent et sympathisent comme pour signer définitivement la paix des braves », a dit le président sénégalais. « C’est symbolique. On nous l’avait prêté mais là on va nous le restituer », a déclaré le directeur du Musée des civilisations noires de Dakar, Hamady Bocoum. Comme d’autres présents à la cérémonie, il a dit attendre davantage. « On est prêt à tout prendre ».

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