L’islam en tête

Selon le Vatican, le nombre des musulmans dans le monde est désormais supérieur à celui des catholiques. Mais reste inférieur à celui des chrétiens, toutes obédiences confondues.

Publié le 21 avril 2008 Lecture : 2 minutes.

On dirait presque une compétition. « Pour la première fois dans l’Histoire, nous ne sommes plus en tête : les musulmans nous ont dépassés, reconnaît Mgr Vittorio Formenti, directeur de l’Annuaire pontifical 2008, dans L’Osservatore romano, le quotidien du Vatican, du 29 mars. « Par rapport à l’ensemble de la population, poursuit le prélat, la proportion des catholiques reste stable, tandis que celle des musulmans augmente en raison d’un taux de natalité plus élevé. » De fait, si le nombre des catholiques augmente au même rythme que la population mondiale (+ 1,5 % entre 2005 et 2006), celui des musulmans progresse plus vite (+ 2 %). Mais, au-delà de ce premier constat, la fiabilité des chiffres et la pertinence de la comparaison laissent perplexe.

Chiffres peu fiables
L’évaluation réalisée par les services du Saint-Siège se fonde sur des données datant de 2006 et ne donne de décomptes précis que pour les catholiques (grâce notamment aux registres de baptêmes). Concernant le nombre des musulmans, le Vatican a utilisé les projections de l’ONU. Le problème est qu’en l’absence de registres l’organisation internationale part du principe que chaque enfant de musulman naît musulman. Pour les pays arabes, par exemple, on soustrait de la population du pays les chrétiens et les immigrés en provenance de pays non musulmans. Méthode pour le moins hasardeuse lorsqu’on sait qu’en Indonésie ou en Arabie saoudite il reste difficile de se déclarer non musulman. Par ailleurs, ces statistiques ne font aucune distinction entre les pratiques religieuses, qui connaissent pourtant des fortunes fort diverses selon les continents et les communautés.
L’islam et le christianisme comptent autant de grands courants (sunnisme, chiisme et kharidjisme pour le premier ; catholicisme, protestantisme et orthodoxie pour le second). Aussi eût-il été plus pertinent de comparer le nombre des catholiques romains (environ 50 % des chrétiens) à celui des seuls sunnites (85 % des musulmans). Mais, là encore, les chiffres sont rarement fiables. La solution la plus judicieuse serait de comparer l’ensemble des musulmans : 1,3 milliard de fidèles, 19,2 % de la population mondiale ; et l’ensemble des chrétiens, toutes obédiences confondues : plus de 2 milliards de fidèles, 33 % de l’humanité (dont, catholiques : 17,4 % ; protestants : 5,6 % ; orthodoxes : 3,6 % ; anglicans : 1,3 % ; autres chrétiens : 5 %).

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Constante progression
Bien que sujettes à caution, ces statistiques n’en sont pas moins l’occasion de mettre en lumière des évolutions intéressantes. Comme le souligne Odon Vallet, un spécialiste français des religions, « les premiers pays en nombre de musulmans sont l’Indonésie, l’Inde, le Pakistan et le Bangladesh. Pour les catholiques, les quatre premiers pays sont le Brésil, le Mexique, les États-Unis et les Philippines ». Berceaux de ces deux grandes religions, les pays arabes et européens n’en seraient donc plus les fiefs.
Enfin, si le nombre des musulmans ne dépasse pas encore celui des chrétiens, toutes les projections statistiques et démographiques confirment que, depuis le début des années 1990, leur part dans la population mondiale est en constante progression. D’où la volonté de la plupart des dignitaires catholiques de mettre en place un dialogue durable avec le monde musulman. Parce qu’ils songent, bien sûr, à l’avenir des minorités catholiques et, plus généralement, de l’Église dans de nombreuses régions. Ce n’est donc pas un hasard si Rome accueillera, du 4 au 6 novembre prochain, le premier « Forum catholiques-musulmans » à l’occasion duquel se réuniront vingt-quatre dignitaires de chacune des deux religions.

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