Hewa Bora : la descente aux enfers

Le crash de l’un de ses appareils, le 15 avril, à Goma, met en péril ses projets d’expansion et son partenariat avec Brussels Airlines.

Publié le 21 avril 2008 Lecture : 3 minutes.

Elle était la seule compagnie aérienne fiable en République démocratique du Congo (RDC). L’entretien de ses 12 appareils (dont 8 détenus en propre), les compétences de ses 2 000 employés et la solidité de son réseau commercial inspiraient confiance à la clientèle congolaise et étrangère. Mais le crash de son DC-9, avec 79 passagers à bord, le 15 avril, dans un quartier populeux de Goma (est de la RDC), a fait chuter Hewa Bora Airways de son piédestal. Au dernier bilan, plus de quarante personnes, en grande partie des habitants du quartier, sont décédées. Le transporteur se trouve ainsi remisé dans la catégorie de ceux « à éviter », à côté de la plupart de ses collègues du continent.
Née en 2000 et détenue à 25 % par quatre hommes d’affaires (un Kényan, un Congolais et deux Belges), la compagnie semblait pourtant armée pour échapper à la malédiction du ciel africain, qui n’accueille que 3 % du trafic aérien mondial mais où 30 % des victimes de crash ont trouvé la mort ces dix dernières années.

16 000 passagers par mois
En 2007, son chiffre d’affaires avait atteint 30 millions d’euros, pour 12 000 passagers par mois. Un niveau dépassé au premier trimestre 2008, avec une moyenne mensuelle de 16 000 passagers. En septembre dernier, Hewa Bora, qui, outre les grandes villes de RDC, dessert également Lagos, Douala et Johannesburg, avait conclu un accord avec Brussels Airlines lui permettant de vendre des sièges sur certains vols du transporteur belge entre Bruxelles et Kinshasa.
Mieux : deux mois plus tard, elle signait avec le même partenaire pour donner naissance à Air DC. Une compagnie domestique détenue à 49 % par Brussels Airlines et à 51 % par Hewa Bora. « Nous avons choisi cette compagnie parce que c’est la seule opérationnelle dans le pays », explique aujourd’hui Geert Sciot, porte-parole de Brussels Airlines. L’héritière de Sabena, attirée par les multiples possibilités du marché congolais, où les infrastructures de transport sont en déshérence, est censée mettre à disposition de la nouvelle société deux avions – un Boeing 737 et un BAe 146, appareil à décollage et atterrissage courts – ainsi que ses techniciens. En échange de quoi elle doit bénéficier du réseau commercial de Hewa Bora, qui, de son côté, mettra un terme au transport de passagers dès le démarrage des activités d’Air DC. Elles sont prévues « au printemps », précise Geert Sciot. Dans un premier temps, les liaisons seront internes : entre la capitale et Lubumbashi, Mbandaka, Goma, Gemena Ensuite, des vols vers « des pays voisins à marché important » sont envisagés. On songe à l’Angola.
Le mariage aura-t-il lieu ? Un premier orage est survenu le 10 avril : ce jour-là, Hewa Bora figure pour la première fois sur la liste noire des compagnies aériennes établie par l’Union européenne. « Comme nous avons arrêté de desservir l’Europe en 2007, les experts n’avaient plus de moyens de nous évaluer et nous ont mis sur liste noire », explique Stavros Papaioannou, directeur général d’Hewa Bora. La nouvelle a de fâcheuses conséquences en matière d’image. Pour son partenaire Brussels Airlines également, qui toutefois ne souhaite faire aucun commentaire sur le sujet. Ses responsables ne sont guère plus loquaces en ce qui concerne le crash du 15 avril : « Je n’ai pas d’indications selon lesquelles il va remettre en cause notre projet », lâche Geert Sciot. « Avant le crash, j’avais dit à Brussels Airlines que s’ils prenaient une femme noire pour épouse, il ne fallait pas être gênée de se promener avec elle », ironise Stavros Papaioannou. Et si l’épouse se révèle malade ? « On ne l’abandonne pas », tranche-t-il. L’identification des causes de l’accident – qui peut être en partie dû aux déficiences de l’aéroport – permettra de voir si Hewa Bora ne mérite plus son piédestal.

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