Guinée-Bissau : une présidentielle pour remettre le pays sur les rails de la stabilité

Les Bissau-guinéens ont commencé à voter dimanche 24 novembre pour élire leur nouveau président, avec l’espoir de lever les blocages dans lesquels s’est empêtrée depuis des années la classe politique.

Des affiches électorales dans une rue de Bissau, le 23 novembre 2019. © AFP/JOHN WESSELS

Des affiches électorales dans une rue de Bissau, le 23 novembre 2019. © AFP/JOHN WESSELS

Publié le 24 novembre 2019 Lecture : 3 minutes.

« Je viens de voter, un geste très important pour moi et pour tout le pays car nous espérons que le pays tournera définitivement la page sombre de l’instabilité », a déclaré Victor Nafassa, président d’un bureau de vote de Luanda, un quartier de la capitale Bissau.

« Tout le matériel est en place, les candidats sont représentés. Nous avons démarré à 07H05 », avec à peine quelques minutes de retard, a-t-il ajouté, alors que des policiers gardent les alentours et que des observateurs nationaux et internationaux surveillent le déroulement des opérations.

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Les bureaux de vote doivent rester ouverts jusqu’à 17H00 (GMT et locales). Les premières tendances sont attendues en début de semaine. La date du 29 décembre a été retenue pour un second tour hautement probable.

Si la campagne s’est déroulée pratiquement sans heurts, une certaine inquiétude de lendemains difficiles habite les près de 700 000 électeurs appelés aux urnes pour départager les 12 candidats, tous des hommes.

Querelles politiques

« J’espère qu’il n’y aura pas de problème après le vote. Depuis l’indépendance, la Guinée est dans les problèmes. Vous voyez vous même l’état du pays », explique Justin Malang, un chauffeur de 47 ans, alors que près de 70% des quelque 1,8 million de Bissau-guinéens vivent avec moins de 2 dollars par jour.

Cette ancienne colonie portugaise d’Afrique de l’Ouest, abonnée aux coups d’État depuis son indépendance en 1974, a vécu ces quatre dernières années au rythme des querelles entre le président José Mario Vaz et la principale formation du pays, l’historique Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC).

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José Mario Vaz, élu en 2014 sous l’étiquette du PAIGC avant d’en être exclu, avait provoqué l’étincelle en limogeant en août 2015 son Premier ministre, Domingos Simões Pereira, chef de cette même formation.

Sous sa présidence, les Premiers ministres se sont succédé les uns après les autres, sous le regard inquiet des pays d’Afrique de l’Ouest, qui ont multiplié les efforts de médiation. Dans le même temps, des grèves d’enseignants réclamant le paiement d’importants arriérés de salaires paralysaient pendant des mois un secteur de l’éducation en déshérence.

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Favoris issus du système

Deux semaines avant la présidentielle, la communauté internationale s’inquiétait encore d’une remise en question de l’élection et même de « risques de guerre civile », mais la campagne s’est déroulée dans une ambiance festive, avec des bruyantes caravanes de candidats rassemblant des milliers de personnes.

« C’est déjà un défi d’avoir organisé cette élection. C’est un pas qui a été franchi », a confié à l’AFP Julien Nounontin Oussou, chef du Groupe des organisations de la société civile locale (Gosce).

Les favoris de l’élection sont issus du système et ont été des acteurs des crises des dernières années, à commencer par le président sortant, José Mario Vaz, et par son grand rival Domingos Simões Pereira. Il y a aussi Umaro Sissoco Embaló, à la tête d’une dissidence du PAIGC, ou encore Nuno Nabiam, battu au second tour en 2014. Chassé par les militaires entre les deux tours alors qu’il était favori de l’élection de 2012, l’ex-Premier ministre Carlos Gomes Junior tente à nouveau sa chance.

Accusations de corruption

Après des années d’accusations de corruption et de trafic de drogue, le nouveau président pourrait être tenté d’amener avec lui « haine, rancoeurs et règlements de comptes », a confié un analyste à l’AFP, en estimant que « beaucoup d’hommes politiques vont devoir s’exiler » pour échapper à des poursuites judiciaires.

La présence de militaires en armes devant les grilles de la présidence et de véhicules de l’Ecomib, la force de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) déployée dans le pays depuis le coup d’État de 2012, rappellent que l’histoire de la Guinée-Bissau est jalonnée de putschs et d’assassinats politiques.

Mais l’armée n’est pas intervenue au cours des cinq dernières années et son chef, le général Biaguê Na Ntam, a assuré qu’elle ne pensait « plus à fomenter des coups d’État », laissant augurer qu’elle restera dans ses casernes.

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