Derrière le stade

Dans les coulisses des jeux de l’Amitié à Dakar (11-21 avril 1963) qui ont attiré quelque 2 500 athlètes et 3 000 invités de 21 pays.

Publié le 24 avril 2003 Lecture : 2 minutes.

Le Congrès des écrivains noirs s’achève à peine que le Sénégal célèbre un troisième anniversaire d’une indépendance renforcée par un coup d’État manqué et que la violation de son territoire par quatre avions portugais lui fait adresser la première plainte africaine du genre au Conseil de sécurité.
Là-dessus, quelque 2 500 athlètes de 21 nations et environ 3 000 invités débarquent pour les jeux de l’Amitié, dont l’emblème consiste en deux mains, une noire et une blanche qui se passent un flambeau.
Ceux qui ont pu pénétrer au stade de la Liberté le jour de l’ouverture ont constaté qu’en République sénégalaise le sport inspire une passion proche de la rage, rage qui a d’ailleurs causé la mort d’une femme piétinée par la foule et fait quelques blessés.
En effet, la Société immobilière du Cap-Vert n’a pas vu assez grand pour les dieux du stade noirs : on a estimé à quarante mille les spectateurs présents à l’inauguration alors que l’immense ellipse de fer et de béton est prévue pour 15 000 personnes.
Ce rassemblement humain a permis de prendre la température inter-États : des 21 nations représentées, la République arabe unie [Égypte], la France, la Mauritanie, la Tunisie, l’Algérie et le Congo-Léopoldville ont été les plus frénétiquement applaudies. Pour l’Algérie, les bravos étaient ponctués de « Ça, c’est des braves gars » et, pour le Congo-Léopoldville, des habituels « Lu-mum-ba », « Lu-mum-ba ».
Comme toujours, le CongoLéopoldville remporte un succès absolu : soixante-dix athlètes ont débarqué sans préavis sous l’égide de M. Gabriel Zombo, qui m’explique ses démêlés avec la douane de Dakar qui a bloqué l’équipement sportif arrivé de Bruxelles et qu’il avait omis de faire dédouaner à Léo ! En outre, les athlètes congolais ont fait la queue pendant quatre heures devant le Prisunic dakarois pour se faire faire des photos d’identité.
Enfin, d’après l’hymne des Jeux, il s’agit de « corps et d’âmes animés d’une même flamme » !
Grosse attraction, la participation féminine africaine dans neuf sports et, pour la première fois, au basket et à l’athlétisme, dont Wilma Rudolph, la gazelle noire américaine, est reine.
Vêtues de leur n’dobinou, des hôtesses sénégalaises papillonnent et demeurent les véritables vedettes des Jeux. On se demande où est l’Afrique dans ses exhibitions proprement musculaires ou mondaines. Cependant, malgré une singulière absence de chefs coutumiers parmi les officiels, les places au soleil (les moins chères) regorgent de fans en grand boubou. Voilées, les tresses criblées de perles, les pieds passés au henné, les femmes maures adorent le football si l’on en juge par les hurlements poussés par ces femmes si réservées à la vue du ballon rond. Il s’agit là d’une passion rentrée que la fête du muscle leur a enfin permis d’assouvir.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires